Parler du patrimoine musical algérien prendrait beaucoup de temps afin d’explorer son immensité et sa profondeur.
A chaque région ses folklores, son histoire et ses rituels qui continuent à donner une saveur artistique au passé de chaque ville.
Au-delà de la chaîne de l’Atlas saharien, derrière le Djebel Béchar, véritable muraille séparant la steppe du Sahara, la région de la Saoura au Sud- Ouest de l’Algérie est un immense plateau désertique où poussent uniquement quelques plantes adaptées à la rudesse du climat. Cette région exceptionnelle recèle un riche patrimoine musical qui a fait l’objet d’un ouvrage édité lors de la manifestation «Tlemcen, capitale de la culture islamique». Véritable continent culturel, l’Algérie compte dans son mur culturel des graffitis riches et variés où chaque vers de chaque poème témoigne du passage de plusieurs civilisations, commerçants, caravanes et passagers, ayant cloué naguère le sol de ce gigantesque pays. Si on trouve des bribes d’épopées de jadis dans les musiques des villes côtières, de la venue des Arabes et des dynasties de la fin de l’époque médiévale sur les Hauts-Plateaux, des reines touaregs à l’extrême sud, la région de la Saoura, empreinte de l’africanité de l’Algérie, porte dans son noyau poétique le passage des principales routes caravanières reliant le piémont de l’Atlas Saharien aux oasis du Touat-Gourara et, au-delà, au mythique pays du Soudan. On y trouve le houbi des Dhwi mni et El maya des Gh’nanma, qui continuent à entretenir le souvenir de leurs lointaines origines en chantant sur les rythmes de leurs ancêtres. Ces musiques, chants et danses ne sont pas l’apanage des tribus d’origine arabe implantées dans la Saoura, les communautés berbères les pratiquent également, comme le témoigne le haidous, une danse pratiquée par les populations berbères de l’Ouest algérien et de l’Atlas marocain. Les sonorités de ces chants sont un océan de créativité et de virtuosité, d’une profonde spiritualité et d’une osmose atypique des conditions climatiques de la région. Bien plus qu’une musique ou un folklore, le genre diwan est une encyclopédie de rituels, de croyances, de spiritualité et de méditation qui enchantent la région bécharoise et bien d’autres régions, en continuant à nous faire entendre les gémissements et les complaintes de ces cohortes d’esclaves, échoués aux marches du désert après de longues traversées.
Une réunion en société, une communauté dans laquelle se retrouvent les Noirs du Maghreb, originaires de Bilad Essoudane, les gnaouas assurent la production d’une musique envoûtante, parfois conservatrice avec le mythique guembri, le karkabou et le tbel, et à d’autres moments ouverte sur d’autres tendances musicales avec notamment des groupes qui activent dans l’Algérois. Le zeffani pour sa part perdure et témoigne d’un art séculaire grâce à l’initiative de Lella Fatna, héritière d’une famille d’artistes qui continue à immortaliser ce genre musical que l’on croyait disparu. Carrefour des cultures du Maghreb, du Sahel et de son ouverture sur l’Afrique, El Ferda est l’histoire d’une rencontre entre une vieille zaouiya et l’incroyable brassage ethnique d’une mine de charbon. Une musique relié à un instrument de percussion éponyme assuré par un groupe éponyme qui assure la continuité de ce genre ouvert à d’autres tendances musicales. En effet, une palette de sonorités gnaoua, houaza, algérois, de melhoun et de chants liturgiques, un chant d’écoute et de recueillement, mais aussi un chant de la danse jusqu’à la transe. La musique de la Saoura, tantôt lente et langoureuse, tantôt vive et chaloupée, thérapie d’âme parfois et moment d’extase spirituel, prend des formes festives et enchante le cœur et l’esprit, tout comme les portes du Sahara qui sont les havres de paix de l’Algérie.
*Ouvrage édité par le ministère de la Culture dans le cadre de la manifestation « Tlemcen, capitale de la culture islamique 2011» In Département patrimoine immatériel et chorégraphie.
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Posté Le : 06/09/2017
Posté par : patrimoinealgerie
Ecrit par : Kader Bentounés
Source : elmoudjahid.com