Oran - HISTOIRE

L'INCROYABLE FACILITE DES ESPAGNOLS, DANS LA CONQUÊTE DES VILLES CÔTIERES ALGÉRIENNES, AU XVIe S.



L'INCROYABLE FACILITE DES ESPAGNOLS, DANS LA CONQUÊTE DES VILLES CÔTIERES ALGÉRIENNES, AU XVIe S.
MERS EL KEBIR (SEPTEMBRE 1505), ORAN (MAI 1509), BEJAIA (JANVIER 1510) CAPITULENT AVEC UNE FACILITÉ DÉCONCERTANTE, APRÈS UNE FAIBLE RÉSISTANCE, TOUT AUSSI DÉSESPÉRÉE QUE DÉSORDONNÉE, ALORS QU’ALGER EN VERTU DU TRAITÉ DU 15 JANVIER 1510, PAR LEQUEL ELLE DEVIENT VASSALE DES CASTILLANS, L’OBLIGEANT À FAIRE BONNE COMPOSITION SOUS LA MENACE DES CANONS DU PENON, SE SOUMET VOLONTAIREMENT AUX ESPAGNOLS.

AU COURS DE L’ANNÉE 1511 CE SERA AU TOUR DES CITÉS DE TENES, MOSTAGANEM, CHERCHELL, DELLYS, À ÊTRE OCCUPÉES.

Partout, les espagnols ne rencontrent qu’une faible résistance locale.
La question qui se pose, porte sur la facilité de conquête de ces villes.
Suivons quelques pistes pour tenter de comprendre les raisons qui ont provoqué aisément ces chutes.
Les continuels antagonismes entre tribus égoïstement intéressées, qui espèrent tirer profit de la défaite de leurs voisins, pour s’accaparer leurs richesses sont primordiaux dans cette défaillance.
Ce manque de solidarité laisse à penser que les autochtones, se sont mépris sur les intentions des espagnols et croient à de simples incursions dans le but de faire des razzias ; ils n’imaginent guère une occupation durable des espagnols.
Il est vrai qu'à cette époque, que le sentiment national tel que nous le connaissons, n’existe pas.
La religion destinée à être le facteur fédérateur des tribus, est elle également, livrée aux luttes d’influences des différentes confréries, dont seuls l’élément matériel et le prestige, dictent leurs actes. On a pourtant vu avec les ottomans, notamment Salah Rais, qui a été le premier à unir les tribus sous la bannière de la confrérie Qadirya, qu’il est possible de se délier de l’emprise espagnole.
DES CITES FRAGILES ET DES POUVOIRS VACILLANTS

Si pour Oran et Bejaia, leur conquête est planifiée depuis la prise de Mers el Kébir, par Ximenes Cisneros, en introduisant des espions et en recrutant des collaborateur juifs et musulmans, qui ont réussi à saper le moral de la population, ces raisons exogènes, ne sont pas les causes essentielles pour les autres cités.
Le ferment réside dans la fragilité et l’instabilité des pouvoirs centraux Zyanide et Hafside (pour l’Est algérien) qui ont conduit à une totale anarchie dans le territoire. Cette décomposition du pouvoir central Zyanide déjà précaire, est le corollaire direct de ce qui se passe à ses frontières Ouest et Est.
Au Maghreb occidental, les Mérinides manifestent leur faiblesse face à l'expansion des Portugais qui occupent le port de Ceuta, près du détroit de Gibraltar, en 1415, et commencent de grignoter le littoral. Affaiblis ils sont évincés par les Wattasides dés 1472, qui sont eux mêmes chassés du pouvoir par les Saadiens en 1548. Ceux ci, face à la menace Ottomane s'allient aux espagnols.
Au Maghreb oriental, les Hafsides ne sont plus maitres que de la ville de Tunis. Le pays éclate et, est livré aux tribus bédouines. De petits états éphémères sont fondés par ces tribus.
A l’est du Maghreb central (Constantinois), les Hafsides n’ont autorité que sur les citadins des cités de Constantine, Bejaia, Annaba et Collo. Quant au reste, ce sont des petites républiques théocratiques de tribus ou encore des zaouïas, qui dirigent des structures inconsistantes.
Au Maghreb central (Ouest et Centre de l’Algérie), les Abdelwadides (Zyanides) qui sont encore plus fragilisés, en raison des attaques permanentes de leurs voisins de l’Est et de l’Ouest qui leur grignotent des territoires et les assujettissent, n’échappent pas, de plus, aux intrigues de palais et luttes intestines. Cette dynastie moribonde est déchirée, avec des sultans installés respectivement à Tlemcen, Oran et Alger. Par les intrigues ou les batailles, chacun cherchant à s’accaparer les territoires des autres. Conséquemment, la dynastie Zyanide décadente, déchue de sa puissance et de toute légitimité, n’a plus d’autorité et voit son territoire morcelé en une multitude de principautés de tribus, de fédérations autonomes, de terres maraboutiques ou de ports libres.
Les espagnols qui évidemment, sont au courant de cette déliquescence des dynasties maghrébines, ont beau jeu d'exploiter ces discordes.
POURQUOI LES ESPAGNOLS N’ONT PAS CONQUIS LES TERRES INTERIEURES DU PAYS ?

Il est nécessaire de rappeler, que s'ils s’aventurent audacieusement au loin, razziant les populations qu’ils rencontrent, en ramenant du butin ou des prisonniers, les Espagnols n’ont jamais la possibilité (ou la volonté), de conquérir l’arrière pays. L’historiographie espagnole explique cette limitation, par la situation conflictuelle qui prévaut en Europe et l’attirance pour les Amériques, réputées plus riches et plus faciles à prendre.
Les raisons financières sont également évoquées pour expliquer cette occupation restreinte. S’il est admis que l’occupation intégrale est plus profitable, elle demande cependant au départ, d’énormes ressources financières et des effectifs considérables, que l’Empire des Hasbourg sous le règne de la maison d’Autriche, n’est pas capable de fournir au XVIe S, car déjà accablé de lourdes charges financières aux Amériques. C'est aussi la même situation au XVIIIe S, pour la dynastie des Bourbons embourbée dans des conflits, qui fatalement obèrent sa trésorerie. Cette lésinerie se traduit par un quasi abandon des garnisons des « présides », souvent livrées à elles mêmes, pour subvenir à leurs besoins essentiels.
ORAN UN PRESIDE MAJEUR AMBIVALENT

La place d'Oran commande les fertiles plaines de Meléta et de Sira, indispensables aux pâturages des tribus voisines. Craignant de s'affranchir du joug Espagnol que pour retomber sous un autre état de servitude aux Ottomans, ces tribus dont les terres sont les plus exposées aux exactions espagnoles, par la force des choses, choisissent de s’entendre avec ceux-ci et participer à leurs razzias. Cette vassalité permettra aux espagnols d'étendre ainsi, leur souveraineté dans un rayon de vingt lieues (environ 100km). Cette conduite qui favorise l’envahisseur chrétien est cruellement ressentie par leurs coreligionnaires.
C'est pourquoi d'autres tribus hostiles aux espagnols ayant pris conscience du péril, se décident enfin, à assaillir ces places. Ces initiatives isolées qui, si elles n’aboutissent pas à chasser les espagnols, leur mènent néanmoins, la vie dure, en les privant de la nourriture complémentaire nécessaire aux garnisons.
Alors que les présides espagnols, seront progressivement repris par les ottomans, seules les places de Mers el Kebir et d’Oran restent occupées pendant prés de 3 siècles en deux phases (pour Oran), grâce aux alliances que les espagnols ont su tisser avec d’abord les souverains de Tlemcen et certaines tribus environnantes(Maures de Paix).
LA RESCOUSSE OTTOMANE

Avec l’occupation de Tlemcen par les Turcs et la fin de la dynastie Zyanide (1556), les Espagnols se sont repliés sur eux-mêmes, en adoptant le modèle d’« occupation restreinte » . Les famines et maladies rendent la situation pénible aux troupes espagnoles, qui sont encore plus affectées après que le ravitaillement par voie maritime se voit entravé par les corsaires ottomans et les Raïs algériens originaires d'Andalousie. Ce sont en fin de compte, les ottomans coalisés aux tribus locales hostiles, soutenues par les confréries, qui bouteront les espagnols d'Oran. C'est le 20 janvier 1708, qu'Oran tombe entre les mains du bey de Mascara, Mustapha Bouchlagham, alors que Mers-el-Kébir résiste jusqu’au 3 avril de la même année.
Farid GHILI.
Histoire et Patrimoine de l’Algérie.
2 avril 2022
sources:
Daha Chérif BA, « Les colonies portuaires espagnoles au Maghreb du XVIe au XXe siècle », Insaniyat
Ismet Terki Hassaine : Oran au xviiie siècle : du désarroi à la clairvoyance politique de l’Espagne », Insaniyat
Fernand Braudel: Les Espagnols en Algérie, 1492-1792, dans Histoire et Historiens de l'Algéri


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