Mostaganem a rendu hommage quatre jours durant à l’un de ses enfants émérites dans le domaine de la poésie et de la culture orale. En effet, le légendaire auteur de la célèbre qacida Abdelkader ya Boualem a été honoré comme il se doit, et ce, à faveur d’un riche programme artistique basé sur une série de conférences et soirées musicales chaâbi animées par une pléiade de chanteurs mostaganémois ainsi que plusieurs invités algérois, l’instar de Rédha Domaz, Kamel Fardjallah... Pour ce faire, la fondation Les amis de cheikh Abdelkader Bentobdji a eu l’insigne honneur d’organiser, en compagnie de l’association musicale Nadi El Hillal Ettakafi, une telle manifestation, et ce, au grand bonheur des férus de la musique chaâbi et de la poésie populaire du terroir.
UNE HALTE AU MAUSOLÉE DE SIDI ABDELKADER MOUL ESSAFAH
La fête a débuté lundi dernier à l’occasion d’une visite effectuée par les adeptes de Moula Abdelkader El Djilani au sein même du sanctuaire fièrement érigé en contrebas du vieux faubourg d’El Arsa et dominant une partie du vieux Tigditt. C’est vers midi que la zyara a eu lieu avec à la clé, des moments de recueillement sur place à la mémoire du défunt poète Abdelkader Bentobdji dont la tombe est attenante au “maqam” du ouali salah Sidi Abdelkader El Djilani. Des versets du Saint Coran ont dû être récités avant que de sacrées rencontres n’aient lieu autour de plusieurs gasaâ de couscous traditionnel. Le tout enrobé dans une sublime ambiance de tbal et de ghaïta de pure tradition mostaganémoise. A la tête des organisateurs, l’inamovible Abdelkader Ghlamallah, chercheur, professeur de musique et célèbre interprète de chaâbi, se démènera comme un fou aux fins de garantir au maximum les meilleures conditions possibles de réussite de cette si belle manifestation, dont il fut d’ailleurs le principal initiateur. Aussi, faut-il souligner la précieuse collaboration de la direction de la culture qui en vérité, s’implique dans toutes les manifs culturelles à Mostaganem et cela est déjà de bon augure pour le monde artistique de la wilaya.
DU CHAÂBI PLEIN LES OREILLES
Des conférences, il y en a eu grâce à l’omniprésence d’hommes acquis à la cause de la musique traditionnelle dont le professeur, chercheur et chef d’orchestre Hmaïdia Mohamed qui, en fait, ne ménagera aucun effort pour être au four et au moulin. Présenter des travaux de recherche en conférence la journée et guider tout un orchestre le soir, jusqu’à une heure avancée de la nuit, n’est guère chose aisée en fait. Cela étant, et durant quatre jours consécutifs, l’assidu public de la salle Bleue en aura eu plein les yeux, plein les oreilles. Et pour cause ! Le chaâbi mostaganémois était à l’honneur. Pour la circonstance, la quarantaine de chanteurs, toutes générations confondues, invités à prendre part à cette magnifique rencontre, devaient tour à tour interpréter des qacidate puisées exclusivement du répertoire de cheikh Abdelkader Bentobdji qui, après sa mort en 1984, aura laissé derrière lui tout un registre de poésie. Pour l’heure, plus de cinquante qacidate ont pu être répertoriées et classées dans un recueil grâce au travail colossal effectué par Abdelkader Ghlamallah. Le public a eu le plaisir de découvrir de jeunes talents de chaâbi qui pour la plupart ont su étaler leur savoir-faire, à l’instar des Mezouaghi, Boukhoudmi, Kerrache, Gana et autres Goual Abdelkader. D’autres chanteurs plus aguerris feront également le bonheur de leur auditoire à la faveur d’une maîtrise exceptionnelle (voix, istikhbar, rythme et cadence…) En effet, les excellents interprètes que demeurent Hamida Benhenda et Fayçal Benkrizi émergeront du lot, et ce, en plus des belles prestations de Khaled Boukhari, Brakni Abdelkader, Hamida Boukecier, Sid Ahmed Benalioua et Abdellah Kharroubi qui, à l’aide d’une seule main, étant handicapé de l’autre, fait des merveilles sur un mandole déjà acquis à la cause du futur cheikh. Les plus anciens comme Ahmed Zeguiche, Ziane Dader, Touati Baïnine ou encore le doyen cheikh Berraho, charmeront comme à l’accoutumée l’assistance, chacun à sa manière. En clôture, ce fut l’apothéose vers près de deux heures du matin après le passage de Abdelkader Ghlamallah et de Benaho, lorsque tous les chanteurs monteront sur scène, accompagnés d’enfants et de chouyoukh. Et là, tout Mostaganem chantera en chœur Abdelkader ya Boualem dans l’ambiance et avec l’émotion que l’on devine aisément. Un air qui aura depuis longtemps bercé notre enfance, et ce, grâce à tous ceux qui auront eu le mérite de perpétuer la mémoire du poète et partout celle de celui qu’on considère comme “ soltane el aouliya”. Une chose est sûre en tout cas : à Mostaganem, Abdelkader ya Boualem est toujours repris dans son intégralité avec ce souci de respecter le texte contrairement à certains supposés chebs et chabettes qui n’ont pas trouvé mieux que de déformer cette même qacida pour quelques sous de plus…
Posté Le : 23/08/2007
Posté par : hichem
Ecrit par : Sid Ahmed Hadjar
Source : amalouahcene.musicblog.fr