Tlemcen - Noureddine Benhamed

Noureddine Benhamed. Artiste peintre et cinéaste : Il faut provoquer de l’intérêt pour les arts visuels



Noureddine Benhamed. Artiste peintre et cinéaste : Il faut provoquer de l’intérêt pour les arts visuels
Il faut provoquer de l’intérêt pour les arts visuels. Noureddine Benhamed a deux passions : la peinture et le cinéma. Ce diplômé de l’Ecole des beaux-arts d’Oran a un petit espace, un atelier, à la maison de la culture Abdelkader Alloula de Tlemcen, où il peint comme il aime le faire.

Il passe avec aisance de l’expressionnisme abstrait à l’art pictural oriental. Il n’arrête pas de faire des recherches. La quête de l’esthétique parfaite est un souci majeur pour lui.

-Vous avez pris part au docu-fiction, Le destin d’un berger de Abdarahmane Benarous sur Abou Madiène Al Ghouth. Comment vous vous êtes adapté à ce rôle ?

J’ai interprété le rôle de Sidi Abou Madiène, jeune. Nous avons commencé le tournage en juillet 2011 à Bou Saâda et Al Mâadhid dans la région de M’sila. Avant cela, j’ai lu une partie de l’histoire de ce savant. Durant la période du tournage, j’ai essayé d’être spirituel. Je n’avais pas de texte à dire. C’était un avantage. Cela m’a facilité les choses ! C’est la deuxième fois que j’interprète un rôle. J’ai déjà joué dans le film documentaire de Saïd Mahdaoui, Tlemcen, repères et héritage. J’ai joué mon propre rôle, celui d’un artiste-peintre, à Tlemcen. Saïd m’a filmé dans mon atelier en train de peindre avec un groupe d’amis.

-Et c’est quoi être un artiste à Tlemcen ?

Nous essayons, un groupe d’amis et moi-même, de susciter une ambiance de création artistique, diffuser l’art, ce que nous connaissons. Je fais partie de l’Association La grande Maison, qui élabore chaque année un programme culturel («La grande maison» est le titre du premier roman de Mohamed Dib, paru en 1952, ndlr).

Pour cette année, nous avons programmé des pièces de théâtre. La pièce Au café, adaptée d’un texte de Dib, est la dernière production de l’association. Nous avons aussi un projet cinématographique sur Mohamed Dib, l’écrivain. Nous faisons des recherches actuellement. Nous avons déjà des archives inédites, des textes, des communications, des vidéos. Après l’écriture, nous entamerons toutes les démarches pour réaliser ce documentaire. Ici, à Tlemcen, les jeunes connaissent Dib comme écrivain, auteur. Mais son écriture est difficile d’accès. Il faut un certain niveau intellectuel pour lire ses livres et comprendre le fond de ses écrits.

-Une rue, un lycée, une bâtisse à Tlemcen porte-t-elle le nom de Mohamed Dib, l’enfant de la ville ?

Non ! J’avoue que je n’ai jamais pensé à cela.

-Vous venez de réaliser un documentaire sur un rituel particulier à la région de Tlemcen…

A la région de Beni Snouss précisément. Le documentaire revient sur un rituel, de la comedia dell’arte à la façon berbère. Cela remonte à l’époque de Chachnaq Ier (Shesshonk) parti de Tlemcen vers l’Egypte avec son armée sauver la dynastie des Pharaons (en 680 avant Jésus-christ, le roi berbère Shesshonk était parti sauver l’Egypte pharaonienne de l’époque nubienne d’une attaque venue d’Ethiopie, ndlr).

Aujourd’hui, on célèbre avec des jeux la victoire de Chachnaq. Les gens de déguisent avec des masques et font le porte-à-porte. Ce rituel n’existe encore que dans une partie du Beni Snouss. J’ai travaillé sur quatre villages. Dans deux d’entre eux, notamment à Oulad Moussa, le rituel est toujours présent. A El Khemis, le rituel a un peu changé. A Beni Achir et Tafsra, cette fête a disparu. J’ai, pour le besoin du documentaire, reconstitué le rituel comme il était célébré dans les temps anciens.

-Parallèlement, vous préparez un court métrage aussi…

Je suis en pleine réécriture. Dès que je termine, je dépose mon dossier au Centre national du cinéma et de l’audiovisuel (CNCA) et au Fonds de développement de l’art, de la technique et de l’industrie cinématographique (FDATIC) pour avoir un soutien financier (…). Les jeunes, malheureusement, ne connaissent pas le grand écran.

En 2009, nous avons tenté, ici à Tlemcen, l’expérience du ciné-club en invitant le public à des projections de films et de documentaires variés. Cela a marché au début, mais la présence du public devenait de plus en plus maigre. Je ne sais pas si cela était lié à notre programmation ou à la perte de culture de cinéma. Il me semble qu’il faut tout refaire. Ce travail va durer.

-Et pour la peinture, votre première passion, vous l’avez oubliée, laissée de côté, non ? !

Je viens de participer à une exposition collective à la faveur de la manifestation «Tlemcen, capitale de la culture islamique». Mais j’avoue que je me concentre beaucoup sur le cinéma. La peinture est, pour moi, un refuge. Je m’éclate dans les tableaux ! Cela dit, la peinture m’aide pour la préparation des plans pour les films que j’envisage de réaliser, les stories-board. J’ajoute parfois la vidéo à la peinture. Manière de passer de l’image fixe à l’image mouvante, vivante. Manière de faire «bouger» la peinture. Il y a des portraits, des images de rue.

Je fais parfois de la sculpture et des performances. J’essaye toujours de trouver de l’originalité, faire ce qui n’a pas encore été fait. Je n’aime pas exposer pour exposer. Je veux faire un travail de qualité. Il faut séparer entre le professionnel et l’amateur, avoir un minimum de respect pour l’art.

L’art pictural algérien n’évolue pas comme il devrait être. Nous avons des artistes peintres de qualité qui ne sont pas valorisés. Nous avons tout ce qu’il faut pour peindre, créer des ateliers… Nous avons de la lumière qu’on ne trouvera pas ailleurs. Il y a un public à conquérir. L’artiste aime être vu, lu, entendu… Je parle de tous les arts. Il faut aller vers un marché de l’art, provoquer de nouveaux réflexes, de l’intérêt pour les arts visuels.



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