Au moment où la ville vit aux nouvelles des émeutes du bidonville d’El-Match, dont les habitants étaient sortis pour dénoncer les responsables locaux, coupables, à leurs yeux de les priver de leurs logements, au cimetière El-Kobbia, une famille de sept personnes continue de vivre dans des ruines.
Une famille qui n’a pas le bras long ni les épaules larges pour prétendre voir s’ouvrir les portes des responsables, souvent hermétiques quand il s’agit de pauvres gens. Pourtant, le père de cette famille n’est pas né de la dernière pluie. Il reste même une mémoire infaillible de la ville où il a vécu, combattu et où il continue à vivre en côtoyant les morts du cimetière, les reptiles et les rongeurs. Il s’agit de Dridah Lahoucine, plus connu sous le sobriquet «Gawdess», qui s’apprête à souffler ses 90 bougies.
«J’ai travaillé comme gardien de ce cimetière bien avant l’indépendance et je continue d’occuper ce logement minuscule avec ma femme, mes deux enfants et mes petits-enfants. Regardez l’état de ma demeure qui fait pourtant partie du patrimoine communal», nous raconte-t-il.
Les plafonds risquent de s’écrouler sous les infiltrations d’eau, les murs sont lézardés et la boiserie s’effrite à vue d’œil. Ici, il n’y a même pas une salle de bains. On se douche comme on peut aux toilettes.
«J’ai fait une demande de logement en 2008 et depuis j’attends. J’ai même osé faire une demande de logement participatif, idem. J’ai aussi demandé à ce qu’on daigne au moins réhabiliter cette demeure, mais je n’ai eu aucune réponse», ajoute Gawdess avec lassitude.
En plus de l’état délabré, cette famille vit entourée de rongeurs, qu’on aperçoit même le jour. Et il y a plus grave, «le jour des fiançailles de mon fils, les invités ont eu la peur de leur vie, lorsqu’un grand serpent était venu s’inviter à la fête, à l’intérieur même de la maison. Aujourd’hui, on a surtout peur pour les trois enfants de mon fils qui vivent avec nous», ajoute notre interlocuteur.
Gawdess, qui a donné les meilleures années de sa vie à sa ville et à son pays ne se fait cependant pas trop d’illusions.
«Aujourd’hui, les responsables sont tous pareils», assure-t-il en gardant cette âme de militant qui l’habite depuis les années PPA-MTLD.
Gawdess reste l’un des premiers militants nationalistes de Skikda. Il fait partie des membres fondateurs du club WJS, ex-WAP créé par le MTLD avec les Lahouel Hocine, Kaaouane, Djemaï, Toumi et d’autres encore.
A l’avènement de la Guerre de Libération, il rejoint les rangs du FLN, sera arrêté en 1956 et torturé dans les geôles du quartier de l’Abattoir avant d’être emprisonné à Lambèse.
A l’indépendance, il occupa le poste de gardien du cimetière d’El Kobbia, où il vit à ce jour.
Il sait, comme beaucoup de Skikda, qu’à défaut de logement, il aura droit à une tombe, la seule chose qu’on peut encore avoir à Skikda sans avoir à recourir… au «piston».
Photo: Gawdess est l’un des premiers militants nationalistes de Skikda. Il fait partie des membres fondateurs du club WJS, ex-WAP, créé par le MTLD, avec les Lahouel Hocine, Kaaouane, Djemaï, Toumi et d’autres.
Khider Ouahab
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Posté Le : 23/07/2017
Posté par : akarENVIRONNEMENT
Ecrit par : Khider Ouahab
Source : elwatan.com du dimanche 23 juillet 2017