Amer Bensidhoum est un self made man algérien, un autodidacte dans le domaine technique qui mérite tous les égards.
Da Amer, comme l’appellent ses amis proches, est un touche-à-tout qui a inventé une demi-douzaine de moteurs révolutionnaires et un four pour l’industrie, extrêmement innovant et propre. Et pourtant, Da Amer n’a rejoint les bancs de l’école que très tardivement, à l‘âge de 13 ans.
Né en 1949, d’un père membre actif du PPA/ MTLD et armurier de son état qui, à sa mort, a laissé un arsenal qui sera remis au FLN à la veille du 1er Novembre 1954, Amer Bensidhoum qui devait être scolarisé, est contraint de quitter son village natal de Aït Meslaiene (Haute Kabylie), décrété zone interdite par les forces coloniales après le déclenchement de la révolution. Mais il va très vite rattraper ce retard.
Deux années après l’indépendance, le 12 juin en 1964, il obtint son CEP. Compte tenu de son âge, il est orienté à l’Institut islamique de Béni Douala et arrive à décrocher assez rapidement «en cravachant très dur», dira Bensidhoum, le diplôme El Ahliya, l’équivalent du BEM aujourd’hui.
En 1965, il s’installe chez sa sœur à Oran et vit de petits boulots tout en s’inscrivant aux cours dispensés par des medersas connues comme El Fallah et El Hidaya.
«A l’époque, vous pouviez vous inscrire à l’université pour la préparation en deux ans de la capacité. L’obtention de ce titre vous ouvre la voie aux différentes filières universitaires. Puisque j’avais El Ahliya, c’est ce que j’ai fait».
Ce nouveau diplôme en poche, il s’inscrira à la faculté de droit de l’université d’Es-Sénia. Il ne fera, forcément, pas comme tout le monde: «Il y avait trop de gens qui se bousculent à la fac de droit. Cela m’a déplu et je me suis inscrit en spécialité histoire-géo».
Sacré rebelle que ce Amer! Il enseignera entre-temps dans l’école primaire Ibn Sina à Oran et c’est le destin qui, finalement, viendra frapper à sa porte.
«Par l’intermédiaire d’un parent, Daoui Ali, directeur de l’unité de fonderie Ducros va me recruter au milieu des années 70 en tant qu’enseignant de langue arabe fonctionnel aux travailleurs de cette entreprise. Les vacations de six heures par semaine ne suffisaient pas, j’ai été recruté en tant que manœuvre, car entre-temps, j’ai démissionné de l’éducation nationale. Le besoin créant l’organe, j’ai accepté cette ingrate fonction de manœuvre par nécessité et qui m’a laissé des séquelles physiques. C’était une révélation. J’enseignais l’arabe mais j’apprenais entre-temps le métier de la fonderie», se rappelle encore Amer.
A force d’observation et de pratique, il comprendra le processus de fabrication du métal, de sa transformation et s’ingéniera, déjà, à tracer les schémas des moules et à comprendre les secrets de la fusion. Son ascension est fulgurante: de manoeuvre, il se retrouvera DAG au début des années 80. En 1988, il est muté au complexe de Tiaret (Alfet) après un conflit avec la section de l’UGTA d’Alfon (ex Ducros). A Tiaret, il faillit périr, lui et sa famille, dans un incendie criminel qui aurait été provoqué par des éléments du SIT (syndicat islamique du travail, au temps de l’apogée de l’ex FIS) «et j’ai été interdit d’accès au complexe par ces mêmes individus pendant 13 mois».
«C’est vrai, dira encore Bensidhoum, que mon intérêt pour la politique était aiguisé, ce qui m’a valu d’ailleurs beaucoup de problèmes, notamment et surtout avec des personnes dénuées de l’intérêt public et économique».
A son retour à Oran en avril 1993, ces années houleuses pour le pays conduiront Bensidhoum à s’intéresser progressivement à ses inventions.
«Après avoir été réintégré dans mon poste de DAG par voie de justice en 1998 suite à une cavale politique au niveau d’Alfon puisque j’ai été licencié abusivement en 1996. J’ai démissionné après une seule journée de travail et j’ai créé ma petite entreprise qui s’occupait de la transformation de métaux notamment pour le mobilier urbain. Mes intenses recherches et ma passion pour le génie mécanique m’ont conduit à créer des moteurs à explosion complètement nouveaux, très indiqués pour tous les usages».
Ainsi en est-il du «moteur bucheron sans bielles à mécanisme oscillant» présenté avec succès au Salon de l’invention de Jonquières en 2011 et qui avait déjà reçu la médaille d’argent au salon international des inventions de Genève en avril 2009. Il s’agit d’une véritable révolution qui met à nu la forte complexité du moteur à explosion classique logé dans la plupart des véhicules aujourd’hui.
Le moteur à cylindres équidistants en étoile horizontale a été primé meilleure invention algérienne en 2005. Les moteurs créés par Da Amer sont de véritables ingéniosités en termes de simplicité mais tout aussi efficaces, voire plus performants que les moteurs à explosion classique.
«L’atout majeur de mes moteurs, c’est qu’ils sont moins lourds, comportant 100 fois moins de pièces et ne présentant aucune friction ou frottement».
Bref, de l’avis de tous les spécialistes, il s’agit de véritables révolutions, notamment pour le dernier en date: le moteur à explosion en rotations orbitales à visualiser sur YouTube à : «moteur en rotation orbitale Bensidhoum».
L’ancien de Ducros a également proposé des fours de fusion des métaux au gaz et non au charbon (coke extrêmement polluant). Cette invention comporte des technologies innovantes jamais utilisées qui permettront à l’industrie métallurgique d’obtenir des métaux élaborés de grande qualité, à un prix de revient divisé par cinq, et surtout, de participer grandement à la protection de l’environnement.
Da Amer, qui se met au service de l’industrie algérienne, demande que ses inventions soient protégées par l’Etat algérien au niveau international. Il compte lancer prochainement Facoma, la Fonderie algérienne de construction mécanique et aéronautique.
Mohamed Kali
Posté Le : 08/02/2016
Posté par : akarENVIRONNEMENT
Photographié par : Photo: lexpressiondz.com ; texte: Mohamed Kali
Source : elwatan.com du lundi 8 février 2016