Constantine - ARTISANAT ET METIERS

La pacotille envahit le marché



La pacotille envahit le marché
La pacotexigeante, attirée par le toc et le faux clinquant importés à moindre prix, ceux qui maîtrisent vraiment ce métier ancestral purement constantinois se comptent désormais sur les doigts d’une seule main.



Trois cents huit objets traditionnels du cuivre rouge, qui se présentent comme l’un des facteurs de la singularité et la spécificité de la culture constantinoise, sont en voie de disparition. Il ne reste que 10 % de cette gamme conservée dans le cuivre rouge.
Certains objets traditionnels ont complètement disparu chez les dinandiers actuels, tel que «tassa» (petit récipient rond pour recueillir l’eau du bain), tefel (sorte de broc contenant de l’argile pour le soin des cheveux), mahbes (grand pot de forme longitudinale contenant les objets de toilette indispensables pour le bain maure), deloua (seau en forme de trapèze), etc.

Selon le maître artisan, Driss Amine Khodja, dont la famille pratique le métier depuis presque deux siècles, «le marché est inondé par la dinanderie syrienne qui est en fait fabriquée à base de laiton, matière jaune dérivée du cuivre rouge». Pour lui, la situation actuelle de la dinanderie à Constantine est catastrophique. Et de regretter: «Les gens sont beaucoup plus attirés par le clinquant et les fausses dorures, qu’ils peuvent acquérir à des prix modiques ; rares sont ceux qui ciblent la qualité, le savoir-faire et l’authenticité du produit. De nos jours, le cuivre jaune de moindre qualité a envahi le marché. Face au manque à gagner, la plupart des dinandiers ont renoncé au vrai travail ancestral de qualité appris de père en fils. A force de céder à la facilité, et à une clientèle peu exigeante, ceux qui maîtrisent vraiment la dinanderie purement constantinoise se comptent désormais sur les doigts d’une seule main.» Plus grave encore, peu de jeunes s’intéressent au métier, d’après lui.

La relève n’est donc pas du tout assurée, et il n’y a pas d’école ou d’institut pour perpétuer le savoir-faire. Le rêve de sauvegarder le métier est en train de disparaître peu à peu. «J’ai voulu créer une école pour communiquer mon savoir-faire, mais mon idée n’a pas eu d’écho», a encore regretté cet artisan émérite qui représente le dernier maillon d’une longue chaîne ancestrale de dinandiers, et qui continue de résister par amour de ce noble métier. «Pour moi ce métier est une lourde responsabilité ; je ne peux abandonner un héritage de sept générations de dinandiers, depuis 1827, pour le remplacer par la production d’objets en en plastique» a-t-il ajouté. Selon lui, il serait utile de lancer un travail sérieux pour la reconstitution de 380 objets disparus, de les labelliser et de les sauvegarder au profit des nouvelles générations, car c’est un pan entier de l’histoire sociale de la vie quotidienne de jadis dans la ville des Ponts.



Yousra Salem

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