Après des années sans grand relief, l’économie oranaise se réveille. 2006 fut exceptionnelle. L’année s’est située dans un registre élevé, avec notamment la réinstallation de plusieurs projets structurants. Mais la vraie bonne nouvelle est ailleurs : l’emploi semble reparti sur de bonnes bases.Tournée vers les services, Oran vit depuis plusieurs mois sur un nuage.
Premier employeur industriel de la région, ce pôle économique du pays continue ainsi d’investir. On objectera que le tissu industriel local ne se renouvelle pas et que les succès enregistrés sont à mettre au crédit d’entreprises installées depuis des lustres. Mais trois facteurs laissent augurer, explique un économiste, d’une poursuite de cette tendance positive : l’attractivité naturelle de la ville, la masse de ses 1 300 000 habitants et de ses deux universités et son futur pôle universitaire, à fort potentiel de main-d’oeuvre, et le dynamisme du secteur du bâtiment. La deuxième ville du pays a lancé son programme quinquennal de soutien à la croissance économique avec comme budget la bagatelle de 140 milliards de dinars chaque année. La métropole s’est alors transformée en un immense chantier. Avec ses 2,5% de croissance enregistrés en 2006, Oran a retrouvé son dynamisme. Mais la vraie bonne nouvelle est ailleurs : les exportations de la pêche sont désormais épaulées par la consommation des ménages, sur fond de reprise de l’emploi. Les chefs d’entreprises en sont d’ailleurs conscients : d’un strict point de vue statistique, l’actuel climat des affaires suggère, disent les experts, une meilleure croissance. Le rush des ménages oranais sur les biens durables explique sans doute l’euphorie ambiante. Mais pas seulement. La reprise de l’emploi commence à porter ses fruits et stimuler la consommation. Quelque 166 654 postes de travail, dont 16 512 permanents, ont été créés durant l’année 2006 à Oran. Selon M. Achour, directeur de wilaya de l’emploi, le taux du chômage à Oran a sensiblement diminué grâce à la création de 21 146 postes de travail rien que via les divers dispositifs d’aide à l’embauche. De son côté, l’ANEM a placé 1020 demandeurs sur les 51 000 recensés en 2006. Les principaux secteurs générateurs d’emplois sont le bâtiment, les travaux publics, l’hydraulique, le transport, les services et biens sur le commerce. Et la ville n’emploie pas que la main-d’œuvre locale : pas moins de 6521 étrangers, représentant 38 nationalités, sont employés dans le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTPH) à Oran. En l’espace d’un an, le nombre de demandeurs d’emploi a diminué de presque 15 000 personnes. Une dégringolade qui s’explique autant par la création des PME que par la multiplication des emplois aidés, les fameux minijobs. La preuve : la croissance du nombre d’emplois soumis aux cotisations sociales s’est redressée (+1,5% sur un an). Elle dépasse aujourd’hui le rythme de croissance de l’emploi dans l’ensemble du pays. Bien sûr, en données brutes, le taux de chômage reste élevé : plus de 15% en moyenne sur l’année 2006. Mais les perspectives d’embauches “sont plutôt bonnes pour 2007”, rassurent tour à tour l’ANEM et la DE. Grâce à leur compétitivité retrouvée, les entreprises du secteur industriel prévoient de créer 8000 nouveaux postes cette année, selon la Chambre de commerce et d’industrie. Un véritable exploit dans une conjoncture où les coûts industriels induits par la mondialisation ont plutôt tendance à détruire des emplois.
Les PME sur tous les fronts
L’objectif de créer 25 000 nouvelles entreprises en cinq ans, fixé en 2004, sera-t-il atteint ? Le nombre de créations d’entreprises nouvelles a “augmenté de 33%” en cinq ans, et ce, notamment grâce à “la loi pour l’initiative économique et la loi en faveur des PME”, se réjouit-on à la direction de la PME. Les 14 000 PME oranaises qui emploient 53 500 employés ont incontestablement stimulé la croissance. Et bien sûr soutenu l’emploi. Une croissance qui situe à 79% la part des activités des PME dans le PIB national hors hydrocarbures. Cette attractivité retrouvée ne doit pas pour autant occulter la persistance de faiblesses propres à Oran. “Il y a une certaine lenteur à prendre les décisions ici, mais surtout une multiplicité néfaste des interlocuteurs”, avoue un cadre de la DTP. Autre point noir : pas moins de 1563 opérateurs économiques activent sans aucune adresse. Mais là le symptôme est loin d’être proprement oranais. Des acteurs activant notamment dans le secteur de “l’import-import” recensés à Oran, attestent-on à la direction régionale du commerce. Des commerçants qui feront l’objet de poursuites judiciaires. Autre bonne note de cette ville côtière : les exportations des produits frais de la pêche ont atteint, en 2006, “trois millions de dinars”, selon la direction de la pêche et des ressources halieutiques. “Le volume des produits exportés a atteint 936,2 t, représentant les différentes espèces de poissons”, a indiqué la même source, qui précise que “le secteur a produit, de 2002 à 2006, une moyenne annuelle de 1100 t”. Le volume est constitué de 623 413 kg de crustacés congelés, de 135 384 kg de mollusques congelés, de 93 062 kg de poissons congelés, de 9048,7 kg de crustacés frais, de 3639,1 kg de mollusques frais et de 81 326,7 kg de poissons. Un responsable du secteur souligne qu’Oran sera dotée d’un laboratoire régional d’analyse et de contrôle sanitaire dont les travaux de concrétisation seront entamés au cours de l’année prochaine. Oran, qui fournit près de 10% de la production nationale, a produit cette année 24 412 t de différentes espèces de poissons, soit une augmentation de près de 4,44 t par rapport à la moyenne annuelle qui était de l’ordre de 7500 t. Autre bonne nouvelle à mettre à l’actif de 2006 : Oran aura aussi une autre station de dessalement d’eau de mer d’une capacité de 500 000 mètres cubes/jour qui sera réalisée à Mers El Hadjadj. La décision de réalisation de cette station, qui vient remplacer celle prévue initialement à Cap Blanc, a été prise par la direction de l’hydraulique après consultation des experts du ministère de tutelle. Le projet, qui permettra de préserver une superficie de plus de 15 ha de terres agricoles à Cap Blanc, est actuellement à l’étude, après l’affectation d’une assiette foncière qui abritera cette station à Mers El Hadjadj. Côté “business”, Oran a l’âme commerçante. Pourtant, la ville saura-t-elle conserver l’équilibre fragile entre le commerce intra-muros et les zones périphériques ? Au sud ainsi qu’au nord, les grandes surfaces attirent. Beaucoup d’observateurs s’inquiètent ainsi du dépérissement de l’offre commerciale au centre-ville, où les façades de banques et les franchisés nationaux gagnent du terrain. Et l’avenir inquiète certains. “Mais on aurait dû d’abord favorisé des projets de vie avant ces mégaprojets commerciaux. Où sont les teinturiers, les artisans ?”, s’interroge un membre de la Chambre des métiers qui s’inquiète aussi des dommages collatéraux du tout commerce : certes, à entendre les associations patronales qui activent sur le terrain, la ville pourrait “encore mieux faire”. Mais force est de constater la faiblesse des moyens affectés par les municipalités à la création d’entreprises. “A un bout de la chaîne, l’aide à la création des entreprises participe à la lutte contre l’exclusion”, explique un chef d’entreprise qui reproche aux municipalités de ne pas s’activer en la matière.
Posté Le : 29/01/2007
Posté par : hichem
Ecrit par : Cherif Lahdiri
Source : www.elwatan.com