Le vent est un phénomène qui est observé, mesuré et étudié partout à travers le monde depuis la plus haute antiquité, que ce soit pour les orientations des constructions et les besoins de l’urbanisme, comme pour la navigation fluviale, maritime ou aérienne, le pompage de l’eau, la production d’électricité, la protection des sols contre l’érosion, la prévision du temps et la prévention des risques de catastrophes.
 L’énergie du vent provient à l’origine du soleil. Le flux de rayonnement issu de l’astre échauffe inégalement les masses d’air de l’atmosphère, provoquant ainsi des mouvements de circulation entre zones de températures et, par suite, de pression différentes. Environ 2% de l’énergie solaire parvenant sur la terre est transformée en énergie cinétique des vents atmosphériques; 35% de cette dernière est dissipée dans une couche atmosphérique d’un kilomètre d’épaisseur seulement au-dessus du sol. Pour l’ensemble de la planète, on estime que le potentiel d’énergie éolienne pratiquement disponible est de l’ordre de 1,3x1011 kW.
 Cependant, cette énergie n’est pas uniformément répartie à travers le globe et disponible dans le temps. Comme pour toute source d’énergie, l’estimation et l’évaluation du potentiel énergétique éolien est un préalable avant toute utilisation et investissement. La connaissance fine de la vitesse du vent à différentes hauteurs, ses variations horaires, journalières, saisonnières, la fréquence des distributions, la connaissance des directions prévalentes, de la température, de la pression atmosphérique et de l’humidité sont indispensables pour le choix des sites spécifiques des installations et leur dimensionnement.
 Les seules données disponibles sont celles mesurées et collectées par les stations météorologiques de l’ONM qui sont généralement localisées dans les aéroports et servent essentiellement à la navigation aérienne. Les séries de mesures sur une longue période ne sont pas toujours disponibles et souvent sans grande fiabilité.
 Au vu des études et recherches réalisées ces 20 dernières années par différents auteurs algériens (1)-(5), la production d’électricité à grande échelle par énergie éolienne semble exclue dans l’immédiat. Par contre, à petite échelle, comme source autonome destinée aux petites communautés, aux transmissions, aux populations isolées pour lesquelles la connexion au réseau électrique serait d’un coût prohibitif, elle est possible, particulièrement si elle est couplée à un système hybride (solaire ou diesel) en cas de défaillance ou de longues périodes de vent calme.
 Il est par conséquent étonnant que l’AND (Autorité nationale désignée), sous couvert du label du développement propre, veuille installer un parc éolien de 6 MW dans un site saharien... à Tindouf, sous l’égide et le concours de sociétés étrangères et de la Banque mondiale sans avoir procédé au préalable à une étude de faisabilité avec le concours de spécialistes et experts algériens. Cela se serait traduit par une campagne de mesures fines, avec l’instrumentation appropriée, de la vitesse et la direction du vent, de l’humidité, de la température et de la pression à différents paliers sur au moins 50 m, durant une période minimale d’une année, en espérant qu’elle soit exceptionnelle. Il aurait fallu aussi tester sur une longue période, avec la participation active et effective de différents spécialistes algériens sur le site choisi, le prototype d’aérogénérateur proposé aux Algériens, pour connaître ses performances et ses défauts, avant de se hasarder à vouloir acquérir et installer un parc d’aérogénérateurs. Le cimetière d’aérogénérateurs de Paolo Alto (Californie) en est une belle illustration. L’expérience technologique espagnole (le constructeur Gamesa) est aussi à méditer.
 Il faut souligner quelques spécificités fondamentales de ce «parc» éolien qu’on se propose d’ériger à Tindouf.
1. Situation géographique et propriété climatique du lieu choisi
 Extrême Ouest algérien, zone frontalière; climat saharien caractérisé par:
 - Un gradient de température d’une grande amplitude qui va fluctuer selon l’heure du jour et les saisons. Ceci va accélérer le phénomène de fatigue et de vieillissement des pales (contrairement à ce qui se passe le long de l’Atlantique ou de la mer du Nord).
 - Les vents de sable vont éroder les pales et pénétrer dans les différents engrenages. Leur dépôt sur les pales va les alourdir et modifier leur aérodynamique et donc diminuer leur vitesse de rotation (rendement) et réduire leur durée de vie. Elles n’ont d’ailleurs pas été conçues pour une telle région géographique et un tel climat.
2. Coûts induits: quel est le prix de revient du kWh ?
 L’objectif d’un parc éolien est de maximiser la production d’électricité, tout en minimisant le coût des infrastructures de fonctionnement et de maintenance, ainsi que l’impact socio-environnemental. Se posent alors quatre questions:
* Quel choix judicieux des fixations et des fondations des supports des pylônes en milieu saharien ?
* Y a-t-il existence de voies d’accès et infrastructure électrique pour le transport du courant et sa connexion au réseau ?
* Qui va assurer le suivi régulier, le contrôle, le monitoring et la maintenance ?
* Quel rôle réservé aux Algériens ?
3. Particularités
 Un parc éolien fera face à de nombreux problèmes:
* L’output d’un parc éolien selon le temps (conditions météo).
* Le parc éolien est généralement localisé à l’extrémité du réseau de distribution électrique.
* Les caractéristiques techniques de génération électrique par le vent sont différentes de celles des centrales électriques classiques autour desquelles les systèmes existants ont évolué.
4. Certification
- Quelles sont les restrictions ?
- Les conditions spécifiques du site ?
- Le design ?
- Les garanties ?
- Le mode d’emploi ?
5. Les ressources humaines
 La participation d’équipes interdisciplinaires d’experts algériens ainsi que la formation, le recyclage du personnel scientifique et technique dans le domaine éolien chez le fabricant doivent être un préalable pour toute coopération, afin d’éviter toute dépendance et servir de banc d’essai ou de débarras d’équipements dont la fiabilité en milieu saharien n’a point encore été prouvée.
 Comparée aux pays européens, l’Algérie a un faible potentiel éolien mais un immense marché.
Références :
1. H.Bensaad. Perspectives d’utilisation de l’énergie éolienne en Algérie. Révolution Africaine, n° 1089, pp 32-34, 1985.
2. H.Bensaad. The Algerian programm on wind energy, 7th BWEA, Oxford University, 1985.
3. H.Bensaad. Wind speed and wind energy potential in Algeria. 1er Séminaire international sur l’utilisation de l’énergie éolienne dans le monde arabe. Alger, avril 1988.
4. R.Hamouche. Atlas vents de l’Algérie. ONM/OPU, Alger 1990.
5. Kasbadji Merzouk N. An Evaluation of wind energy potential in Algeria. EWEC’ 94 Congress, Thessalonica, Greece, 1994.
Posté Le : 06/12/2006
Posté par : hichem
Ecrit par : Par Hocine Bensaad
Source : www.quotidien-oran.com