Algérie

Zone humide de Réghaïa - Sarcelles, flamants, dorades menacés par la pollution urbaine et industrielle



Zone humide de Réghaïa -  Sarcelles, flamants, dorades menacés par la pollution urbaine et industrielle




Sarcelle, flamant, renard famélique et autres loup et dorade de la réserve naturelle de Réghaïa (est d'Alger) sont directement menacés par une urbanisation envahissante, incontrôlée, et les rejets des eaux toxiques, notamment des unités industrielles locales sur les oueds d'El-Biar et de Réghaïa, qui alimentent le lac éponyme.

Classée "site Ramsar d’importance internationale en juin 2003", la zone humide de Réghaïa et son lac de 75 hectares étouffent, et ses eaux sont de plus en plus souillées par les rejets industriels et domestiques.

La détérioration continue de la qualité de l’eau du lac par les déversements de matières solides, chimiques et des rejets des eaux usées des villes menace de disparition plusieurs espèces animales et végétales protégées, et constitue une grande inquiétude, selon la direction du centre cynégétique de Réghaïa.

"La plus grande contrainte à la préservation du lac de Réghaïa, c’est la détérioration du plan d’eau par les déversement des oueds El-Biar et Réghaïa, pollués par les eaux usées et chargés de matières chimiques. Des oueds qui ne sont pas raccordés à la station d’épuration de la ville", explique à l’APS, le directeur du centre, Abdelghani Boumessaoud.

En souvenir des marécages de la Mitidja, "le lac de Réghaïa est le dernier vestige des marécages de la Mitidja", se plaît à rappeler M. Boumessaoud, pour mieux souligner l'importance écologique du plan d'eau et la nécessité de tout faire pour le préserver en tant que "réserve naturelle".

Cette mission est d’autant plus nécessaire que le "dernier vestige de la Mitidja" accueille trois espèces d’oiseau d’eau mondialement menacées de disparition, à savoir la Sarcelle marbrée, le Fuligule nyroca et l’Erismature à tête blanche qui niche à Réghaïa.

Et ce n’est pas tout: 3.000 oiseaux d’eau fréquentent mensuellement le lac qui accueille en moyenne 47 espèces locales et migratrices d'oiseaux chaque année, selon les statistiques du centre cynégétique, qui enregistre une fréquentation de plus en plus grande du site par les oiseaux d’eau migrateurs.

Composé de cinq écosystèmes (marin, marécageux, dunaire, lacustre et forestier), le lac de Réghaïa s’étend sur une superficie de 1.575 hectares: 900 ha en mer, 600 ha de forêt et dune, en plus d’un plan d’eau douce de 75 ha.

Il est riche d’une faune constituée de 206 espèces d’oiseaux (flamant rose, canard souchet, col vert, bécassine, etc), de 21 espèces de mammifères (chacal, genette, sanglier, renard famélique, etc.), de 12 espèces de poissons, de 170 espèces d’invertébrés (insectes, arachnides... ) et de 71 espèces de reptiles et d’amphibiens.

Sa richesse floristique est composée de 233 espèces de plantes inventoriées et de 25 espèces de flore marine.

En matière d’éducation environnementale, le centre cynégétique de Réghaïa organise des sorties pédagogiques et guidées dans le lac au profit des écoliers, des étudiants et des adhérents des différentes associations.

D’autre part, le centre a signé depuis 2008 quatre conventions-cadres avec les universités Houari-Boumediene (Alger), Mouloud-Mammeri (Tizi Ouzou), M’hamed-Bouguerra (Boumerdès) et l’École nationale supérieure d’Agronomie (ENSA, El-Harrach) pour le développement de la recherche scientifique dans le domaine de la préservation des écosystèmes.

"Le centre accueille des étudiants inscrits dans ces universités pour des thèses d’ingéniorat ou de doctorat dans le domaine de l’environnement. Un chalet, doté de toutes les commodités, y compris des chambres pour 20 personnes, est mis à leur disposition. En contrepartie, le centre bénéficie des résultats de leurs recherches", explique M. Boumessaoud.

En Algérie, 1.451 zones humides sont recensées, dont 762 naturelles et 689 artificielles. 50 d’entre elles sont des sites d’importance internationale classés sur la liste de la convention Ramsar.

La pollution menace, mais, cette image d'une nature vivante, que voudrait bien croquer un dessinateur, avec des figures d'un envol bigarré de milliers d'oiseaux, est menacée par la pollution industrielle et urbaine.

Le centre de Réghaïa a saisi, en octobre 2013, la Direction générale des forêts (DGF) et la wilaya d’Alger sur la nécessité et l’urgence de trouver une solution à la pollution de plus en plus accélérée du lac de Réghaïa, a indiqué M, Benmessaoud.

La démarche a immédiatement abouti puisque, note-t-il, le wali délégué de la circonscription administrative de Rouiba a convoqué, durant le même mois, toutes les parties concernées à une séance de travail pour examiner la question de la pollution des eaux du lac de Réghaïa.

"À la suite de cette séance de travail, il a été décidé d’effectuer des prélèvements pour mesurer le degré de pollution des eaux du lac et d'identifier son origine avant de prendre les mesures qui s’imposent", indique M. Boumessaoud.

Même s’il s’attend à ce que des mesures administratives soient prises à l’encontre de certaines entreprises industrielles qui continuent de déverser des déchets toxiques dans les deux oueds qui alimentent le lac de Réghaïa, il n’en demeure pas moins qu’"aucune action n’est possible pour le moment, avant que les résultats des prélèvements ne soient connus".

Par ailleurs, la direction du centre cynégétique place ses espoirs dans le changement de statut du lac qui lui permettra de mettre en place une "gestion intégrée" du site.

Ce classement, qui concerne les 1.541 zones humides recensées en Algérie, doit être fait par la commission nationale des aires protégées, prévue par la loi depuis 2011, mais qui n’est toujours pas opérationnelle, explique-t-il.

La production, la promotion, le repeuplement et la recherche dans le domaine cynégétique sont les principales missions assignées par ailleurs au centre cynégétique de Réghaïa à sa création en janvier 1983, rappelle M. Boumessaoud, soulignant que la production consiste en un élevage de gibier d’eau destiné au repeuplement des plans d’eau.



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