Algérie

Youcef Yahia: " un animateur n'est pas journaliste"



Youcef Yahia anime une émission sur l'ENTV, et la matinale de la radio "Jil FM". A l'occasion du 3 mai, journée mondiale pour la liberté de la presse, il revient pour la Rédaction Digitale de "Liberté" (#RDL) sur son parcours et sur sa vision du journalisme.
Youcef Yahia, nous vous avons découvert à la radio et aujourd'hui vous exercez aussi à la télévision, parlez nous de votre carrière '
Je suis un jeune algérien, j'ai fait deux ans d'études à l'USTHB, ensuite j'ai fait une formation dans le domaine du journalisme sportif où j'ai découvert mon talent ce qui m'a poussé à faire un transfert vers ITFC où j'ai fait 5 années couronnées par un master en audiovisuel.
Aujourd'hui si j'ai l'occasion de continuer mes études je le ferai sans hésitation. J'estime qu'un journaliste doit être toujours curieux et avoir envie d'apprendre encore plus.
J'ai commencé à m'intéresser à ce domaine à l'âge de 19 ans et depuis j'ai pu occuper plusieurs postes. D'abord à la radio puis à la télévision, dont assistant de production, chargé de production, assistant de rédacteur chef, journaliste de terrain, journaliste reporteur, rédacteur dans des émissions télévisées.
Mon parcours à la télévision a commencé avec la chaine TV, El Djazairia où j'ai travaillé dans le journal télé, animateur et chroniqueur dans des émissions de sport. Ensuite j'ai rejoins l'ENTV et j'y suis jusqu'à aujourd'hui. Mon travail à l'audiovisuel ne m'a pas empêché de continuer à travailler à la radio "Jil FM" où je fais, entre autres, la matinale et cela depuis 5 ans.
J'ai aussi été honoré deux fois. La première fois j'ai eu le prix de la meilleure ?uvre radiophonique, un prix accordé par le Ministère de la solidarité pour une émission que je présentais à Jil FM. La deuxième fois, j'ai décroché le 1er Prix radio de l'UNICEF pour une émission de lutte contre la violence à l'égard des enfants.
Qu'est ce que le journalisme pour vous '
Le journalisme est un métier noble.C'est un monde dans le quel nous échangeons et transmettons des informations. C'est aussi le trait d'union entre l'émetteur de l'information et son récepteur. Ce qui fait que c'est un métier difficile. Le journaliste doit être conscient de l'importance de son rôle et son impact sur la société.
Sa mission principale est de transmettre l'information fidèlement et objectivement au peuple. Exception faites pour certains cas comme les émissions de débats, certains types d'articles et autres, où ces critères ne sont pas exigés.
On dit aussi que c'est le quatrième pouvoir mais, à mon sens, ça ne l'est que rarement et dans des conditions bien précises.
Selon vous, quels sont les problèmes que subissent les journalistes en Algérie '
Le journaliste algérien fait face à plusieurs problèmes lors de l'exercice de son métier, le plus important est le manque des moyens ce qui limite le journaliste, absence de protection du journaliste notamment quand il fait son travail sur terrain, problèmes affrontés au sein des entreprises qui l'emploie. Il y a aussi l'oppression, donc absence de liberté d'expression. Il arrive même que certains journalistes subissent des menaces, suite à des articles rédigés ou à une information transmise.
Il est important de signaler que certains journalistes ne connaissent même pas leurs droits et devoirs ce qui les poussent à accepter de bosser sans contrat de travail, avec des salaires minables ce qui engendre des conditions de travail lamentables où l'employeur les menace continuellement de licenciement abusif. Tous ces problèmes nous poussent à se demander quel est le rôle du syndicat dans la protection du journaliste.
Pensez vous que le journaliste algérien est libre dans son métier '
Il y a une certaine liberté mais à mon avis ça reste limité car il y'a des sujets que nous ne pouvons pas aborder, le cas contraire nous risquons de mettre fin à notre carrière professionnel et parfois cela a de mauvaise conséquences sur notre vie privée, or le journaliste a besoin d'avoir toute sa liberté pour bien effectuer son métier.
Les salaires dans la presse sont-ils intéressants'
Non, pas du tout. Les salaires dans notre profession sont très bas et vu tous les efforts fournis par les journalistes, leurs niveaux d'études et surtout les risques qu'ils encourent tous les jours afin d'accomplir ses missions, les journalistes algériens méritent d'avoir un bon salaire. Je tiens à ajouter que des études britanniques ont démontré que le journalisme est parmi les métiers les plus difficiles au monde.
Que ce qu'il faut pour assainir la profession en Algérie'
Je suis persuadé que le seul responsable de l'image et la réputation de notre profession est bien celui qui l'exerce, c'est-à-dire, le journaliste. Si le journalisme aujourd'hui n'a plus sa place dans la société algérienne et qu'il a perdu la confiance du peuple c'est bien à cause de certains pseudo-journalistes qui salissent le métier. Par exemple, pendant la décennie noire le journaliste avait la confiance totale du peuple.
A mon avis, c'est aux journalistes, les vrais, ceux qui aiment ce qu'ils font, de redonner une bonne image à ce métier qui est aussi l'image du pays. Parce qu'un étranger se donne une idée de l'Algérie grâce à ce qu'il voit à la télévision, lit dans les journaux...
Je vous donne un exemple concret, certains collègues animateurs se proclament journalistes et se font même inviter sur des plateaux pour faire des analyses journalistiques alors qu'il ne sont pas qualifiés pour le faire puisque ils n'ont pas fait d'études en journalisme et n'ont fait aucune formation dans le domaine. Je reste persuadé qu'un animateur n'est pas journaliste, à moins qu'ils aient fait des études dans le domaine, dans ce cas là il est journaliste- animateur.
Un animateur a pour rôle de présenter et gérer des émissions sur des plateaux ; malheureusement, certains collègues font encore l'amalgame entre les deux métiers. Je tiens à signaler que l'école algérienne a formé de très grands journalistes, qui ont fait d'excellentes carrières, que ça soit en Algérie ou à l'étranger. Donc le problème ne réside pas dans la formation mais dans l'organisation du métier.
Pensez vous que le journal papier va disparaitre'
Pas pour l'instant. C'est vrai qu'il y a de moins en moins de lecteurs de journaux papiers notamment au profit des réseaux sociaux mais il reste toujours des amateurs de la presse écrite au même titre que les livres.
Je pense que les responsables de la presse papier doivent penser à aller vers l'analyse et ne plus se contenter de transmettre simplement l'information. Cela donnera plus de valeur à l'information transmise et permettra au journal de se démarquer des réseaux sociaux et attirer plus de lecteurs.
Lisez-vous encore la presse écrite '
Oui. Vu mon travail à la radio je suis amener à faire des revues de presse tous les jours et puis, j'aime bien lire des articles de certains journalistes chevronnés qui m'apprennent beaucoup de choses, à travers leurs analyses, qu'on ne peut pas trouver ailleurs.
Avez-vous un message pour les journalistes '
Je voudrais adresser un message important à tous les journalistes, nous devons être solidaires et protéger notre métier de ces intrus qui le salissent et lui redonner ainsi la valeur qu'il mérite, et cela en faisant du vrai journalisme et en portant l'amour de ce métier dans son c?ur. Nous devons toujours nous souvenir qu'il y a beaucoup de personnes qui ont sacrifié leurs vie pour ce métier tel que Smail Yefsah et tant d'autres grands journalistes. Rien que pour cela nous devons travailler donner une bonne image du journalisme Algérien.

Entretien réalisé
par
Mehdia MERAH & Mékioussa LALMAS
Partenariat Réd-DIG-"Liberté"(#RDL)/ INJAZ El Djazair Alumni


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