Cheïkh Mostefa Benbrahim était le héros et le modèle de la tribu de Beni-Ameur (d’ailleurs, la capitale des Beni- Ameur n’est autre que Sidi-Bel- Abbès) qu’il appelait la tribu verte et laquelle le lui rendait admirablement. Séducteur infatigable, ce poète et barde a créé toute une légende autour de son existence.
Le majorité de ses œuvres ont été un hymne à l’amour, à la vie et aux femmes auxquelles il a adressé des louanges. Elles avaient pour prénom Zohra, Fatma, Khadra, Aïcha, Mamya, Houria et particulièrement Yamina (dont les louanges ont été reprises en chanson par Ahmed Wahby), une femme qui fut sa passion et à laquelle il a consacré la plupart de ses poèmes. Devenu barde de l’Oranie et chantre des poètes, cheïkh Mostefa Benbrahim a produit une œuvre qualitative et quantitative qui fait partie du répertoire des grands du melhoun à l’exemple de cheïkh Hamada, El-Khaldi, Bouras, Ahmed Wahbi, Blaoui El- Houari, Khelifi Ahmed, Maâzouz Bouadjadj, Abdelkrim Dali, etc. Poète lyrique par excellence, il s’est inspiré de sa propre vie pétillante et passionnante. L’écrivain Abdelkader Bendamache s’est intéressé à ce chantre dans une œuvre intitulée Les grandes figures de l’art musical algérien, de deux tomes, parue aux éditions Cristal Print, et indique que les paroles du cheikh, de son vivant, subjuguaient les populations de l’Ouest et même de plus loin. Mostefa Benbrahim a été une source importante, dit-il, et une éminente référence à tous les interprètes et cheikhs du genre bédouin oranais, haouzi et moderne durant le XXe siècle. Ses œuvres restent toujours appréciées et recherchées. Les œuvres les plus marquantes sont, entre autres, El-Goumri, Dellil ki toual, Yamnna, Fi wahran skna ghouzali, Khadra ya naci, Dekhette lel mdina, Gueblou bel houria, El-Miloud el-miloud, Gualbi lefeker lewtane, Ya ouelfi mouhal,etc. Cheïkh Mostefa Benbrahim n’a jamais enfreint les règles de sa communauté, ni même trahi qui que ce soit, il avait toutefois un démon qui le titillait et le faisait vivre toujours dans la joie, le bonheur, le plaisir en recherchant la compagnie de la gent féminine. Les sentiments qui se dégagent de ses poèmes sont tels qu’à son retour du Maroc, où suite à des démêlés avec la population et un différend avec l’administration française, entre autres, il est resté 5 longues années, il est reçu par la fantasia (goum) de Ouled Slimane, ce qui représentait à l’époque une marque de respect et de haute considération. Cheïkh Benbrahim a été un goual recherché pour la justesse de ses mots, de ses verbes chauds, des situations émouvantes qu’il dépeint, et des louanges poignantes qu’il adressait à ses compatriotes. Ce prestige lui fit une place privilégiée parmi les siens en plus de son rang social et de son extrême sensibilité. Ce chantre unique en son genre est né vers 1800 à Boudjebaha El-Bordj, une petite localité située à 30 km au nord de Sfisef (Sidi-Bel-Abbès). Il effectuera une scolarité studieuse et son père instituteur (derrar) de son état lui apprit le Coran dès son jeune âge. Il l’incita à entreprendre des études en droit musulman et en théologie auprès du professeur et magistrat Si Mhamed Beriour. Cheïkh Benbrahim s’installe comme cadi (magistrat) dans son village natal. Il sera par la suite nommé par l’administration française en qualité de khalifa et caïd dans les localités de Ouled Slimane et de Ouled Balagh vers 1835. Mostefa Benrahim avait une personnalité controversée, mais ses œuvres poétiques sont là pour témoigner de sa verve et de son génie qui l’ont distingué des autres poètes populaires. Le succès n’était guère fortuit, car ses vers ne sont autres que l’expression profonde et sincère des vertus et autres valeurs de sa tribu. Un autre éminent écrivain, Azza Abdelkader, de Sidi-Bel- Abbès, a produit une œuvre en deux volumes parue aux éditions Sned en 1979 intitulée Mostefa Benbrahim, barde de l’oranais et chantre des Beni Ameur, thème de sa thèse de doctorat d’Etat ès lettres qu’il a soutenue en 1963 à l’université de la Sorbone (Paris/France). Mostefa est mort en 1867, emporté par la maladie. Il repose dans le cimetière du Mcid (Sidi- Bel-Abbès). On ne lui connaît pas de descendance et ce sont ses neveux qui continuent de perpétuer le personnage qui a marqué des générations.
Posté Le : 30/03/2018
Posté par : patrimoinealgerie
Ecrit par : A. M.
Source : lesoirdalgerie.com/articles/2010/01/18/article.php?sid=94418&cid=16