«Un auteur compositeur s’inspire d’abord et surtout de sa propre vie.»
Agé de 52 ans, Ouazib Mohand Améziane paraît toujours jeune. C’est un artiste qui a marqué plusieurs générations. Cette semaine, il rebondit avec un nouvel album de dix chansons, où plusieurs thèmes sont abordés. L’amour se taille la part du lion dans cette nouveauté. Dans cet entretien, Ouazib parle de son nouvel album et de ses inspirations.
L’Expression: Vous venez d’éditer un nouvel album, pouvez-vous nous en parler?
Ouazib Mohand Améziane: C’est un album qui contient dix chansons. Elles sont toutes nouvelles. Il n’y a pas de reprises. Dieu merci, j’ai de l’inspiration et tant qu’il y a de l’inspiration, on ne peut pas refaire les anciennes chansons. Dans notre pays, avec tout ce que nous vivons, l’inspiration ne peut pas manquer.
Quels sont les sujets que vous abordez dans cette nouveauté?
Je parle toujours de la fraternité, de l’amour, l’amour de la patrie, l’union, la solidarité...J’ai de tout temps rendu hommage aux femmes.
La chanson phare de ce nouveau produit est ainsi un hommage à la femme. J’ai essayé de l’évoquer à ma manière et selon mes connaissances.
D’ailleurs, cet album est intitulé A tulawin (O! femmes).
Pourquoi privilégiez-vous le thème de la femme dans cet album?
J’ai constaté que la majorité des artistes, quand ils sont jeunes, chantent sur la femme, sur son amour et sur les sentiments envers la femme en général. Mais à partir d’un certain âge, ils abandonnent la chanson sentimentale comme si cette dernière les dévaloriserait. Alors que c’est faux! Depuis plusieurs années, je voulais préparer un hommage spécial aux femmes et dire que tant que je pourrais chanter, je ne cesserai de parler du courage des femmes, de leur combat quotidien pour la vie et pour la dignité.
Les dix chansons qui forment votre nouvel album ont-elles été composées durant ces deux dernières années ou bien certaines d’entre elles sont d’anciennes compositions que vous avez remis au goût du jour?
Personnellement, je respecte beaucoup la chanson à texte. Donc, afin de composer ce genre de chansons, il faudrait s’accorder le temps nécessaire. J’ai composé ces chansons au gré de mon inspiration. Certaines ont été écrites il y a une dizaine d’années. Puis, je les ai peaufinées petit à petit. Quand je n’ai plus d’inspiration, je ne m’efforce pas. J’attends le temps qu’il faut puis je reprends.
Ces derniers temps, le public qui écoute les chansons à texte s’est rétréci. Avez-vous des difficultés pour éditer votre album?
Il y a les éditions «Amazigh» de M’chedallah (Bouira) que je remercie infiniment car elles ne cessent de m’encourager et de me donner de la force pour continuer à aller de l’avant. Cet éditeur fournit de gros efforts et a consenti des sacrifices pour que la chanson à texte continue d’exister. Il lui arrive même de perdre de l’argent pour réaliser cet objectif noble qu’est la conservation de la chanson thématique qui apporte un grand plus à notre culture kabyle qui est toujours de tradition orale. C’est un éditeur qui fait ce travail avec conviction et par principe pour que ne disparaisse pas ce genre musical.
Quels sont les autres problèmes auxquels fait face la chanson à texte ces derniers temps?
L’absence de médiatisation et de publicité.
Il faut toutefois avouer que la chanson thématique n’est pas à la portée de tous. Les jeunes par exemple, préféreraient écouter des chansons rythmées avec des paroles légères. C’est un peu naturel, non?
J’insiste toutefois qu’en Algérie, la chanson à texte, en général, n’est pas soutenue par les médias. Certains médias préfèrent aider la chansonnette, la chanson médiocre et la chanson qui ridiculise l’art plutôt que la chanson qui aide l’esprit à avancer. Pour revenir à votre question, je dirais que c’est normal, si on n’éduque pas toute une génération qui pourrait apprécier la chanson thématique, on aboutit irrévocablement à ce résultat désastreux. Ceci dit, le public qui écoute la chanson poétique existe, mais on ne lui donne pas l’occasion de découvrir ce qui se fait de nouveau.
Vos chansons sont-elles autobiographiques?
L’artiste qui vous dirait qu’il ne chante pas sur sa vie, voile la vérité. Un interprète peut chanter sur n’importe quelle situation, même s’il ne l’a pas ressentie. Mais un auteur compositeur s’inspire d’abord et surtout de sa propre vie. Personnellement, j’ai vécu beaucoup de moments difficiles dans ma vie. Il m’est arrivé de pleurer. Une grande partie de mon inspiration, je la dois à ces moments-là. Par exemple, la chanson Ferfer a yitbir me touche énormément et elle provient de ce que j’ai vécu. C’est le cas aussi de Wahmegh atemma. Dans notre société, en général, nous partageons souvent les mêmes peines. En revanche, il y a d’autres sujets, par exemple, ceux inhérents à la chanson sentimentale, qui ne touchent pas tout le monde.
Posté Le : 11/09/2011
Posté par : musiquealgerie
Source : berberes.com