Ouargla - PATRIMOINE

Bordj Rannou (Nezla/Touggourt/Ouargla) - Pourquoi pas un musée du palmier-dattier pour sauver le monument ?



Bordj Rannou (Nezla/Touggourt/Ouargla) - Pourquoi pas un musée du palmier-dattier pour sauver le monument ?


Monument historique d’envergure, sur la route nationale n°3, aux abords de la commune de Nezla, dans la wilaya de Touggourt, Bordj Rannou continue à dépérir à vue d’œil en l’absence d’un plan de prise en charge et de réhabilitation.

Symbolisant une réussite agricole ayant apporté de la modernité à la gestion des exploitations agricoles mais aussi une architecture joignant le style saharien au bâti contemporain fonctionnel, ce monument ne cesse d’éblouir malgré sa dégradation avancée, son effondrement partiel à cause des fissures engendrées par l’action du temps et des éléments de la nature.

Ce fort qui porte le nom de son propriétaire, Alexandre-Louis Rannou, a été construit entre 1915 et 1921 par une main-d’œuvre locale mobilisée par ce colon, qui fut l’un des premiers à investir dans l’agriculture saharienne et à s’installer dans la région.

Fondateur des Ets Alexandre Rannou, à Hussein Dey, Alexandre-Louis Rannou a été administrateur délégué de la compagnie agricole du Sahara algérien. Il est arrivé à Touggourt en 1910, en vue d’y lancer une exploitation de culture du palmier-dattier et a acquis du Service des domaines deux concessions de 150 ha à Touggourt et Djamaa.

Il a créé deux palmeraies modernes complantées chacune de 10.000 palmiers et a consacré toute sa vie au développement de l’agriculture saharienne en mettant au point des méthodes rationnelles de culture et d’irrigation, et s’est affirmé comme un véritable pionnier en matière de production et de commercialisation de la datte.

Il a publié différents rapports sur le commerce des dattes et sur l’irrigation rationnelle des plantations («Journées du Dattier», 13 et 17 nov. 1933) et également animé la revue Sahara concernant la culture et le commerce de la datte.

- Lac Merjaja

La maison de maître, construite au cœur de cette oasis de plusieurs milliers de palmiers-dattiers, dont la beauté et la hauteur témoignent encore de la palmeraie luxuriante, jouxtant le lac Merjaja, fait encore la renommée de ce domaine agricole dédiée à la phoeniciculture où furent expérimentées les dernières techniques de pointe en la matière, avec une chaîne dédiée à l’emballage et à la conservation des dattes en vue d’une exportation vers l’Europe via le chemin de fer qui arrivait à la gare de Touggourt et qui a contribué à la création d’un label reconnu.

Le domaine a enfin été divisé en trois parcelles dans les années 1970 portant les noms de trois martyrs de la région, Omran Boulifa, Lemnaouar Bentria et Nasrat Hachani, avec un total de 33 ouvriers, qui ont entretenu et exploité la palmeraie pour un temps avant de l’abandonner.

A souligner que le Bordj Rannou a été inscrit en 2009 par les associations œuvrant à la préservation du patrimoine de Touggourt sur la liste d’inventaire supplémentaire des monuments historiques dans le dessein d’une classification, mais ce dossier n’a pas abouti et semble même être laissé aux oubliettes vu que le dossier de proposition de classement expire automatiquement après dix années.

Des militants de la cause continuent à animer en vain un mouvement de valorisation des monuments historiques de la région de Touggourt. Alors que les différents ksour de la région, tels que Mestaoua et Temacine, dépérissent également, l’idée même de la restauration d’un monument colonial ne semble pas une priorité, quoique l’ascension de la nouvelle wilaya de Touggourt pourrait tendre à remettre le dossier de Bordj Rannou au-devant de la scène dans le cadre d’une valorisation en vue d’y créer un musée dédié au palmier-dattier, comme l’espèrent les activistes de la société civile.





Photo: Le monument qui jouxte le lac Merjaja se dégrade à vue d’œil - D. R.

Houria Alioua


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