Frenda petit village, nid de verdure sur les hauts Plateaux, juste aux portes du désert, était à 1 10 kms de Mascara qui offrait une étape reposante, vers Oran distante de 220 kms. Tiaret à 50 kms à l'est, recevait souvent la visite des frendéens, pour les courses importantes.
Frenda petit village, nid de verdure sur les hauts Plateaux, juste aux portes du désert, était à 110 kms de Mascara qui offrait une étape reposante, vers Oran distante de 220 kms. Tiaret à 50 kms à l'est, recevait souvent la visite des frendéens, pour les courses importantes.
Commune mixte, elle était composée de nombreux douars : les Ghronadis, Haouaret, Medroussa.
UN AGHA SAUVE LE VILLAGE
Frendah, nom berbère signifiant doux repos, existait depuis la nuit des temps. Une famille y régnait, les Ould Kadi.
L'arrivée des français se fit en douceur. L'Agha Ould Kadi collabora sans problème. Le génie militaire construisit des remparts qui auraient pu soutenir un siège.
Les "Bou Amama" attaquèrent la région en 1881. Ils arrivèrent dans la plaine, menaçants. Maître incontesté du pays, l'Agha Ali Ould Kadi, avisé du danger menaçant son havre
de paix, envoya au marabout Bou Amama, comme rançon de la ville, un émissaire chargé de plusieurs boisseaux de pièces d'or. Cupide autant que cruel, le bout accepta et fit demi-tour, sans toucher à Frenda ni à ses habitants.
L'Agha Ali Ould Kadi était un Arabe de haute taille. Dans son visage bruni par le soleil, souriaient deux grands yeux doux. Drapé dans son large burnous blanc, il avait une extraordinaire majesté. La France avait donné à certaines grandes familles musulmanes des pouvoirs importants, afin de mieux assurer le gouvernement de ces vastes territoires. L'Agha Ali Ould Kadi n'avait nul besoin de ces pouvoirs, la région toute entière lui appartenait et son coeur de musulman appartenait à la France. Toute sa famille suivait son exemple. Son neveu, le colonel Ben Daoud, lui aussi, prouvait son attachement à la France, en aidant de son mieux l'Armée Française dans son oeuvre de colonisation. Ce grand amour pour la France, l'Agha Ould Kadi le reportait sur les "Roumis" qui : s'intallaient à Frenda. Il les accueillait tous sans exception et leur apportait une précieuse aide.
Parmi ces premières familles, citons les Portet, Duigne qui montèrent des commerces et cultures et les Rosa, famille de maçons.
A leur suite, de nombreuses familles venues du bassin méditerranéen s'installèrent poursuivant le développement du village.
L'éloignement n'empêchait pas le coeur de l'Algérie de battre à l'unisson de celui de la France. Les populations se sentaient très près de leur Mère Patrie et tout naturellement leur destin suivait celui de la France. Les émeutes du "Midi viticole" de 1907 touchèrent aussi l'Algérie, qui ne pouvait plus vendre le vin qu'elle commençait à peine à produire. Cependant les villages s'étendaient et les villes se développaient rapidement.
Dans le sud, même si la vie y était différente, elle s'organisait petit à petit. Les habitants cherchaient à créer leur
univers en fonction de leurs possibilités et de leur caractère.
A Frenda, le coeur du village s'était déplacé vers le haut et de nouveaux commerces s'installaient.
La famille Benguigui avait un petit magasin que les Arabes appelaient "Ghanout", dans la rue Ain Kebir C'était une large rue sinueuse, descendant vers le "Cano Gordo" par de larges marches de pierre. De chaque côté se dressaient de belles et grandes maisons, presque toutes à étages, dont les portes
étaient surmontées de corniches travaillées, soutenues par d'élégantes colonnes. Devant certaines, des bancs de pierre taillée invitaient au repos et au farniente. Des fontaines de fonte
verte laissaient couler une eau fraîche et limpide que les ménagères venaient journellement recueillir dans de grands bidons de zinc. Tout autour, les enfants riant et se bousculant pataugeaient, faisant jaillir dans la lumière du soleil des milliers de gouttelettes de toutes les couleurs en aspergeant parfois les passants mécontents.
En haut de la "côte des Kabyles" qui longe tout un côté du jardin public, M. Serrano avait ouvert sa cordonnerie. C'était un cordonnier un peu particulier, qui se consacrait surtout à de nombreuses découvertes. La photographie
le passionnait et avec des moyens rudimentaires,il avait confectionné un appareil avec lequel il photographiait les Frendéens. Par amour de l'art et non par but lucratif, chacun avait son portrait un peu flou imprimé sur un papier jaunâtre, faisant l'admiration de son créateur.
Les Frendéens firent leur devoir en 1914 admirablement et survint la 2è guerre mondiale.
FRENDA, DANS LA GUERRE
En septembre 1939, tout ce que Frenda comptait d'hommes jeunes et valides, dans les trois communautés, répondaient, encore une fois à l'appel de leur "Mère Patrie". Sans distinction de races ou de religions, ils partaient vers l'inconnu, laissant le village vide de toute substance active.
Au cours de cette année là, comme en France, la vie tourna au ralenti.
Un moment destabilisées par le départ de leurs maris, leurs pères ou leurs frères, les femmes prenaient les affaires en mains, afin de maintenir un semblant de dynamisme.
Dans le village même, les écoles après une brève période de flottement, ne souffrirent pas trop de cette mobilisation, puisque quelques maîtresses remplacèrent rapidement, les maîtres absents à l'école des garçons. Selon la tradition les maîtresses s'occupaient toujours de l'école des filles et les maîtres de l'école des garçons.
Tandis que dans le village on s'organisait petit à petit, dans la plaine pour les colons en pleine effervescence des futurs labours,ceux restés au pays aidaient les épouses des mobilisés.
A Alger situé à 500 kms, résidait le Docteur Paul Lebon, professeur à la faculté de Médecine et qui était également Maire de Frenda. Vu l'éloignement c'était son adjoint : Mr Puccineli qui tenait les rénes de la commune.
Mr. Tomi en était le secrétaire remplaçant Mr Ferise en retraite depuis 1938.
Frenda était essentiellement agricole céréales surtout blé dur, vignobles, mais aussi élevage de porcs ou de moutons. Ainsi le village se suffisait à lui même. Le jeudi jour de marché, où les paysans vendaient leurs produits, voyait un afflux de population tant européenne qu'arabe, venant de Dominique Luciani, Martimprey. Ain-Kermes, Medrissa et aussi des douars environnants. Le marché aux bestiaux y tenait une place très importante.
II n'y avait qu'une seule pharmacie cédée par Mr Jaudon en retraite, à Madame Brousset.
Un seul médecin : Mr Soummeire, avec comme aide infirmier Benaoucha que les enfants craignaient beaucoup pour sa sévérité tant il prenait son rôle au sérieux.
Deux banques : la Compagnie Algérienne dirigée par Mr Polidori et le Crédit Foncier par Mr Irissou succédant à Mr lllouz.
Une belle poste moderne dont Mr Cervera en était le Receveur, avec Gabrielle Ortega comme Contrôleur assurant par intérim les fonctions de Receveur.
Le commandant de la brigade de Gendarmerie : Mr Lefebvre, assurait la sécurité d'un territoire très
étendu englobant Frenda et sa commune Mixte. Par contre les cafés florissaient : Mr March "Brasserie des Trembles", Pepico Ramos faisant également hôtel, Mme Isly-David, Mr Maklouf Teboul dit "Modo", Mr Sardania, Mr Benchimol et au bas du village celui de Désiré Benayoun.
Pépico Ramos s'occupait également comme président du football, qui tenait une grande place dans la vie frendéenne. La petite équipe était composée de Pierre Calderara, Mehnen et bien d'autres avec pour gardien de but Michel Furer.
La chasse avait aussi beaucoup d'adeptes : les Cassan, Lamer, Salado, Santaella, Calderara. Ainsi que le jeu de boules, " A la lyonnaise", réunissait les jeunes et les moins jeunes très souvent dans la semaine, pour des parties interminables avec : Henri Sudria, François Ruiz, Jules Lopez, Mr Deleine.
Pour satisfaire les maîtresses de maison, il y avait les épiceries bien achalandées de Moise Benguigui, des Frères Medioni et les raghamouts de Mahi et de Djimili au comptoir
recouvert de différentes pièces de monnaie, clouées à même le
bois usé par les mains des clients. Aaron Teboul quant à
lui tenait le "Gagne Petit" où l'on trouvait tout le nécessaire, de la bobine de fil au tissu au mètre en passant par le linge de maison et la layette.
Dans les boucherie de Jules Benguigui, de Hamoun et de Ghenio, de beaux morceaux de viande, protégés des mouches bourdonnantes, par un linge blanc et fin, attendaient l'acheteur.
A la fin de la classe, les écoliers bruyamment se précipitaient chez Mr Grazieti ou chez Mme Mazoyer acheter des bonbons multicolores bien tentants dans leurs bocaux de verre.
Les trois communautés peuplant Frenda, dirigées cha
cune par l'abbé Rivière pour les catholiques, Mr Atias pour les israélites et un imam pour les musulmans, vivaient en parfaite entente.
Après la guerre, lorsque tous les mobilisés et les prisonniers rejoignirent leurs foyers,Frenda subit de grands changements. Mr Grazieti fermait sa boutique et avec son fils Raoul ils partaient à Oran. Melle Marie installée prés de l'école des garçons remplaçait Mme Mazoyer.D'autres magasins venaient grossir les rangs des commerçants et artisans.Marcel Medioni ouvrait une mercerie -bonneterie. Pour les garages, outre celui de Joseph Cara, d'Émile Button, de Gaston Button, d'autres ateliers s'ouvraient.
Dans les sports, Henri Tomi revenant de la guerre formait
une équipe de basket.
Certains cafés changeaient de propriétaires, Mr Guy remplacait Mme David. Mme et Mr Devaux succédaient à Mr et Mme Sardania.
Frenda reprenait vie et une ère de prospérité commençait avec la construction d'une belle place pour des bals très renommés dans toute la région. Avec son kiosque à musique surplombant la piste de danse et son jardin fleuri, elle avait grande allure. Au cours d'une cérémonie réunissant toute la population, elle fut baptisée "Place Paul Lebon" du nom de l'ancien maire.
Depuis les dernières élections municipales, Mr Laffite menait la commune de Frenda agrandie des hameaux de Sbiba et de Taghazout. Pendant plusieurs années, se turent donc Charles Laffite et son adjoint Prosper Teboul qui gérèrent la vie du village.
La maison du colon et sa semoulerie ultra moderne voyaient le jour, avec à sa tête Emmanuel Ortega.
Derrière l'école des garçons s'élevait le cours complémentaire. En bas de Frenda l'école des tapis entièrement reconstruite prenait le nom "d' Ecole Ménagère" et y accueillait de nombreuses élèves. Les garçons eux, allaient à l'école professionnelle qui avait pris place dans l'ancien marché couvert et était dirigée par Georges Sune.
L'abbé Berenguer remplaçait l'abbé Rivière et créait les "scouts de France", aidé très efficacement par Mme Isacowitch.
L'abbé Germain lui succéda en 1950 et sous son influence la vie des catholiques changea quelque peu. Il organisait des fêtes et des pièces de théâtre, jouées par la jeunesse dans une belle salle paroissiale. Salle construite, grâce à la participation de tout le village, par plusieurs maçons, en autre Rosa, Matteo, Limer.
Frenda allait de l'avant !...
Charlot Couzinet rénovait son cinéma, où passaient deux fois par semaine des films que l'on disait récents.
Quant les évènements de la "Toussaint Rouge" le 1er novembre 1954, éclatèrent dans les Aures, à la Gendarmerie de Cassaigne et à la maison forestière de la mare d'Eau, quand une poignée d'hommes ensanglantèrent l'Algérie, Frenda se croyait à l'abri de ces horreurs.
Jusque là, Frenda portait bien son nom : "Doux Repos".
Pourtant l'on ne se méfiait pas assez et la famille de l'Agha Ould Kadi, peu à peu au cours des années avait perdu sa puissance et son emprise sur le monde arabe.
Les Katiba (Compagnie) se multiplièrent, leurs exactions et leurs crimes aussi. La rebellion arriva aux portes de ce petit village si tranquille. Les attentats à la grenade et les attaques de fermes par des meutes hurlantes, déferlèrent sur Frenda et ses alentours.
Ce fut dans ce contexte, qu'aux nouvelles élections Charles Laffite, était battu par Emmanuel Ortega devenant ainsi le nouveau maire.
A partir de 1956, les fermes les unes après les autres brûlaient sans que les militaires cantonnés à la caserne et dans certains douars, ne puissent intervenir à temps pour empêcher le massacre des animaux et souvent même des fermiers.
En juin 1957, la population en émoi, après une terrible fusillade dans les rues, découvrait avec horreur que Frenda payait à son tour un lourd tribu, à ce que l'on ne voulait pas se résoudre à appeler une guerre et qui pourtant en était bien une.
En 1958 Tiaret passant préfecture, Frenda de Commune Mixte devenait sous préfecture. Mr Azais quittait son poste d'administrateur et Mr Bourgeois s'installait comme Sous Préfet.
Malgré tous ces évènements en Algérie, le gouvernement ne cessait nullement les constructions de routes, d'écoles et de bâtiments administratifs. Frenda bénéficiait de ces largesses en édifiant de nouvelles écoles, une nouvelle justice de paix et une importante caserne de Gendarmerie, les contributions, la piscine, un nouveau stade.
Pepico Ramos rénovait son hôtel qui devenait un superbe bâtiment "le Ramos".
L'hôpital se transformait sous l'influence de Mme Martinez, qui depuis 1948 en était l'infirmière en chef.
De nouvelles stations services ouvraient à l'angle de la route de Mascara et de Prévot Paradol celle de Joseph Cara. Tout en haut sur la route de Tiaret, celle de Georges et Paul Benguigui. Prés du "Ramos", celle de Charles Cousinet un peu plus loin, celle d'Albert Andra. Avec un immense espoir, très vite déçu, le village participait à la mise en place du Général De Gaulle. Hélas !... comme tous "les Pieds-Noirs" il se rendit très vite compte que trompé, c'était pour son malheur.
En 1962, il fallut, la mort dans l'âme abandonner tout ce qu'ils avaient bâti au cours des années : maisons, propriétés, ateliers, commerces, mairie, église, cimetière qu'ils laissaient entre des mains profanes. Ce que ce peuple avait de plus cher
leurs défunts qui reposaient dans le petit cimetière entouré de cyprés tout en haut de Frenda.
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
Khoukha Khadouj
09/09/2014 - 212315
tres interesent,
Ali Kacem Kacem
09/09/2014 - 212314
merci pour l articl exelent vive frenda
soulef14 - etudiante - tiaret, Algérie
10/09/2012 - 39861
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Posté Le : 19/05/2008
Posté par : y-boudghene
Ecrit par : J.L.P.
Source : http://www.alger-roi.net