Si le monde est plein de surprises, l’Algérie en est une, permanente, immense, étonnante, toujours en avance sur les fictions les plus imaginatives. Elle s’inscrit en droite ligne dans la définition de l’art d’André Gide qui notait dans son Journal : « L’art serait, malgré la plus parfaite explication, de réserver encore de la surprise. » Rien de surprenant lorsqu’on sait que, ce Journal, l’écrivain l’a essentiellement écrit lors de ses innombrables séjours en Algérie. Tenez, Rachid Bouchareb. Comment ne pas le soupçonner d’être le seul cinéaste au monde de tendance gidienne ? Le 5 octobre dernier, date de colère il est vrai, il déclarait dans ces mêmes colonnes : « Je dois dire ma déception concernant mon pays d’origine. Le projet a dormi trois ans dans le bureau du DG de l’ENTV. Le ministère de la Culture m’a promis 4 millions de DA. Je les attends toujours. C’est d’autant plus regrettable, etc. » Et voilà que son film, « Indigènes » déjà neuf fois nominé pour les Césars qui auront lieu dans deux jours, sera présenté le lendemain aux Oscars sous la bannière étoilée. Laquelle ? Mais la nôtre, comme le précise avec force détails un site français de cinéma : « Malgré le financement à 90% français, le choix du réalisateur s’est porté sur sa nationalité algérienne (il a la double nationalité). Le drapeau vert et blanc orné d’un croissant de lune et d’une étoile rouge remplacera donc le bleu-blanc-rouge ». Dans les milieux parisiens, la déception s’est accompagnée de grincements et parfois pire, au point que certains se sont demandés si le film ne devait pas passer aux Césars en tant que film étranger ? Une manière de dire qu’il fallait rendre à César ce qu’Oscar a donné. Toute surprise, sauf en principe les mauvaises, recèle une pointe d’humour. Et l’humour affectionne les renversements de situations, car c’est bien la première fois que des Français disputent aux Algériens le statut d’Indigènes ! Le point mérite donc d’être souligné à l’actif de l’embellie bilatérale. Et l’on peut raisonnablement se demander si Bouchareb, connu comme réalisateur de talent, n’est pas aussi fin diplomate et humoriste émérite. A moins qu’il n’ait été inspiré par le syndrome de Malek Haddad qui écrivait : « On ne vient jamais pour la première fois en Algérie. On ne la quitte jamais pour toujours » . Pour finir, ce sondage express : allez, franchement, combien d’entre vous attendent que Qassaman soit entonné à Hollywood ? Ecrire à l’adresse ci-dessous.
Posté Le : 22/02/2007
Posté par : hichem
Ecrit par : Ameziane Ferhani
Source : www.elwatan.com