Béjaia - Patrimoine Architectural et Immobilier

Aokas (Béjaïa) - Le château de la Comtesse renaît



Aokas (Béjaïa) -  Le château de la Comtesse renaît




Véritable joyau de l’architecture hérité de l’ère coloniale, ledit château se situe en bordure de la RN9, à l’entrée ouest de la ville d’Aokas, à 20 km à l’est de Béjaïa.

Au pied de la mythique montagne de Yemma Tadrarth et du massif verdoyant alentour, le château déploie toute sa splendeur en face de la grande bleue. Chef-d’œuvre de l’architecture haussmannienne reconnaissable à ses motifs, ses arcades, sa coupole et sa toiture en ardoise, le château est érigé sur un rempart en pierre, occupant une superficie totale de près de 6.000 mètres carrés.

Il dispose d’un bâtiment principal sur trois niveaux dont le rez-de-chaussée (195 m²), composé de trois chambres, un hall de réception et un living-room, et de trois bâtiments annexes sur la partie postérieure. L’édifice principal donne sur la route et un vaste terrain agricole qui s’étend jusqu’à la mer.

Sa devanture en colonnes cylindriques peintes en blanc éclatant, ses ouvertures en arcades et ses murs en pierres grisâtres surmontés d’une coupole en ardoise offrent aux yeux un tout agréable à regarder. Par sa grâce naturelle, un palmier centenaire planté sur le côté et dont la forme des palmes épouse majestueusement le décor arabesque de l’édifice magnifie la beauté du tableau. Hélas, par insuffisance d’archives et de témoignages, le château n’a pas tout livré sur son passé.

Ni l’APC d’Aokas ni la DJS, qui a repris le château, ne se disent en possession de l’historique anté-indépendance du château.

Pour l’amour d’une Comtesse

Selon le peu d’informations recueillies, ce serait un militaire français, le général Poisy, qui l’aurait construit entre 1870 et 1890, comme manoir veillant sur un vaste domaine viticole. Le militaire l’aurait baptisé du nom de château de la Comtesse en signe d’affection et d’amour pour son épouse, une femme algérienne originaire de Béjaïa, qui aurait refusé initialement que l’édifice porte son nom. Le motif que les témoignages attribuent à ce refus serait que l’épouse ne voulait pas d’embrouilles avec la famille de son époux.

A la mort du militaire qui n’avait pas laissé de progéniture, le domaine avait changé de mains au profit d’un certain Boucheron, un grand propriétaire de vignobles et producteur de crus.

Voilà tout ce dont on dispose comme informations sur cette période de la vie du château de la Comtesse. Après l’indépendance, en revanche, son histoire est bien connue.

C’est celle de l’abandon la plupart du temps jusqu’à une date récente. A en croire un habitant d’Aokas, le château de la comtesse a servi d’étable et de poulailler à un fermier du coin jusqu’à sa reprise par l’APC d’Aokas en 1986. Par la suite, l’édifice a été concédé à un particulier qui en avait fait un bar-restaurant pendant des années, avant que son affaire ne tombe à l’eau suite à un crime qui est survenu sur les lieux. Le château replonge aussitôt dans l’abandon.

Entre-temps, il n’arrête pas de faire l’objet de convoitises de toutes parts. Plusieurs demandes d’exploitation ont été formulées par des particuliers et des organismes étatiques pour son exploitation, qui pour en faire une école de tourisme, qui pour le transformer en hôtel, qui… Mais ce n’est que récemment qu’un transfert a eu lieu au bénéfice de la direction de la jeunesse et des sports (DJS) qui veut en faire une auberge de jeunes.

Pour rendre le château viable, celle-ci s’est engagée dans des travaux de réhabilitation laborieux et coûteux.

Lettres de noblesse

Un rapport d’expertise du CTC-est datant de 2006 a relevé des dégradations importantes, à savoir des fissures sur les murs porteurs et les planchers, de la rouille sur les parties métalliques, l’altération de la boiserie, l’arrachement des tuiles en ardoise au niveau de la toiture et la dégradation des faux plafonds et de leurs pièces en boiserie. Le chantier est colossal. Il a fallu la modique somme de près de 243 millions de dinars et des années de travaux, avec le souci permanent de préserver le cachet orignal du site, pour rendre son éclat d’antan au château de la Comtesse.

«Nous avons été intransigeants avec l’entreprise réalisatrice sur le respect de l’aspect initial du château de la Comtesse. Par exemple, pour les bâtiments annexes qui étaient irrécupérables tant ils étaient fortement dégradés, nous les avons reconstruits tels qu’ils étaient à l’origine. C’est le cas aussi de la toiture pour laquelle l’ardoise a été importée de l’étranger», se félicite un employé de la DJS.

La réhabilitation s’est axée sur la refonte complète des blocs annexes, les VRD, la clôture, les espaces verts, l’éclairage extérieur, les bâches à eau et fosses septiques, le chauffage central, etc.

Selon notre interlocuteur, le taux d’avancement des travaux est à 95% ; il ne reste, dit-il, que les dernières retouches et l’installation de l’immobilier avant l’ouverture de l’auberge prévue pour septembre, indique-t-on.

Le château de la Comtesse renaît. Après des décennies d’abandon et de vocations aussi drôles qu’ingrates comme pour conjurer son passé de manoir viticole, il retrouve ses lettres de noblesse en ouvrant ses portes aux jeunes.

Mohand Hamed-Khodja



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