Suite à l'appel de la Fédération nationale des travailleurs des forêts, de la nature et du développement rural, rendu public le 30 novembre dernier, les agents et cadres forestiers de la wilaya de Bouira ont observé, dans la matinée d’avant-hier, jeudi, un sit-in devant la Conservation de Bouira, sise au boulevard de la zone des Parcs, pour protester contre les menaces et les agressions dont fait l'objet le corps des forestiers à l'échelle nationale de la part de ceux que l'on n'hésite pas à appeler la "mafia du foncier".
Cette action, qui a été initiée par toutes les conservations des forêts du pays, a été décidée suite à l'assassinat d'un forestier, en sa qualité de chef du district de Becaria, en mission commandée à Tébessa; un acte commis par des délinquants qui ont squatté un terrain forestier relevant de la propriété de l'État.
Le sit-in organisé pendant deux heures (de dix heures à midi), a rassemblé une centaine d'agents et cadres forestiers exerçant dans les cinq circonscriptions de la wilaya.
Une minute de silence a été observée en hommage au forestier tué dans la wilaya de Tébessa.
Une banderole accrochée au haut du portail d'entrée résume la revendication principale de ce corps de métier, à savoir sa réhabilitation dans sa mission principale qui est la conservation, la gestion et l'extension du patrimoine forestier.
À lui seul, ce mot d'ordre de réhabilitation porte de vieilles revendications relatives à l'actualisation de la législation du secteur (loi 84-12), aujourd'hui largement dépassée par les événements, à la nécessité d'élaborer un nouveau statut pour les forestiers qui s'adapte à leur mission et aux difficultés qu'ils rencontrent sur le terrain, et, enfin, à la demande de dotation en armement.
Ce dernier point a toujours constitué un point d'achoppement entre les forestiers et leur tutelle, le ministère de l'Agriculture et du Développement rural.
Pour rappel, les agents forestiers ont été désarmés en 1994 suite à la subversion terroriste qui commençait à prendre de l'ampleur à l'échelle de tout le pays.
Depuis la fondation de ce corps de métier du temps de la colonisation, ses agents ont toujours été armés.
Avec l'ampleur des incendies qui on touché la forêt au cours de ces vingt dernières années, les terrains forestiers sont convoités aussi bien par les riverains de la forêt que par ce qu'on appelle communément la "mafia du foncier".
Des parcelles entières sont, aujourd'hui, soustraites à la gestion des services des forêts suite à leur occupation illégale par des tiers.
Constructions, exploitation agricole, création de servitudes, toutes les raisons sont "bonnes" pour que des délinquants s'emparent du foncier forestier.
C'est à l'occasion d'une mission de règlement de pareille situation qu'un agent forestier a été assassiné au mois de novembre dernier à Tébessa.
À cela s'ajoutent, les défrichements et le vol de produits de la forêt (bois, liège).
Sur son patrimoine forestier évalué à 112.500 ha, la wilaya de Bouira compte au moins deux grandes "plaies" caractérisées par un défrichement systématique et la reconversion illégale des parcelles en terrains agricoles.
Il s'agit de la forêt de Beni Mansour, dans la daïra de M'Chedallah, et du canton Belkat, relevant de la daïra de Bordj Okhriss.
À eux seuls, ces deux défrichements dépassent la superficie de 400 ha.
Les efforts de la direction générale des forêts de lancer une politique de reboisements tous azimuts et de financer certaines opérations de bornage, tendant à reconstituer les limites cadastrales de la forêt, se heurtent indéniablement à la faiblesse des services déconcentrés de mettre en œuvre cette politique dans les meilleures conditions, au vu de recul de l'autorité de l'État, du manque de moyens d'intervention, de la caducité des textes législatifs encadrant les activités du secteur et, enfin, de l'absence de moyens de dissuasion, à savoir l'armement.
Il faut aussi rappeler que, parallèlement à la mission de sauvegarder et de développer le patrimoine forestier, le personnel de l'administration est chargé de mettre en œuvre la politique gouvernementale du renouveau rural à travers la formulation, le montage et l'exécution des projets de proximité de développement rural intégré (PPDRI), par lesquels sont réalisés des infrastructures de desserte et de désenclavement (pistes), des ouvrages de mobilisation de l'eau, des travaux de lutte contre l'érosion du sol, des plantations fruitières, la fourniture de modules d'élevage familial (ruches, cuniculture, aviculture,…).
L'action de protestation initiée jeudi dernier sera suivie, le 10 décembre prochain, d'une action similaire sur les mêmes lieux.
Amar Naït Messaoud
Posté Le : 08/12/2014
Posté par : akarENVIRONNEMENT
Photographié par : Photo: depechedekabylie.com ; texte: Amar Naït Messaoud
Source : depechedekabylie.com du samedi 6 déc 2014