Skikda - Patrimoine Architectural et Immobilier

Un lieu, une histoire. la piscine olympique de Ben m' hidi (ex- Jeanne d’Arc): Une belle tranche de vie des Skikdis



Un lieu, une histoire. la piscine olympique de Ben m' hidi (ex- Jeanne d’Arc):  Une belle tranche de vie des Skikdis




Aujourd’hui, on passe devant la piscine de Ben Mhidi, ex-Jeanne d’Arc, sans avoir le courage, ni l’envie de la regarder. Il est vrai que les effets du temps et de l’insouciance ont fini par transformer ces lieux en de bien tristes ruines.

Pourtant, dans les eaux de ce bassin, aujourd’hui totalement abandonné, et converti en un immense dépotoir, tant de champions se sont baignés, tant de talents se sont éclos et tant de rencontres se sont faites et défaites. Cette piscine n’est pas seulement cette façade en décrépitude qu’on voit aujourd’hui.

C’est une longue et belle tranche de la vie des skikdis. Voici son histoire. La piscine fait partie d’un ensemble de grandes œuvres architecturales initiées, au courant des années 1930, par Paul Cuttoli, maire de Skikda, l’ancienne Philippeville. C’était une merveille, vu qu’elle représentait déjà l’une des plus belles d’Afrique en plus du fait qu’elle était l’une des rares à utiliser l’eau de mer.

L’unique piscine d’eau de mer en Afrique

Son histoire remonte au mois d’avril 1934, lorsque le conseil communal décida d’acheter un terrain de 7.000 m2 à la cité Ben Mhidi pour y édifier une piscine olympique.

Pour une fois, M. Cuttoli ne fait pas appel à Charles Montaland, l’architecte attitré de la ville pour exécuter le projet, mais prend plutôt attache avec J. Médecin, architecte à Nice, avec une recommandation préalable d’inclure un minaret au projet. Pourquoi un minaret dans une piscine? De toute façon ce n’était pas là le premier projet à se voir orné d’une tourelle que M. Cuttoli a construit à Skikda.

L’hôtel de ville, la gare ferroviaire et Dar Meriem sont également agrémentés d’un semblant de minaret à l’apport plus esthétique que fonctionnel.

On laisse même supposer qu’en agissant ainsi, M. Cuttoli exprimait, en fait, sa volonté d’imprégner plusieurs œuvres d’une touche architecturale «algérienne», pour ne pas dire «indigène» comme s’il voulait signifier les spécificités de cette terre. Bref, une fois les plans de M Médecin remis à la municipalité, le projet est mis en adjudication en octobre 1934.

Au mois de mars 1935, le projet est finalement adjugé à la Société commerciale et minière de l’Afrique du nord (SOCOMAN) qui mettra moins de 16 mois pour le livrer.

La piscine se composait d’un bassin, trois tremplins, un plongeoir, 80 cabines, une tourelle de 80m avec une horloge à double cadran, un bar, un restaurant, une cabine téléphonique, des pergolas, des sanitaires, un logement et trois escaliers reliant directement les lieux à la plage.

Le bassin, aux normes olympiques a une longueur de 50 m sur 18m de largeur, avec une profondeur de départ de 0,60m qui va en s’inclinant pour atteindre les 4 mètres.

Pour le remplir d’eau de mer, il suffisait de moins de trois heures grâce à un système de pompage mis en place par l’architecte. Le remplissage se faisait à partir d’une fontaine en marbre en forme d’aquarium d’où l’eau jaillissait en cascade.

Que de champions skikdis

La piscine a ouvert ses portes le 14 juin 1936, mais elle ne sera inaugurée officiellement que le 11 juillet de la même année.

Voulant faire les choses en grand, M. Cuttoli invitera pour l’occasion le nageur hongrois Csik, qui venait de rafler la médaille d’or aux jeux olympiques de Berlin.

«Csik a même réalisé le record du bassin de Skikda en le parcourant en 59 secondes. Un record qui n’a jamais été battu depuis», témoigne Hammoudi Boufafa, l’une des grandes figures de la natation à Skikda.

C’était là l’entame de l’histoire de cette piscine qui, une année après, abrita les championnats d’Afrique de natation et de Waterpolo. Cette dynamique ne tardera pas à faire éclore plusieurs champions skikdis. Leur épopée sera inaugurée, en 1938 par «l’immense» Benslimane Zine-El-Abidine qui a été champion départemental des 400 m et des 1.500 m. Il récidivera en 1939 en devenant champion d’Afrique du Nord.

L’ouverture opérée par Benslimane permettra aussitôt à d’autres jeunes skikdis de se hisser sur les podiums et le trio Boufafa, Sid Saïd et Guermech battra en 1949, dans cette même piscine, le record d’Afrique du Nord du 5 fois 50 m.

Depuis juillet 1936, date de son inauguration jusqu’aux années 1980, elle a accueilli dans ses eaux tant de champions locaux qu’étaient les Guermech, les Boufafa, Benslimane, les Sid, Cheurfi, Teffahi, Guergouz, Brouri, Loukil, Abdeslam, Goumri, Grief, les frères Metiba et d’autres encore.

Elle a aussi couvé de ses teintes bleutées les soirées folles de la jeunesse skikdie des années 1970/80 qui transformait ces lieux en une arène festive.

Seulement à partir des années 1990, la piscine fut totalement abandonnée. Elle n’est plus que ruines. C’est un chef-d’œuvre qu’il faut préserver avant que la mer n’emporte ses eaux et la piscine avec.


Fodil S.



je suis né à Skikda (ex-Philippeville) le 1er janvier 1955. J'ai foulé le sol de cette piscine alors que j'étais tout petit. je devais avoir 5 ou 6 ans. J'en ai un souvenir ému. Ca me fait mal au coeur de savoir que c'est devenu un dépotoir... Décidément le temps ne nous laisse que de la tristesse et des regrets. Cordialement
Michel APAP - NARBONNE, France

04/02/2016 - 292963

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