Il y a des hommes qui marquent de leur empreinte l’histoire de l’activité humaine dans laquelle ils évoluent.
Nacir ADJISSA a rayonné, dans les années quatre-vungts, sur celle du football algérien et particulièrement sétifien.
Joueur d’exception, il a forcé l’admiration, partenaires comme adversaires. Adulé par les amoureux de la balle ronde, il a été l’exemple et l’idole des générations venues à la compétition après lui.
Enfant d’une famille nombreuse et pauvre, il est né le 31 mars 1957 à Sétif, et a vécu dans un quartier populaire et populeux, où très jeune il a été formé à la dure école de la rue. Comme tous les enfants de son âge, il a appris à taper dans un ballon sur des terrains vagues, à la différence que ses équipiers étaient plus âgés que lui à l’instar de Khaber, Gaâmoun et Zaghlaoui dit Debraz qui étaient de bons joueurs.
Le petit Nacir jouait tellement bien que ses aînés allaient le chercher chez lui.
Son père dut exercer plusieurs métiers pour faire vivre sa famille, et Nacir l’admirait pour les efforts généreux qu’il consentait pour eux. La précarité dans la quelle se trouvait la famille l’a éloigné des bancs de l’école, il fallait aider son père qui commençait à présenter des signes de fatigue.
Il débuta sa carrière, du moins celle qui devait le faire connaître, par une mésaventure qui failli lui coûter d’être un célèbre inconnu.
Un début burlesqueC’était au début de la saison 81/82, l’Entente était qualifiée aux quarts de finale de la coupe d’Afrique des clubs vainqueurs de coupe. Kermali revenait de Tunis où il entraînait La Marsa pour prendre en main les destinées de l’équipe sétifienne. Une prospection avait été organisée dans le but de dénicher de jeunes talents en mesure de renforcer l’effectif du club. Beaucoup de jeunes des quartiers de la ville étaient venus tenter leur chance, parmi eux un garçon chétif, apparemment timide malgré le port d’une moustache bien taillée qui le vieillissait quelque peu : Nacir Adjissa dont le nom allait occuper quelques temps plus tard, les colonnes de la presse sportive. Serrar qui évoluait dans l’effectif seniors bien qu’il était encore junior, se rappelle bien du premier contact qu’il a eu avec Nacir : « Je ne le connaissais pas auparavant. Le jour de la sélection, mon attention a été attirée par son accoutrement, il portait un short orange et des espadrilles militaires. Son visage osseux était barré d’une moustache qui le particularisait. Je me suis dit qui est ce gars-là, mal fagoté et de surcroît âgé qui prétend pouvoir jouer à l’ESS ? L’avenir allait démontrer combien mon appréciation avait été erronée. Nacir s’avéra un grand footballeur, il portait le numéro 10 avec l’insolence d’une grande classe ! »
Ce jour-là, il y avait grand monde, aussi bien dans les tribunes que sur la main courante. En effet, la sélection attirait la grande foule des supporters mais aussi des dirigeants et des anciens joueurs. L’un de ces derniers, qui fut le partenaire de Kermali à l’USMS, fit une réflexion qui tomba dans l’oreille du Cheikh, comme on l’appelait déjà :
- « Ah ! Beladjissi est venu aussi faire un essai ?
- Qui est ce Beladjissi ? demanda Kermali.
- Voyons, tu ne te souviens pas de lui ? Il était avec nous à l’USMS. C’est le gars à la moustache et au short orange. »
Kermali s’était dit en lui-même : « C’est vraiment dommage, il a des qualités mais il doit dépasser la trentaine, il devrait aller finir sa carrière dans un petit club. »
C’est ainsi qu’au terme de la séance d’entraînement, Nacir fut renvoyé avec trois ou quatre candidats qui, eux, n’avaient rien à voir avec la compétition de D1.
Le soir même, Kermali était au stade Guessab pour jouer son habituelle partie de dominos avec Ali layasse et Laïd Tarzan, un ancien gardien de but du Stade Africain Sétifien, de son vrai nom Tellal Laïd. Au cours de la partie, Tarzan interpella Kermali avec la finesse proverbiale qui lui était connue :
- « Je te croyais un fin connaisseur en football, comment peux-tu passer à côté d’un grand joueur sans le sentir, alors que tu prétends être un renard de la balle ronde ?
- Qu’est-ce que tu racontes là ? De quel joueur tu parles ?
- De Adjissa ! Un excellent joueur je te dis !
- Non seulement tu joues mal aux dominos, voilà maintenant que tu perds le Nord ! Ton Adjissa est un vieux briscard, il était à l’USMS quand je drivais cette équipe, il y a quelques années.
- Je ne te savais pas aussi cynique, le gosse n’a que 23 ans, il vient de terminer son service national. Quand tu étais à l’USMS, c’est vrai qu’il y était, mais ce qu’on a oublié de te dire c’est qu’il était en 1ère année junior, et si après ton départ il a évolué en catégorie supérieure, ce n’était pas de sa faute, c’était parce qu’il était tout simplement bon, voilà ! »
C’est comme ça qu’une escouade de dirigeants, sous la direction de HAFSI Abdelhamid, alla à la recherche de Nacir, qu’elle trouva dans son quartier d’enfance, dans les bas fonds de ce qu’on appelle à Sétif, le village nègre.
Une belle aventureAdjissa a été aligné pour la première fois dans une rencontre amicale qui opposa l’ESS à l’équipe nationale espoirs au stade de Mohammadia, à Alger. Il portait le numéro 7.
Adjissa était un adepte « des terrains vagues ». Comme beaucoup de jeunes, il estimait que c’est dans ces arènes-là que se pratiquait le vrai football, le football joie, le football spectacle. D’ailleurs, il continue toujours à fréquenter ces aires de jeux comme il le faisait quand il était au sommet de sa gloire. C’est certainement pour cette raison-là qu’il a rejoint le football de compétition très tard, en signant sa première licence avec l’USMS en 1974. Il était en 1ère année junior mais ses qualités lui ont permis ‘évoluer en seniors.
En optant pour l’USMS, club qu’il a depuis son jeune âge supporté, il avait choisi le mauvais moment ; en effet, les Grenats étaient sur la corde raide. Ce qui ne l’empêcha pas de rester fidèle à son club jusqu’en 1979, année de son incorporation au service national. A son retour, il s’engagea avec l’Ecotec de Sétif pour la phase retour du championnat régional de la ligue de Batna, saison 80-81.
En 81-82, il rejoint l’ESS dans les conditions précitées. Durant 10 années, il fit le bonheur du club des hautes plaines sétifiennes. C’est indéniablement au cours de la saison 88-89, qu’il explosa. Entraînant ses coéquipiers au sommet du football africain, il remporta brillamment la Coupe d’Afrique des clubs champions à Constantine. C’était l’ère de « l’équipe de 88 » comme on continue à l’appeler du côté de Ain El Fouara. Une année plus tard, Adjissa et les désormais Africains confirmèrent leur titre de champions continentaux en remportant la coupe afro-asiatique.
La saison 90-91 fut pour l’ESS celle des grandes turbulences, Adjissa perdit la joie de jouer.
En 91-92, il retourne à ses premières amours, l’USMS, où il passe une année et raccroche.
Le dernier exploitEn 94/95, l’ESS, en D2, l’appelle à la rescousse, il rechausse ses crampons et contribue à l’accession du club en D1, pour finir en beauté sa carrière.
Khalfa, qui fut d’abord son coéquipier, puis son entraîneur, parle de lui avec beaucoup d’estime vantant ses qualités humaines, mais également son talent de footballeur : « Nacir est un homme d’une grande simplicité. Il l’a montré dans sa vie et sur les terrains de football. D’une discrétion exemplaire, il répugnait à être sous les feux de la rampe. Pour traverser la ville, par exemple, il évitait la grande avenue pour prendre les ruelles périphériques. Sa carrière aurait été plus riche si ce n’est sa timidité qui ne lui permettait pas de s’intégrer facilement. C’est un pince-sans-rire qui aime beaucoup plaisanter y compris sur le terrain. Les joueurs adverses de sa génération, connaissent bien ses réflexions et répliques dans le feu de l’action. Cependant, il n’extériorisait pas joie quand il marquait un but, comme il a toujours refusé le capitanat. Sur le plan des qualités techniques, Nacir est un homme qui sait relever les défis, quand il est provoqué par l’adversaire ou quand son amour-propre est touché, il devient d’une efficacité terrible. Dans ces conditions, il lui est arrivé à faire seul la décision, alors que le match était largement compromis. Dans tous les cas, je peux vous dire que c’est un grand Monsieur du football. »
• Avis de Nourdine Messahel, universitaire, ancien gardien de but : « Nacir jouait au football comme il respirait. »
• Adjissa : « Saâdane m’a enlevé l’envie de jouer en équipe nationale, à Tunis durant trois rencontres mes fesses ont été rongées par le banc de touche. »
• Pince-sans-rire, il énervait ses adversaires et parfois ses partenaires par des répliques acérées lancées en cours de jeu, genre « Le cinéma va commencer ! »
• Avis d’un supporter de l’USMS, voulant garder l’anonymat : « J’allais au stade non pas pour l’ESS mais pour le voir jouer, lui l’enfant des Grenats, le sorcier du ballon. »
• Adjissa : « J’aimais jouer au football avec le Rocco (Khalfa) parce qu’il était un gagneur mais à la belote c’est un fin tricheur, il avait toujours à la manche un deuxième quatorze »
• Dans les années 80, il y avait plusieurs numéro 10 prestigieux : Yahi (CRB), Tlemçani (France), Meziani (USMH), Boukar (ASMO), Adjissa (ESS), Belloumi (GCM)… A l’époque, quand on demandait à Meziani quel était le meilleur 10 du championnat, il répondait spontanément « le Sétifien Adjissa », et quand la question était posée à Adjissa, la réplique venait fermement « Meziani, voyons !. »
salam adjisa vous ete le meilleur 10 de l algerie kolha ouaoudeha vive adjisa
benayad kamel - cadre comptable - boumerdes, Algérie
11/11/2014 - 220601
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Posté Le : 11/12/2007
Posté par : nassima-v
Source : www.setif.com