Oran - Juifs d'Algérie

Histoire des Juifs d’Oran



Il existe des vestiges préhistoriques proches du site d'Oran. Les romains fondèrent Portus Divini qui englobait les sites d'Oran et de Mers-El-Kébir.Mais les invasions vandales en 455 et arabes en 645 firent disparaître ces premiers établissements. On situe donc la fondation de la ville actuelle vers 903 par des marins andalous sous le nom de Wharan. Rien ne permet d’affirmer qu’à cette époque des juifs y habitaient. On trouve la trace de massacres de Juifs à Tlemcen en 1146, par les Almohades, mais aucune mention d’une présence juive à Oran.

La fondation du royaume Zeyanide de Tlemcen au XIII° siècle semble coïncider avec l’installation des juifs à Oran. Une des caractéristiques de ce royaume fut de faire appel à des Juifs en tant qu’interprètes, agents commerciaux ou diplomatiques dans ses relations avec les pays européens : royaumes d’Aragon, d’Espagne, de France, d’Angleterre. Les exilés d’Espagne y arrivent dès 1391 : nous possédons les traces d’une correspondance entre le rabbin d’Oran, Amram ben Merrouass Ephrati (originaire de Valence) et les rabbins d’Alger, Isaac bar Schescheth Barfat (Ribach 1326-1408) et Simon ben Semah Duran (Rachbatz 1361-1442). Les nouveaux arrivés trouvent une communauté ancienne très attachée à ses traditions. Peu à peu, l'élite des rabbins espagnols en deviennent les chefs reconnus. L'expulsion de 1492 accroit encore la présence des immigrés séfarades.

En 1509, la ville est conquise par les Espagnols du Cardinal Ximenez. Ce dernier décide d'expulser les juifs mais plusieurs familles obtiennent de demeurer dans la ville. Durant le XVII° siècle, de nombreux juifs jouent le rôle d'intermédiaires entres les Espagnols, les Turcs, les arabes et les Berbères.

En 1669, les Espagnols expulsent tous les juifs de la ville : cette fois, la mesure est strictement appliquée; les juifs doivent quitter la ville en 8 jours et sont déportés sur Nice, Livourne,..La synagogue d'Oran est transformée en église. En 1708, le Bey Mustapha de Mascara s'empare de la ville et de nombreux juifs se réinstallent. Mais en 1732, les Espagnols reprennent la ville qu'ils conserveront près d'un demi-siècle.

En 1792, le Bey d'Alger Mohammed el Kébir conquiert Oran et en chasse définitivement les Espagnols. Il invite les juifs des villes voisines à revenir s'y installer. En 1801, il leur cède pour un bon prix (820 sultanis d’Alger) un quartier de la ville et leur fait don (" donation perpétuelle et éternelle ") d’un terrain pour le cimetière. Des familles originaires de Mascara, Mostaganem, Tlemcen, Nédroma forment alors la nouvelle communauté. Le Rabbin Mardochée (Mordekhaï) DARMON, Mokkadem (Président) de la communauté juive de Mascara, joue un rôle important. Il était le mandataire officiel du Bey de Mascara et conseiller personnel du Bey d’Alger. Possesseur d’une grosse fortune, il fait construire de ses propres deniers la synagogue qui porte le nom de sa famille, rue de Ratisbonne. Il est l’auteur de " Maamar Mordekhaï " (paroles de Mardochée), commentaires sur la Bible et le Talmud (Livourne 1787).

En 1805, un marabout rebelle s’empare de Mascara et enchaîne la population juive. A la nouvelle de son approche, de nombreuses familles juives d’Oran s’embarquent pour Alger.

En 1813, le Bey d’Oran se révolte contre le Dey d’Alger. Vaincu, il est supplicié et ses partisans (dont sa favorite la juive Hanna Millul et ses deux fils) sont massacrés. Beaucoup de familles sont exilées à Médéa.

En 1830, à l'annonce de l’arrivée des Français, les Turcs se préparent à massacrer la population juive : le débarquement des soldats français le 29 juillet les sauve in extremis. Cet évènement est célébré comme le "Pourim d'Oran". Messaoud DARMON, petit-fils de Mordekhaï, compose un poème (piyyut) pour cette célébration : Mi Kamokha.

En 1831, après l'arrivée des Français, la communauté juive comprend 3531 personnes (et dans la ville, on compte seulement 750 chrétiens et 250 musulmans).Beaucoup de juifs se livrent au commerce et notamment au commerce d’exportation, essentiellement bétail et céréales à destination de Malaga, Carthagène, Algésiras et surtout Gibraltar. D’après les Archives espagnoles, les 2/3 des opérations sont réalisées par les juifs d’Oran. La maison Bacri-Busnach qui avait obtenu le monopole du commerce des céréales dans toute la Régence, étend son privilège au port d’Oran en 1801.

Le 6 décembre 1836, les autorités françaises installent le premier tribunal israélite présidé par Rabbi Messaoud DARMON (petit-fils de Mardochée). En 1841, le tribunal est supprimé et les juifs sont renvoyés devant les juridictions françaises de droit commun.

A partir de 1850, de nombreux juifs marocains, en provenance notamment de Tétouan,s’installent dans l’Oranais.

Des ligues anti-juives apparaissent à partir de 1871. En 1897, le "parti français" emporte la Mairie; des émeutes antisémites éclatent dans la ville.

En 1918, est achevée la construction de la grande synagogue d’Oran commencée en 1880.

En 1936, une nouvelle agitation antisémite se traduit par des vexations et des attentats. La municipalité de Sidi-bel-Abbès raye, en 1938, 380 électeurs de confession juive des listes électorales leur contestant la nationalité française. Un décret du Gouvernement en 1939 vient corriger cette irrégularité.

En Octobre 1940, le Décret Crémieux est abrogé : les juifs perdent la citoyenneté française. En mars 1941, commencent à être appliquées les lois raciales de Vichy.

En 1942, la communauté d’Oran accueille un convoi de 150 réfugiés juifs chassés de Libye et de Tripolitaine par les Italiens.En Novembre 1942, les Américains débarquent à Arzew et sur la plage des Andalouses.

Après le débarquement allié, les juifs d’Oran sont mobilisés au Camp de Bedeau, dans les unités spéciales de pionniers, le gouvernement du Général Giraud voulant éviter qu’ils puissent acquérir la qualité d’ancien combattant. Il faudra attendre Octobre 1943 pour que le Décret Crémieux soit remis en vigueur et que les juifs retrouvent la nationalité française.


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