Tlemcen - 01- Généralités


Production écrite :
TELEMÇAN (Tlemcen) est une grande ville, entourée de murs et située au pied d'une montagne, dont les bois sont d'essence de noyer; elle a cinq portes, dont trois regardent le midi, savoir : la porte du Bain (Bab el-khoukha). La porte d'El-Aqaba « la montée ». regarde l'Orient, et celle d'Abou Qorra, l'Occident. On y trouve les ruines de plusieurs monuments anciens et les restes d'une population chrétienne qui s'est conser­vée jusqu'à nos jours. Il y a aussi une église, qui est encore fréquentée par les chrétiens. Dans ces i urnes, on découvre souvent des trésors cachés. Les anciens avaient amené à Tlemcen l'eau de plusieurs sources appelées Lourît, qui sont situées à six milles de distance.

Tlemcen, capitale du Maghreb central, possède des bazars, des mosquées, un djamâ, des plantations d'arbres, et des ruisseaux qui font tourner plusieurs moulins et qui forment la rivière Safsaf. Siège de l'empire zénatien (1), rendez-vous des tribus berbères, Tlemcen est aussi un point de réunion pour les marchands de tous les pays. Mohammed, fils de Soleiman ibn cAbd Allah ibn Hacen ibn Ali ibn Abi Taleb (descendant du Prophète), se fixa dans cette ville. Son petit-fils, Abou-1-Aïch Isa, fils d’Idriss, fils de Mohamed ibn Soleiman, bâtit Djeraoua (2), ville dont il resta le seigneur et dans laquelle il mourut. Tlemcen n'a jamais cessé d'être la demeure des hommes savants dans la loi et dans les traditions, des jurisconsultes connaissant par cœur les décisions légales fondées sur l'analogie et conformes au système de doctrine enseignée par Malek ibn Anes.

La Qalaâ (ou château) d'Ibn el-Djahel, située au midi de Tlemcen, est une place forte, entourée d'arbres et de ruisseaux; elle touche à la montagne de Tarni (Tîrni) localité bien peuplée, ainsi que toutes les montagnes qui s'étendent de là jusqu'à Tîzîl quand on veut se rendre à Sidjilmassa, à Ouarglan (Ouargla) et à El Qalaa (El-Guel'ïa), ville fort peuplée, qui renferme une mosquée et les restes de quelques monuments antiques.

Au nord (lisez au sud) de Tlemcen est un lieu de halte appelé Bab el-Qsar (la porte du château), qui est dominé par la montagne appelée Ras El-Bghel « la tête du mulet ». La rivière Stafsîf, qui sort du pied de cette montagne, va se décharger dans un vaste réservoir de construction antique, où elle se précipite avec un fracas qui s'entend de très loin. Un conduit, fait avec art, amène ces eaux jusqu'au lieu nommé El-Mihmaz « l'éperon », puis à Oueldj el-Hana, puis à Djenan el Hadj « le jardin du pèlerin », d'où elles vont se jeter dans la rivière Isser. Celle-ci verse ses eaux dans la Tafna, fleuve qui va passer par Arechgoul et va se jeter dans la mer, auprès de cette ville. Arechgoul est le port de Tlemcen. Entre ces deux localités est une plaine appelée Zîdour, dont la longueur est de vingt-cinq milles. La Tafna, rivière sur laquelle est située Arechgoul, vient du midi et contourne la partie orientale de la ville ; elle reçoit de petits navires, qui la remontent depuis la mer jusqu'à la ville, l'espace de deux milles; elle possède un beau djamâa de sept nefs, dans la cour duquel sont une grande citerne et un minaret solidement bâti ; elle renferme aussi deux bains, dont un est de construction antique. Le Bab el-Fotouh, « la porte des victoires », une de ses portes, regarde l'occident ; le Bab el-Emîr est tourné vers le midi, et le Bab Mernîsa, vers l'orient. Toutes ces portes sont cintrées et percées de soupiraux. L'épaisseur de la muraille est de huit empans ; le côté qui regarde le nord est celui qui pourrait offrir le plus de résistance à un ennemi. Dans l'intérieur se trouvent plusieurs puits de bonne eau qui ne tarissent jamais et qui suffisent à la consommation des habitants et de leurs bestiaux. Au sud de la ville est un faubourg.

La mesure de capacité dont on se sert à Arechgoul se nomme amoura et contient soixante modd de la dimension autorisée par le Prophète. Le rtel « la livre » est de vingt-deux aoukïa « onces » ; la drachme, de huit kharrouba, et le kharrouba de quatre grains (habba).

Cette ville était habitée par des négociants quand Isa, fils de Mohammed ibn Soleiman, prince dont nous avons déjà parlé (1) vint s'y installer et prendre le commandement. Il y mourut en l'an 295 (907-908 de I. C.). Son fils Ibrahim ibn el-Arechgouli naquit dans Arechgoul ; Yahia, fils et successeur d'Ibrahim, fut mis en prison, l'an 323 (935 de I. C.). par Abou cAbd Allah ech-Chîaï.

Dans la mer, vis-à-vis de la ville, est une île appelée Djezîra-t Arechgoul « l'île d'Arechgoul ». Elle est si peu éloignée du continent qu'un homme dont la voix est forte peut se faire entendre d'un bord à l'autre, quand la mer est calme. Cette île s'étend en longueur du sud au nord, et s'élève à une grande hauteur.

Hacen, fils d’Isa ibn Abi '1-Aïch et seigneur de Djeraoua se réfugia dans Arechgoul quand Mousa, fils d'Abou'I-cAfiya (2) lui enleva ses autres possessions. Mousa écrivit alors à Abd er-Rahman ibn Mohammed, souverain de l'Espagne, et le pria de lui fournir des secours et de faciliter ainsi la prise (de l'île). Abd el-Malek ibn Abi Hammama appuya cette demande auprès de Mousa ibn Mohammed ibn Djodeir (3). Il en résulta qu’Abd erRahman envoya aux habitants de Bedjana (Pechîna d'Alméria) et d'autres lieux de la côte l'ordre d'équiper quinze navires de guerre, et il y fit embarquer des troupes, des armes, des munitions et de l'argent. Cette flotte alla bloquer l'île d'Arechgoul. On tua un grand nombre de ceux qui s'étaient réfugiés dans l'île et l'on serra les autres si étroitement qu'ils faillirent mourir de soif, après avoir épuisé l'eau de leurs citernes. Dieu leur vint alors en aide et leur envoya une pluie abondante. Les gens de la flotte, ayant reconnu que les assiégés avaient renouvelé leur approvisionnement d'eau, perdirent l'espoir de les soumettre, et remirent à la voile afin de rentrer chez eux. Ils rentrèrent a Alméria au mois de ramadan 320 (septembre-octobre 932 de J. C.). Quelque temps après, El-Bouri, fils de Mousa ibn Abi l Afiya se saisit d'El-Hasen ibn Isa, le même qui s'était réfugié dans Arechgoul; puis, en l'an 338 (949-950), il l'envoya prisonnier à Abd er-Rahman ibn Mohammed.









(1) Les Béni Yala, famille zenatienne, régnèrent à Tlemcen depuis l’an 393 (1002 de J. C.), jusqu'à la conquête de cette ville par les Almoravides, sous les ordres de Yousef ibn Tachefîn. Cet événement eut lieu l'an 473 (1080-1). (Voir Hist. des Berbères, t. III, p. 270).
(2) Ville située sur la rivière Kis, à six milles de la mer, et à dix milles sud-est de l'embouchure de la Molouiya.
(3) Voy. p. 136 (P. 1 de ce texte).
(4) Hist. des Berbères, t. I, p. 268; t. II, p. 570.
(5) Ibn-Djcdeir était alors hadjeb, ou premier ministre, du souverain oméiyade espagnol, Abd er-Rahman en-Naser. (El-Maqqari, traduction de M. de Gayangos,, vol. II; Notices et Extraits, par M. Dozy, p. 123).


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Maria♥ - alger, Algérie

19/05/2015 - 258320

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