c’est la porte du Sahara. Nous n’avions pas eu à la pousser pour y pénétrer, car la nature s’en est bien chargée, ou bien Hercule, selon la légende romaine, qui, d’un coup de pied ferme, fit creuser un passage dans une roche, ou encore selon d’autres croyances c’est le sabre à double lame de Sid Ali qui trancha d’un seul coup la montagne en deux parties distinctes. Si les légendes divergent, la porte, elle, existe, et elle a été baptisée El Kantara, en référence au pont romain érigé pour permettre aux légions et autres passants de faire le voyage du Tell vers le Sahara, des montagnes aux dunes, du froid à la chaleur. Ce bel «édifice» est toujours là pour témoigner de 19 siècles d’histoire. A mi-chemin entre la chaîne enneigée des Aurès et les oasis généreuses du royaume des Zibans, El Kantara constitue un lien inaliénable et indéfectible entre le Nord et le Sud. Ce lien est perceptible à vue d’œil à travers les gorges ciselées au milieu, constituant un passage entre deux montagnes, ouvrant la voie à l’échange, au brassage et à la différence. Entre deux paysages, deux formations géologiques que sont le Tell et le Sud, se font face. Tel un arbitre dans un duel, les gorges d’El Kantara sont au milieu de deux climats. Tout dépend de la où vous vous mettez et de là où se dirige votre regard, tantôt vous avez le sud qui vous lance des pics de chaleur venant d’un décor saharien aux couleurs ocre et orange, et tantôt voilà que le mont des Aurès soufflant tel Eole des vents de fraîcheur et miroitant le tapis verdoyant du printemps. C’est à travers ce passage que les colons français ont tracé une voie ferrée venant de Batna et atteignant les gorges d’El Kantara pour enfin accéder à la fastueuse reine des Zibans, Biskra. Dans son ouvrage Au pays des Palmiers, Biskra, édité en 1897, l’auteur, Felix Hautfort rapporte ceci : «On conte que les conquérants (colonisateurs) s’arrêtèrent aux gorges d’El Kantara et que, muets d’admiration devant le panorama du désert, ils écoutèrent, tête nue, l’hymne national; pour la première fois, les musiques jetaient à la plaine sans échos». Nul étonnement à cette réaction, car tout visiteur se doit ou se voit avoir cet instant, ce moment, ou ce silence admiratif et contemplatif face à une merveille que la nature a façonné au plus grand plaisir du regard. El Kantara était nommé par les romains «le Calceus Herculis» en référence au coup de pied d’Hercule, ils y installèrent un poste militaire et ce fut un des quatre ponts que Rome a construit au monde avec ceux d’Espagne, d’Italie et du Danube. D’autres conquérants s’y sont attardés, comme les Béni-Hillel et les Turcs. Sous Napoléon III, les Français crurent à leur mainmise éternelle sur l’Algérie, ils gravèrent ainsi, en signe de victoire, leurs noms sur les murailles du pont lors de sa restauration. Mais l’histoire a bien voulu rendre à César ce qui lui appartient, et rendit aux Kantris leur pont traversant El Oued El Hai sur 1 097 mètres, ainsi que leur terre, leur pays. Outre le pont d’El Kantara, les Romains ont légué à la région un riche héritage archéologique préservé depuis des siècles grâce aux Kantris.
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Posté Le : 06/10/2014
Posté par : patrimoinealgerie
Source : http://www.dziriya.net