El-Oued

Pierre Audin, in memoriam



Pierre Audin, fils du chahid Maurice Audin qui fut torturé et assassiné en 1957 par l'armée française pendant la guerre de libération nationale, vient de décéder ce dimanche 28 mai à l'âge de 66 ans. Le 14 avril 2022, il avait reçu son passeport algérien, une énième façon pour lui de rester fidèle à l'engagement puissant de celui qui lui a transmis la vie. Pour lui rendre hommage, nous avons eu l'idée de reproduire quelques-unes de ses paroles fortes contenues dans un entretien qu'il nous avait accordé à l'occasion d'un de ses retours au pays. «Je suis le fils de Maurice Audin mais aussi le fils de Josette Audin : c'est elle qui m'a élevé, j'avais un mois quand mon père a été arrêté et assassiné. J'ai vécu mon enfance à Alger. Ma mère est née à Bab El Oued, elle a milité pour une Algérie indépendante, elle a passé sa vie à essayer d'abord de retrouver son mari, puis de faire condamner les tortionnaires et l'assassin, puis de faire savoir la vérité. La déclaration du Président français Emmanuel Macron du 13 septembre 2018 qui reconnaissait que la France avait institué un système destiné à terroriser la population algérienne (arrestations arbitraires, torture, exécutions sommaires), système dont mon père, comme des milliers d'Algériens, a été victime, est arrivée quelques mois avant son décès, survenu après 61 ans de combat personnel et militant. Elle se désespérait de voir que l'Algérie n'était toujours pas devenue le pays pour lequel elle et son mari s'étaient battus, une Algérie libre, indépendante, démocratique, fraternelle, multiculturelle. Josette et Maurice Audin se considéraient comme Algériens. Ils ne se sont pas battus à côté des Algériens mais parmi eux, pour l'Algérie, leur pays. Lorsqu'on se bat pour un idéal, on n'attend rien en retour. Ce n'est pas un marché. Le seul devoir qu'on a vis-à-vis de ceux qui sont morts pour cet idéal, c'est un devoir de vérité historique. (…) Depuis quelques années, il m'arrive de retourner en Algérie pour des actions de diffusion de la culture scientifique, en particulier en mathématiques. A ces occasions, j'ai travaillé avec des étudiantes et des étudiants algériens : ils sont extraordinaires, ils cherchent à apprendre, ils cherchent à expliquer, à faire partager leur plaisir de faire des mathématiques et les autres sciences. Ils veulent participer à la construction de l'Algérie de demain, aider à son développement, l'enrichir grâce à leurs compétences. Plus question pour eux de rester sur le bord du chemin : ils veulent avoir une reconnaissance, une carrière. Il reste beaucoup à faire certes mais ce pays est magnifique, son peuple est merveilleux et sa jeunesse est dynamique. J'ai confiance en elle, elle va faire avancer l'Algérie».


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