Béjaia - Ighil Ali

Béjaïa - La société civile à Ighil Ali se mobilise pour l’environnement: Opération Adrar propre



Béjaïa - La société civile à Ighil Ali se mobilise pour l’environnement: Opération Adrar propre


Tout a commencé par une discussion entre amis dans un café. Saïd, Hakim, Ali et d’autres discutent à bâtons rompus de la pollution qui frappe l’Adrar, jonché de bouteilles et de canettes et devenu, de ce fait, un endroit mal famé et inaccessible aux familles. L’un d’eux propose de lancer une opération de nettoyage qui trouve tout de suite écho auprès des autres.

«On a d’abord commencé à sensibiliser en utilisant le bouche à oreille, de là, on a décidé de lancer un appel sur les réseaux sociaux à la société civile et à tous ceux qui se sentent concernés par cette situation désastreuse», dit Saïd Ouberzou, président de l’association Green Space.

Nom de code de l’opération: Adrar Propre. Ighil Ali est l’un des plus grands et des plus anciens villages de la région des Ath Abbes, en haute vallée de la Sahel-Soummam. Chef-lieu de commune et de daïra, il regroupe une quinzaine de villages tous situés en montagne pour une population avoisinant les 10.000 âmes.

En fait, ce que la population de la région désigne par le nom d’Adrar est toute la montagne au-dessus du village, Ighil Ali étant situé à près de 600 m d’altitude, Adrar se prolonge en pinèdes, forêts et maquis à des altitudes entre 1.200 à 1.300 m. Le texte adressé à la société civile évoque la «naissance de décharges se propageant anarchiquement», la «dégradation se continue du massif montagneux» et «la détérioration du paysage rural» et conclut par un appel à tous les citoyens soucieux de contribuer de quelque manière que cela soit à cette initiative de salubrité publique.

«Cette action vise en premier lieu à débarrasser Adrar des déchets jonchant le bord des routes, souillant ses beaux paysages et à installer des poubelles le long de la route. L’entame de cette action a été fixée pour le dimanche 9 août 2020».

Il faut souligner que la commune d’Ighil Ali est traversée par la route nationale 106, un axe routier qui a toujours été névralgique car il permet de relier la basse Kabylie et la vallée de la Soummam aux haut plateaux et la ville de Bordj Bou Arreridj, deux grandes régions qui entretiennent des relations commerciales et sociales depuis des temps immémoriaux.

Depuis l’arrivée des bouteilles jetables et l’accentuation du phénomène des boissons alcoolisées à importer, les amateurs de bière ont jeté leur dévolu sur les bords des routes d’Adrar pour picoler en douce. L’incivisme des usagers de la route faisant le reste, en quelques années, la région est devenue un dépotoir repoussant, une décharge publique à ciel ouverts, les déchets s’accumulant le long des routes par monceaux hideux.

Le jour J, une trentaine de bénévoles de tout âge sont au rendez-vous et ils se sont tout de suite retroussés les manches pour entamer ce travail salvateur.

«On savait qu’il ne suffisait pas de nettoyer. Il fallait aussi mettre en place un réseau de poubelles pour permettre aux gens de jeter leurs ordres. Après discussions, on a opté pour des poubelles en dur. On a pensé à mettre en place des panneaux d’indication et des aires de détente et de jeux avec des bancs publics en bois pour les familles. On a donc proposé cette idée et on a commencé à prospecter pour avoir les accords pour les emplacements de ces lieux de détente», dit encore Saïd.

L’opération aura bouclé son deuxième mois dans quelques jours sans jamais faiblir. Bien au contraire, il y a eu effet boule de neige car beaucoup de bonnes volontés auront adhéré à l’initiative. Il y a les bénévoles qui sont venus écumer les fossés pour ramasser les déchets, ceux qui ont offert des camions, des tracteurs et des engins pour évacuer les montagnes de détritus, ceux qui ont offert des matériaux de construction pour les niches appelées à servir de poubelles, ceux qui ont offert leurs bras de maçons ou d’ouvriers pour les construire et ceux qui ont directement donné de l’argent ou une aide matérielle quelconque. Un bel élan de solidarité et d’entraide.

Toute cette initiative se déroulait, bien évidement, dans une bonne ambiance conviviale et fraternelle, ce qui a permis quelque peu de faire oublier des tâches aussi ingrates que pénibles et par moment même dangereuses du fait de certains produits toxiques jetés par des inconscients.

Les citoyens vivant en Europe n’ont pas été en reste. Des quêtes d’argent ont été organisées et des fonds ont été envoyés pour soutenir financièrement l’initiative.

«Grâce à la générosité de tous, nous avons pu collecter des sommes qui nous ont permis de mener à bien cette opération multiple qui consiste à nettoyer Adrar, à mettre en place des poubelles et à envisager de créer des aires de détente familiales», dit Ali.

Jusqu’au jour d’aujourd’hui, plus de 300 camions de déchets auront été collectés et évacués. Parallèlement, des dizaines de poubelles en dur ont été construites ou sont entrain de l’être. Des panneaux invitant les usagers de la route à ne pas jeter leurs déchets et à utiliser les niches construites à cet effet ont également été plantés tout le long de la route. Au final, l’opération Adrar Propre aura été une très belle réussite, une leçon de citoyenneté et un exemple à suivre en matière de protection de l’environnement et de la nature.

En l’absence flagrante des collectivités locales dans la gestion des déchets ménagers, il faut croire que le réveil de la société civile constitue pour le moment un palliatif et une solution au problème qui empoisonne toute la région et tout le pays.



Photo: Une des niches en dur, destinées à accueillir les déchets des automobilistes et des riverains (Photo: el watan)

Djamel Alilat


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