Les artisans revendiquent du respect et de la considération. Seuls les critères de compétence et de dextérité doivent être pris en compte.
Le Mois du patrimoine a pris fin ce jeudi au palais Ahmed Bey, baptisé depuis peu Musée public national des arts et expression culturelle traditionnels. Au-delà de son aspect festif, voire folklorique, la manifestation avait comme un goût d’inachevé, au regard de l’incommensurable amertume exprimée par la plupart des artisans présents. Selon eux, «l’artisanat, le vrai, celui réellement susceptible de représenter dignement Constantine et de booster le tourisme, est faussé par quelques associations parasites, sans envergure, dévoreuses de budgets, qui font tout pour garder leurs privilèges au détriment de ceux qui détiennent le savoir-faire».
Beaucoup de maîtres artisans, dont certains sont les derniers représentants de métiers séculaires, étaient déçus par la façon dont a été organisé cet évènement dont ils escomptaient des résultats positifs à long terme.
Le président de la Chambre de l’artisanat et des métiers (CAM), Noureddine Ghaddab, duquel dépendent 9000 artisans, déplore les vieux réflexes, où des individus s’attribuent le mérite des créateurs en tout genre. «Les artisans ne demandent qu’à donner à leur pays; leur rêve est qu’on leur réserve un espace honorable, où ils pourraient donner la pleine mesure de leur talent; il existe des lieux propices qui sont fermés au centre-ville, où l’on pourrait les installer pour assurer la relève», suggère-t-il.
D’autant plus que plusieurs métiers sont menacés de disparition à court terme. Citons, à titre d’exemple, le fabricant de selles (de père en fils depuis le 19ème siècle) Kramia Noureddine, Mohamed-Salah Belabiod, fabricant d’instruments de musique à l’ancienne, Mourad Benchaouaou, vannier de père en fils, Driss Saber, savetier, Amine-Khodja, dinandier émérite…
Des métiers menacés de disparition
Des artisanes étaient présentes aussi; elles ont largement participé à redorer le blason de l’antique Cirta à travers leur savoir-faire, telles Mmes Nacéra Facih, une férue de l’art culinaire et de l’habit traditionnel constantinois, - elle a à ce propos habillé la gent masculine ayant participé à la cérémonie-, Nadia Neïli, Mouni… D’autres artisans tout aussi passionnés, ont embelli cette manifestation avec leur produit, comme le couple Amina et Sami Bouhrour (ce dernier est le président de l’association Zouhour de Cirta), versés dans la broderie d’or sur velours de Gênes, et la confiserie traditionnelle; ils enseignent aussi le métier à plus de 80 élèves des deux sexes, l’association El Borhane avec sa présidente Nabila Derbala et ses collègues Chamia Mekhzer et Nedjoua Radji, qui ont participé à l’élaboration de la «Gaâda» dans le patio.
La directrice de l’institution, Mme Chadia Khalfallah, présente à tous les fronts, évoque ce lieu magique avec déférence. «Le palais, dit-elle, incarne tout l’art de vivre de Constantine; durant ce mois nous avons accueilli 5000 visiteurs; ils étaient heureux de retrouver leurs racines, leurs traditions dans le temps et dans l’espace, avec l’architecture, les patios, les grands jardins aux senteurs d’oranger, l’art culinaire, la musique, les coutumes ancestrales… il ne faut pas oublier, rappelle-t-elle, que cette ville était déjà un pôle de rayonnement à l’époque numide». Le concert de malouf, le clou de cette ambiance féerique, était assuré par le très jeune et talentueux orchestre Noudjoum Founoun Kasentina.
L’assistance a eu droit également à un beau récital de poésie populaire à la gloire de Constantine, du cru de Ammar Benderradj, musicien, compositeur et parolier, et de Abdeldjallil, jeune poète très inspiré. Des attestations honorifiques et quelques cadeaux ont été distribués aux participants.
Farida Hamadou
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Posté Le : 22/05/2012
Posté par : akarENVIRONNEMENT
Ecrit par : Farida Hamadou
Source : El Watan.com du dimanche 20 mai 2012