A l’ère de la société de la connaissance, nous continuons encore à ériger sans stratégie et nous ne disposons pas de carte universitaire ni de carte sanitaire pour anticiper sur l’avenir. En Algérie, nous n’avons pas une politique de la ville, mais de l’urgence irréfléchie.
C’est le constat amer auquel sont arrivés les urbanistes et architectes quant à l’étude du mégaprojet destiné à la réalisation de la nouvelle ville Draâ Erriche, commune de Oued El Aneb, daïra de Berrahal, wilaya de Annaba.
A la faveur du quinquennat présidentiel, des centaines de milliards de dinars sont dilapidées pour un résultat irréfléchi.
«Faut-il à chaque fois rallonger des budgets pour tenter de corriger les aberrations des grands chantiers des décideurs algériens, comme le cas de la ville Ali Mendjeli, où 18 milliards de dinars ont été consacrés pour la mettre à niveau dans le cadre d’un programme d’urgence ?», s’interrogent-ils.
Lors de sa visite sur ce chantier, Abdelmalek Sellal et l’importante délégation ministérielle qui l’a accompagné ne sont pas satisfaits. Cela confirme tacitement l’appréciation négative traduite par les experts en la matière. Ainsi, le plan du grand chantier de cette nouvelle ville n’a pas fait l’unanimité, où chacun des ministres présents a relevé des insuffisances. C’est le cas de Amara Benyounès, ministre de l’Environnement, qui a relevé un manque flagrant d’équipements destinés aux jeunes.
L’absence également d’infrastructures culturelles dans cette nouvelle extension urbanistique, appelée à abriter au total 50.000 familles, a fait sortir Khalida Toumi de ses gonds.
Annoncé en grande pompe par Mohamed El Ghazi, wali de Annaba, ce projet de grande envergure dont les travaux ont été entamés a fait l’objet de plusieurs visites auxquelles ont pris part tous les acteurs concernés, notamment les représentants des villes de Dunkerque et de Bizerte jumelées avec Annaba. Bien qu’il soit d’importance pour l’avenir de cette région, ce projet n’a pas été élaboré en concertation avec des partenaires indépendants à l’administration afin de maîtriser et orienter le développement du tissu urbain devant recevoir les projets d’utilité publique et de logements.
D’où la décision du chef du gouvernement de mettre en place une commission à même de dégager une vision globale à la faveur d’un conseil interministériel pour revoir le plan de la nouvelle ville de Draâ Erriche de Annaba.
«Il faut éviter l’extension urbaine anarchique et les cités-dortoirs», a insisté M. Sellal, qui est déjà déçu par le plan de la nouvelle ville Ali Mendjeli de Constantine.
Où réside le problème? Est-ce dans le modèle, dans le plan lui-même ou dans la démarche d’élaboration technique?
A cette question, les experts en urbanisme que nous avons contactés sont unanimes. Pour eux, ces éléments sont liés les uns aux autres.
«Tout produit est le résultat d’un ‘‘process’’ de production et d’une certaine technologie. Aujourd’hui, l’élaboration technique des ensembles immobiliers se fait en Algérie de façon expéditive, à un point où les plans de centaines de logements sont approuvés par l’instance centrale compétente. Nous n’avons ni des compétences au niveau des BET, ni au niveau des administrations.»
Les raisons avancées par les mêmes sources sont implacables.
«Cela est dû à la politique de l’emploi. Il y a une précarisation de l’emploi des cadres et l’absence d’une politique de gestion des carrières. Dans les années 1970-80, pour élaborer une ZHUN de 1.000 logements et plus, on devait passer par trois phases d’approbation et une réelle démarche d’annonciation et d’argumentation du projet.
Aujourd’hui, à l’heure de la gouvernance, il suffit de présenter un permis de construire groupé ou un permis de lotir ou encore un master plan pour engager et mettre en chantier des milliers de logements, sans une réelle programmation et organisation réfléchie», se désolent-ils.
En effet, les conséquences sont visibles dans les catastrophes des localités de Boukhadra, Bouzaâroura et les exemples ne manquent pas à Annaba.
Au niveau du quartier 11 Décembre, la densité est plafonnée au sommet, jusqu’à étouffer les enfants aux pieds asphaltés et exigus des tours AADL, tandis que la mal-vie règne autour de ces activités informelles.
Pour ce faire, les experts s’appuient sur l’intervention des autorités locales pour cerner et contourner justement les failles relevées dans d’autres projets analogues à l’actif d’autres wilayas, comme la nouvelle ville Ali Mendjeli de Constantine, qui impactent négativement sur la vie même de la cité, de ses habitants et surtout de ses enfants.
Mohamed Fawzi Gaïdi
-
Votre commentaire
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Posté Le : 26/03/2013
Posté par : akarENVIRONNEMENT
Photographié par : Photo: El Watan ; texte: Mohamed Fawzi Gaïdi
Source : El Watan.com du mardi 26 mars 2013