Skikda - Divers sujets sur la littérature


Biographie de Malek Chebel
Né en 1953 à Skikda en Algérie, Malek Chebel fait ses études primaires et secondaires puis obtient son baccalauréat philosophie et lettres. Il entre en 1977 à l'Université Aïn El-Bey de Constantine. En 1980, il obtient un premier doctorat en psychopathologie clinique et psychanalyse à l'université Paris 7. Puis en 1982, Malek Chebel obtient son doctorat d'anthropologie et d'histoire des religions à Jussieu, et en 1984 son doctorat de sciences politiques de l'Institut d'études politiques de Paris. En 1995, il est habilité à la direction de recherche à la Sorbonne. Il a exercé et donné des conférences en Europe, dans le monde arabe et aux Amériques : dans des universités en France (la Sorbonne, Paris IV), au Maroc, Université de Marrakech, en Tunisie, dans plusieurs établissements supérieurs égyptiens, aux États-Unis, à Berkeley et Stanford, à San Francisco, à l'UCLA de Los Angeles, à la CUNY à New York, Rockefeller University à Chicago, en Belgique l'ULB à Bruxelles...

Malek Chebel est membre actif du Groupe des Sages qui, auprès de Romano Prodi, président de la Commission européenne, réfléchit aux implications culturelles induites par l'Europe, notamment dans ses rapports avec la rive sud de la Méditerranée.


Pensée

L'œuvre prolifique de Malek Chebel, nourrie de son triple bagage d'historien, de psychanalyste et d'anthropologue est principalement consacrée à la défense de la liberté sous toutes ses formes, liberté politique, liberté de pensée, de vivre et d'aimer, et de sa place dans l'islam et la culture musulmane. Déclinée comme objet de perception, de construction, de pratique, la liberté guide la réflexion de Malek Chebel pour travailler sur le corps, le désir l'amour, les relations entre les sexes, mais aussi la tolérance, l'engagement politique, le don.

Il a rédigé plusieurs préfaces, dont celle du Coran traduit par Edouard Montet (Editions Payot). Cette préface est consacrée à la nouvelle méthodologie d'interprétation du Coran. Malek Chebel a pris des positions fortes pour prôner ce qu'il condère être un islam moderne. Qu'il s'agisse du voile qui est, d'après lui, un sujet « secondaire », - ce qui ne l'empêche pas de qualifier cette revendication comme une « régression » -, qu'il s'agisse encore du besoin de traiter les problèmes entre les hommes par les hommes eux mêmes, et non par le recours à la religion , au nom de Dieu, ou en invoquant le nom de Dieu.


Islam et Occident

Son ouvrage, Islam et libre-arbitre a pour objet de comprendre l’islam dans sa relation à l’Occident, alors qu'aujourd’hui, c’est la peur qui domine. Comprendre les manières de penser, de vivre, la sensibilité de l’autre, pour dépasser la haine. Laisser une place à l’autre. Il s'agit aussi d'une interrogation sur la place de la liberté en islam et d'un plaidoyer pour une relecture de l’islam et de ses traditions.

Malek Chebel écrit aussi pour réhabiliter l'islam, car depuis ce jour noir du 11 septembre 2001, tout apparaît comme si l'islam était devenu suspect ou même avait été condamné et les musulmans obligés de toujours se justifier en prouvant leur bonne foi. En Occident, ils suscitent souvent haine et suspicion, et surtout incompréhension. Malek Chebel tente de se positionner en expert de l'islam. Si l'islam est au cœur des débats du siècle, il est d'abord important de le comprendre et de le connaître. Selon son analyse, les musulmans souffrent de cette image négative de leur religion.

« La plupart des musulmans sont pris en tenaille entre un groupuscule de musulmans violents, qui veulent islamiser le monde, et la grande majorité des Occidentaux qui ne comprennent rien à l'islam ».

Il rappelle que l'islam est pluriel, et qu'il est aussi vivant. Il rappelle que dans le passé, l'islam a été novateur dans bien des aspects de la vie. Il analyse avec une grille de sociologue l'évolution et les mutations des mentalités au sein du monde musulman. Malek Chebel défend l'idée qu'à travers les siècles, il y a eu de grandes périodes de paix, de créativité et de bonheur :

« c'est au nom de ces siècles-là que je travaille, au nom d'un grand nombre de savants, de littérateurs, de grammairiens, de juristes, de médecins et de califes ou sultans dilettantes que je m'exprime, en étant avec d'autres, le dépositaire de cet héritage ».

Il dénonce le manichéisme des fondamentalistes, car d'après lui, les islamistes intégristes ramènent la pensée de l'islam au VIIe siècle. Ils veulent oublier et effacer l'apport musulman dans le domaine philosophique, ainsi que toutes les réformes et mutations que la religion a connues, au gré de l'histoire et sous l'effet des événements.

Malek Chebel pensent que ceux-ci s'accrochent de manière rigide et autoritaire au Coran et aux théologiens fondamentalistes pour donner du Coran une lecture complètement anachronique. Leur conception se limite à une vision dualiste et dogmatique de la vie où tout est catégorisé en termes de pur et d'impur. Malek Chebel refuse ce manichéisme ; selon lui c'est à un détournement de l'islam, de sa culture et de sa tradition, auquel on assiste à l'échelle planétaire, qui est désastreux pour le monde musulman, totalement régressif et même destructeur car il représente un enfermement dangereux, qui entretient de plus, l'incompréhension de l'Occident à son égard et l'inimitié.

Tout à l'opposé de cette ligne intégriste de la défense de la pureté, Malek Chebel plaide pour un « islam des Lumières », notion qui donne son titre à un des ses derniers ouvrages. L'islam dont il parle, c'est celui du partage :

« celui qui amène au monde l'algèbre, l'arithmétique, la parfumerie, une gastronomie brillante, une musique, une maison de la sagesse et qui s'occupe de cosmologie, fondé sur la raison, sur les connaissances et le travail, sur l'échange et le respect d'autrui. J'ai essayé de montrer que l'islam est plus humain qu'on ne le pense, il est plus accessible, plus proche de nous, il parle au cœur, à l'émotion et n'est pas là pour semer la terreur

Ce Manifeste pour un islam des Lumières se présente ainsi :

Associer l'islam aux Lumières : cette relation est inscrite dans la dynamique amorcée au XIXe siècle et poursuivie par les nombreux réformistes qui ont voulu changer le visage de cette religion en s'appuyant sur le travail de la raison. Ces penseurs ont été taxés d'hérésie. Aujourd'hui, le débat est plus que jamais d'actualité : l'islam est-il compatible avec la République ? Quelle est la place et le statut de la parole libre, de la laïcité, de l'égalité des sexes, de la tolérance ou de la démocratie ? Faut-il adapter l'islam à la modernité ou au contraire adapter la modernité à l'islam, ainsi que le prétendent les fondamentalistes ?

En vingt-sept propositions, Malek Chebel répond à ces interrogations sans masquer les contradictions de l'islam ni éluder les questions difficiles : il se fait le théoricien d'un « autre islam », un islam en prise sur le réel.

Il vient de faire paraître L'islam, passion française : une anthologie, qui permet de mieux comprendre la perception que les occidentaux ont de cette religion. L'ouvrage est ainsi présenté par l'éditeur :

La perception que nous avons de la troisième religion monothéiste est fort ancienne. En témoignent les nombreux auteurs classiques intéressés par la religion du Prophète, qui a toujours suscité des réactions passionnées, de l'enthousiasme à la méfiance. Cette anthologie se veut le reflet d'une préoccupation qui a traversé les siècles et qui s'est exprimée de multiples manières. Il y est question de foi, de Mahomet, de mosquées, de ramadan, de rites, d'Orient… Nombre de hauts lieux y sont décrits Djeddah, La Mecque, Jérusalem, Al-Azhar, Cordoue… De Pascal, Montesquieu et Voltaire aux islamologues du XXe siècle, Massignon ou Rodinson, en passant par les écrivains voyageurs du XIXe siècle siècle, ce regard français offre le recul nécessaire pour mieux comprendre le monde qui vient.


L'érotique propre à la culture du monde musulman

L'autre partie de l'œuvre, savante, lève aussi le voile sur la culture propre à l'islam, sous l'aspect de la vie érotique, des rapports entre les sexes, des arts et autres raffinements de la culture orientale qui ont fasciné l'Occident depuis la découverte de l'Orient.

C'est toute la partie de son œuvre, où se retrouvent le psychanalyste et l'anthropologue associés pour pénétrer les mœurs, l'imaginaire et l'érotique, à travers l'histoire de l'islam et du monde musulman, soit tous ces livres qui parlent de l'amour et du désir en islam, pour en faire apparaître la singularité, la richesse, le raffinement et les rappeler, voire les faire renaître, tout en les analysant.

En 2004, Malek Chebel a publié son Dictionnaire amoureux de l'islam, où il aborde l'ensemble des questions qui ont trait à l'islam, en matière de droit et de mariage, mais aussi d'érotique : le réformisme musulman, la répudiation des femmes, le voile ou la sexualité. Cette exploration des arcanes de l'amour est aussi un livre d'histoire qui expose les raffinements de la culture orientale.

Dans Psychanalyse des Mille et Une Nuits Malek Chebel montre qu'il a fallu aux femmes réinventer le monde à leur mesure pour le maîtriser : cloîtrées dans leur harem, en proie à l'ennui et à l'intransigeance du sérail, elles racontent des histoires dont elles sont les acteurs principaux. Sous leur inspiration, Les Mille et Une Nuits deviennent une initiation aux mystères de la chair. Malek Chebel décrypte cette œuvre magnifique et célèbre : comment la femme, Shéhérazade, a dû réinventer le monde pour maîtriser la mort.

Du désir montre que parler du désir, c’est parler d’autrui. Quant à L'esprit de sérail, Mythes et pratiques sexuels au Maghreb étudie toutes sortes de thèmes liés à la sexualité : tabou de la virginité, obsession de la virilité, androgynie, et aussi le langage obscène, les homosexualités, voile, yous-yous, circoncision… à partir de ces figures emblématiques, Malek Chebel montre comment fonctionne au Maghreb l’« esprit de sérail », concept qu’il a forgé pour mieux saisir l’emprise redoutable de la loi du Père sur l’esprit et le corps de chacun - homme ou femme.

L'Encyclopédie de l'amour en Islam rappelle ce qu'il en fut de l'amour et de la sensualité aux origines de l'islam : « On m’a fait aimer en ce bas-monde trois choses : les parfums, les femmes et la prière, qui reste la plus importante à mes yeux », affirmait le prophôte Mohamed. C’est dire que l’on peut être un musulman fidèle, respectueux du Texte sacré, sans être ennemi de la jouissance charnelle, affirme malek Chebel. Dans ce travail, fruit d’une dizaine d’années de recherches, Malek Chebel a parcouru l’univers amoureux des pays musulmans. Il propose avec cette étude, comme une entrée dans la langue amoureuse, les mœurs, des techniques érotiques, mais aussi la médecine, la jurisprudence, l’esthétique, la psychologie et la mystique de cette civilisation qui a connu dans son histoire, et connaît encore, la vie d’un imaginaire amoureux raffiné et d'une grande richesse.

Il publie « Le Kama-sutra arabe » (Pauvert), qui exhume de la clandestinité, les grands textes de l'érotisme arabe qu'il présente ainsi "l'islam aime la chair, l'amour et les femmes".

"Les fondamentalistes tiennent pour impure toute intention charnelle, et même tout clin d'œil. Mais cet islam procède d'une haine de la chair. Il condamne le corps et la nudité, et excommunie la femme au seul prétexte qu'elle est une femme. La religion de Mahomet n'a pas toujours été synonyme de frustration et de culpabilité. Par le passé, un grand raffinement a accompagné son développement, notamment en Mésopotamie, en Andalousie, au Maghreb et en Syrie. Rappelons-nous les divans recouverts de roses et les lits coquins dont parlent « Les mille et une nuits ». Mais la psychanalyse a prouvé que ce que l'on refoule le plus est cela même qui rejaillit avec une force sauvage...

Tous ceux qui veulent dresser les jeunes filles selon leur vision rétrograde agissent non pas comme des musulmans, mais comme des misogynes et des machos" [1]

Documents

Interviews :
pour le journal L'Humanité du 24 janvier 2004
pour le magazine Le Point 12 février 2004 (no 1639 - Page 98)
pour le magazine Le Point du 22 septembre 2005.
pour le magazine Le Point - N°1826 du 13 septembre 2007 [1] L'islam est victime de sa culture esclavagiste. à l'occasion de la sortie de son livre L'esclavage en terre d'islam (Fayard)
Préfaces :
Le Coran, traduction d'Edouard Montet (Payot Poche 2001)

Bibliographie

2007 : L'esclavage en terre d'islam Fayard, septembre 2007, 496 pages
2006 : "Le Kama sutra arabe" (Pauvert)
2005 : L'Islam et la Raison:, le combat des idées, Perrin
2005 : L'islam, passion française : une anthologie (Bartillat)
2004 : Anthologie du vin et de l'ivresse en Islam, Éditions Seuil
2004 : Manifeste pour un islam des lumières, Éditions Hachette Littératures
2004 : Dictionnaire amoureux de l'islam, Éditions Payot
2003 : Islam et Libre arbitre, la tentation de l'insolence, avec Marie de Solemne, Éditions Dervy
2002 : Le sujet en Islam, Éditions Seuil
2001 : Les cent noms de l'amour, avec Lassad Metoui, Éditions Alternatives
2001 : Préface au Coran, Traduit par Edouard Montet, Éditions Payot-Poche
2000 : Du Désir, écrit à Paris en 1999, Editions Payot
1999 : Le traité du raffinement, Éditions Payot
1997 : Les symboles de l'Islam, Éditions Assouline, 2e édition 1999
1996 : Psychanalyse des "Mille et Une Nuits", Éditions Payot, 2e édition 2002 (?)
1995 : Encyclopédie de l'amour en Islam. Érotisme, beauté et sexualité dans le monde arabe en Perse et en Turquie, Éditions Payot, 2e édition 1997
1995 : Dictionnaire des symboles musulmans, Éditions Albin Michel, 2e édition 2003
1992 : Histoire de la circoncision des origines à nos jours, Éditions Balland, 2e édition 1995
1988 : L'Esprit de sérail, mythes et réalité sexuelle au Maghreb, Éditions Payot, 2e édition 1995
1986 : Le livre des séductions suivi de Dix Aphorismes sur l'amour, Éditions Payot, 2e édition 1996
1986 : La formation de l'identité politique, Éditions Payot, 2e édition 1997
1984 : Du corps en Islam, Éditions PUF, coll. Quadrige, 2e édition 1999


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