Laghouat

La tariqa Tijaniyya. Voie spirituelle et ordre confrérique de Saïd BouterfaSoufisme tijani



Publié le 22.06.2024 dans le Quotidien le soir d’Algérie

MERIEM GUEMACHE

Dans son dernier livre, Saïd Bouterfa s’intéresse au soufisme en général et au soufisme tijani en particulier. Le chercheur a consacré plus de deux décennies à ce travail de recherche. Cet ouvrage, intitulé La tariqa Tijaniyya, voie spirituelle et ordre confrérique, est paru aux éditions el Kalima. Il est préfacé par Nadir Tidjani, moqadem de la zaouia de Guémar.
La tariqa tijaniyya est née en 1150 de l’hégire (1737-1738) à Aïn Madhi (environ 70 km à l’ouest de Laghouat). Elle a été fondée par Sidi Ahmed Ben M’hamed Ibn El Mokhtar Ben Salem El Tidjani.
A 7 ans, le petit garçon connaît les versets coraniques sur le bout des doigts. Plus tard, il étudie les sciences islamiques aux côtés des savants de la région. Puis, le futur cheikh voyage en Egypte, au Maroc et au Hedjaz pour compléter ses connaissances. Il aura l’occasion de rencontrer les plus grands penseurs de son époque. «Réputé pour son érudition, sa piété et son enseignement, le cheikh Ahmed a écrit de nombreuses épitres sur des sujets tels que la purification de l’âme, l’amour de Dieu et le rôle du soufisme dans la vie spirituelle (...) Son héritage perdure à travers ses disciples et les adeptes de la tariqa tijaniyya, qui continuent, à ce jour, à pratiquer et propager ses enseignements.»

Les enseignements du cheikh Ahmed Tijani ont fait des adeptes «en particulier en Afrique où la tariqa deviendra une force spirituelle et sociale majeure, touchant la vie de nombreux musulmans et contribuant à façonner la culture et la pratique religieuses», écrit l’auteur.

Selon Saïd Bouterfa, cheikh Tijani avait une mémoire phénoménale. «Il possédait la capacité de mémoriser ce qu’il entendait dès la première écoute.» Cela lui a facilité l’apprentissage de plusieurs ouvrages de jurisprudence (fiqh). Homme bon et généreux, il apportait son aide aux nécessiteux. Durant son séjour à Fès, il multipliait les dons. «Chaque semaine, il distribuait du blé aux besogneux de la région parmi les faibles, les orphelins, les veuves et tous les nécessiteux (...) Même les animaux recevaient leur part de générosité. Il envoyait chaque soir un de ses serviteurs nourrir les chats du quartier.»

C’est à Bousemghoun, un petit village situé à 120 km au sud d’Abiodh Sidi Cheikh (wilaya d’El Bayadh), que le cheikh âgé alors de 45 ans a une vision prophétique lors d’une retraite (kheloua).
Cette expérience mystique renforcera la conviction du cheikh en tant que maître spirituel. «Il ressent ce besoin impérieux de retraite spirituelle et l’attraction de la petite oasis de Boussemghoun où l’attend sa kheloua, loin de Fès et de ses demeures luxueuses, est tout indiquée. Il ressent l’appel de l’absolu et cet indicible sentiment qu’un évènement grandiose se prépare.» La tradition rapporte que cheikh Tijani a vu apparaître le Prophète Mohammed. «Vision à l’état de veille au cours de laquelle ce dernier lui enjoignit d’abandonner les voies qu’ils avait suivies auparavant, pour ne plus se conformer qu’au wird mohammadien, nouvelle voie et nouvelle orientation édictée par l’Envoyé de Dieu en personne (...) Cette rencontre a été décrite comme une expérience mystique empreinte d’une grâce divine et spirituelle extraordinaire (...) C’est donc à partir de cet épisode et à la suite de ce que l’on appellera plus tard la ‘‘Grande Ouverture’’ (El Feth El Akbar) que la tariqa tijaniyya prendra son essor.»

Ahmed Tijani devient ainsi un guide spirituel pour les adeptes de la tariqa tijaniyya. «Il les conseillait, les orientait dans la voie et les aidait à surmonter les défis et les obstacles sur le cheminement vers la proximité divine.» C’est par le biais des ‘awrad’ que la transmission se fait vers les disciples.

«Une relation étroite entre le maître (cheikh) et le disciple s’établit. Le maître le guide sur le chemin spirituel, lui enseigne les pratiques soufies, la méditation, la purification de l’âme, et transmet les enseignements et les bénédictions spirituelles.»

Les disciples de cheikh Tijani ont effectués des voyages à travers l’Afrique afin de répandre ses enseignements de leur guide spirituel.
Le cheikh Ahmed Tijani est mort le 22 octobre 1815 à Fès. La zaouia qui abrite sa sépulture est un lieu de pèlerinage pour les adeptes de la tariqa tijaniyya.

Né à Paris en 1953, Saïd Bouterfa est auteur, chercheur, photographe et conférencier. Il a travaillé en tant que réalisateur à Radio Alger chaîne 3. Il est diplômé en conservation et restauration de manuscrits et spécialisé dans les manuscrits algériens et le patrimoine. Il a présenté plusieurs expositions de photographie et publié de nombreux ouvrages.

Meriem Guemache

La tariqa Tijaniyya. Voie spirituelle et ordre confrérique. éditions el Kalima. 2023. P. 188. 1 200 da.



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