Un golfe presque inconnu, parmi les milles golfes de la pittoresque, de l'étrange terre algérienne.
Des montagnes, plongeant à pic dans la mer, amorcent la baie ; les rives, longtemps, sont déchiquetées, les roches, superposées, les forets de chêne-liège, dense et désert. Puis une dernière montagne forme toile-de-fond, à l'ouest, tandis qu'en face d'elle, la mer ouvre grand l'horizon, sur le soleil levant.
Couché sur les dernières pentes de la montagne proche, qui s'amenuise en coteaux couverts d'oliviers, le village se pelotonne, au nord, dans un incroyable nid de verdure tropicale ! Canas géants, catalpas, bananiers, ficus, acacias, sycomores, poivriers de ceylan, palmiers des malabars -cela nous rappelles plutôt les petites iles Seychelles, ou la flore des Indes atteste l'origine asiatique de ces ilots semblant détachés - croirait le profane - du continent africain.
Mais quel caprice de la nature ou des hommes a rassemblé ici des sujets si divers et de si lointaine origine ? A l'orée du village, paisible, et combien secourable, une exquise petite église semble dire - à l'encontre de l'inscription du Dante aux portes des enfers : « Gardez toute espérance, vous qui entrez… » Enfin, ce nid de verdure restreint et l'allure accidentelle, est circonscrit, au nord-est, par des rochers de granit, transformés aujourd'hui en carrières à pavés, allant fermer le golfe par un cap aride et magnifique.
Commerçants et propriétaires français ; ouvriers et pêcheurs italiens, pour la plupart francisés ; minorité arabe tranquille et courtoise, se partagent la jouissance de cet éden inattendu.
La brise au large atténue, aux jours d'été, les rigueurs du sirocco ;le vent de terre souffle sur ses nuits…Quand l'ombre descend sur les forets profondes, le golfe semble un grand lac endormi sur lequel persistent des parfums d'acacias et de fleurs de poivre, tandis que longtemps, sur sa crête chevelue, émerge le marabout de Sidi Bnoud.
Surgissant au loin de la mer, la lune épand sur tout cela son large sillon-étincelles mystiques et fleurs de féeries…Troublante, mais placide, sa beauté souveraine promène nonchalamment sa traine majestueuse d'un bord à l'autre des rivages en une longue et capricieuse caresse…Seules, les nuits lunaires de Constantinople, des palais du vieux sérail aux konaks du Bosphore, éveillent en elle au fond des mémoires, la magie de leur souvenir..
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Posté Le : 26/08/2009
Posté par : brave
Ecrit par : Marcelle Weissen-Szumlanska