Hommage au moudjahid Mohamed Cherif Ould Hocine Un combattant au long cours

Publié le 16.04.2024 dans le Quotidien l’Expression

Nous reproduisons de longs extraits d’un article écrit par Djoudi Attoumi où il décrit adroitement l’homme combatif qu’était le défunt.
La rencontre était empreinte de chaleur, de convivialité et d'émotion. Déjà, au fur et à mesure que les invités arrivaient, ils se congratulaient, laissant échapper des petites plaisanteries. C'étaient des anciens moudjahidine qui ne s'étaient pas revus depuis des lustres! Tous le monde était là: d'anciens compagnons d'armes de la Wilaya III et surtout de la wilaya IV, des anciennes moudjahidate, des intellectuels et même des jeunes. L'assistance était rehaussée par la présence d'illustres personnalités, tels le commandant Lakhdar Bouregaâ de la Wilaya IV, Mohamed Mechati du groupe des «22», Mustapha Cherchali, Benyoucef Mellouk l'éternel résistant...

Le Centre culturel de Chéraga était plein à craquer d'hommes, de femmes, de jeunes et surtout de moudjahidine et de moudjahidate qui avaient fait le déplacement dans un même but: témoigner d'une fraternité d'armes à Si Mohamed Cherif Ould Hocine, une amitié et un soutien sans réserve à ce compagnon demeuré fidèle aux traditions de notre glorieuse ALN et aux valeurs de notre Révolution.

Au service de la patrie

Ce couronnement est le résultat de cette vie de combat dans les maquis, dans la vie civile, de son action en faveur des démunis, de l'aide sous toutes ses formes à ceux qui l'ont approché, qu'ils soient de Hadjout, de Teniet El Had ou d'ailleurs. Les intervenants mirent en exergue les qualités de cet homme d'exception, de ce combattant de la première heure, son esprit de sacrifice et son courage dans les combats dont il en est sorti avec de graves blessures.

Après l'Indépendance, il s'est mis, sans jamais faillir, au service de son pays en occupant sa première noble fonction de consul général de la République algérienne à Genève. Puis ce fut son retour au pays en s'impliquant dans son développement. Et trente ans après, il continue à lutter pour la survie de son unité économique et le maintien de son personnel, sans pour autant se détourner de ses aides aux associations de jeunes, de sportifs, des enfants de chouhada, à la construction des mosquées. Sachant que ce bienfaiteur était gêné par de telles révélations, ils témoignèrent qu'il n'a jamais hésité un seul instant à donner, sans s'attendre en retour, d'une façon désintéressée, à l'image de ceux qui ont consacré leur vie à venir en aide aux autres, à ceux qui souffrent, aux démunis et à ceux qui, à un moment ou à un autre, se sont retrouvés dans la précarité. Notre ami Mohamed Cherif Ould Hocine est toujours là, disponible, à tendre une main généreuse à des gens en détresse.

L'autre facette de Si Mohamed Cherif fut abordée également par tous les intervenants: c'est son amour pour l'Algérie et son dévouement pour l'écriture de l'Histoire ou pour l'Histoire de la guerre de Libération tout court. Sa première action dans ce domaine fut le financement d'une stèle à la mémoire de son chef, le colonel M'hamed Bougara tombé à Ouled Bouachra le 5 mai 1959.

Infatigable et tenace, il publiera un excellent ouvrage intitulé «Au coeur du combat», puis deux autres ouvrages non moins importants comme «Afin que nul n'oublie» et «De la Résistance à la guerre d'indépendance algérienne de 1830 à 1962». Il s'agit en fait d'une trilogie où il retrace le combat des générations passées, son propre combat et enfin celui de ses anciens compagnons d'armes.

Les chouhada, il ne les oublie jamais. Il est parmi nous tous, anciens combattants de l'ALN, le plus fidèle au serment. En effet, qui parmi nous pourrait oublier un jour les dernières paroles de ces martyrs? «Prenez soin de l'Algérie!» Au moment de rendre leur dernier soupir, ils ne pensaient ni à leurs enfants, ni à leurs parents, mais uniquement à l'Algérie pour laquelle il fallait continuer à combattre, toujours combattre, jusqu'à l'indépendance ou la mort. Ce sera alors de la sorte que l'on a pu exhausser leur voeu. Dans la salle, des applaudissements et des youyous fusaient, interrompant les orateurs. Puis des jeunes ont tenu à venir témoigner de leur reconnaissance pour tout ce que faisait Mohamed Cherif Ould Hocine en leur faveur: aides aux associations sportives, distribution gratuite de dizaines de milliers de ses ouvrages à tous les établissements scolaires au niveau national, ainsi qu'à toutes les structures de l'ONM, des APC....

La tribune d'honneur lors de la rencontre

Alors, un des orateurs rétorqua que ce que fait Mohamed Cherif Ould Hocine à lui seul pour l'Histoire de la guerre de Libération dépasserait parfois certaines structures en charge du domaine. De toutes ces interventions se dégagent les qualités de l'homme en la personne de Mohamed Cherif Ould Hocine, sa bonté, sa fidélité aux idéaux de la Révolution et aux martyrs, son désintéressement sur tout ce qu'il entreprend, ce qu'il faisait d'ailleurs dans l'anonymat et dans la plus grande discrétion.

Le commandant Lakhdar Bouregaâ, un autre héros de la Wilaya IV, fut le dernier à intervenir pour mettre en relief à son tour les valeurs de cet homme humble et fidèle, de ce compagnon d'armes authentique, à ce mécène qui, depuis toujours, a toujours donné à ceux qui étaient dans le besoin, quels qu'ils soient et d'où qu'ils viennent. Il dit également ne pas comprendre comme nous tous d'ailleurs, l'acharnement contre lui, après l'avoir dépossédé d'une grande partie de son unité économique. Il rejoint les autres intervenants pour en faire appel à la plus haute autorité du pays afin de régler un contentieux vieux de plus de trente ans. Avant de clore cette rencontre, Si Mohamed Cherif fut invité à dire quelques mots à l'intention de ceux qui l'ont honoré et qui le portent dans leur coeur. Malgré une maladie invalidante, avec une voix entrecoupée par l'émotion, il remercia l'assistance, ses anciens compagnons d'armes, ses amis, le responsable de Machaâl Echahid pour tout l'honneur qui lui était fait en ce jour.
Debout, les présents sont alors en communion avec tant de souvenirs. Et chacun de nous aura une pensée à tous ceux qui sont tombés les armes à la main, à ceux qui sont tombés à ses côtés et dont les souvenirs resteront à jamais gravés dans notre mémoire. Et c'est dans cette ambiance fraternelle que prit fin cette rencontre.

Djoudi ATTOUMI