Béni- Haoua, sur la côte ouest entre Cherchell et Ténès, paisiblement assoupie au milieu des pinèdes, les pieds plongés dans des criques majestueuses, continue de nourrir de fabuleuses légendes, le soir venu autour d'un feu de camp sur la grande plage du village.
Le temps d'un été et les anciens souvenirs des gens de Béni-Haoua sont de nouveau exigés par les estivants, curieux de connaître le passé singulier de la région. Mais, surtout, la légende d'un voilier qui a échoué sur la grande plage et dont les récits et témoignages meublent les fraîches soirées estivales du village.
Cette année, les estivants à Béni-Haoua sont majoritairement des Algérois, d'El Harrach notamment, mais également des gens de Blida qui y possèdent de coquettes maisons agrémentées de figuiers et de vignes de muscat. Et, pour ne pas déroger à la tradition, l'histoire particulière du banel, un trois mats sorti un mois d'avril de l'année 1802 du port français de Toulon, cinglant toutes voiles dehors vers les Amériques, hante les campements des estivants. Le trois mats, pris dans une violente tempête, sera dévié de sa route et ira s'échouer sur la baie des Souahlias, prés de Béni-Haoua, à une quarantaine de kilomètres de la ville de Ténès. Pour les passagers du "Banel", c'est le début d'une autre aventure.
A cette époque, l'Algérie étant sous régence ottomane, les côtes de la baie des Souahlias et de Doumia étaient désertes, hormis celles près de Ténès où les bateaux napolitains, français ou britanniques de passage devaient payer un droit de péage. Pas âme qui vive jusqu'à Ténès.Pourtant, les secours viendront de la montagne, où vivait une petite communauté berbère sur les contreforts des montagnes de Bissa. Aujourd'hui encore, témoin du destin tragique de cette expédition vers les Amériques, l'ancre du ''Banel'' (El Fès en langage local) orne toujours, immense et rouillé, l'une des criques de Béni-Haoua, sur la route vers Ténès. Les naufragés, dont sept religieuses, seront secourus par les populations qui habitaient les montagnes environnantes. Très vite, ils s'intègrent parmi la population berbère locale. Les sept religieuses, selon la légende, auraient surtout pris en charge sur le plan sanitaire les besoins des populations locales, au point que de tous les naufragés du Banel, il ne reste jusqu'à présent que le souvenir des sept soeurs, enterrées prés du village et que le touriste de passage peut visiter. Pourtant, c'est l'une d'elles, celle que les gens de Béni-Haoua et des villages avoisinants appellent encore "Yemma Binette", qui fera l'histoire de cette région nichée entre criques sauvages et forêts de pinèdes, de romarins et de figuiers.
A la mort de "La mère Binette", qui serait "la seule à mourir religieuse" selon certaines versions du récit de ce naufrage, un mausolée a été construitet les sept religieuses y ont été enterrées. Le mausolée, avec les sept tombes orientées vers La Mecque, existe toujours, malgré quelques prédations. Entre-temps, la mémoire des sept religieuses s'était déjà confondue avec l'histoire sociale et culturelle de la région, au point que des "ziaras" s'effectuaient jusqu'à une date récente à la tombe de "Yemmaa Binette".
Un film a été produit raconte ce naufrage: Le Banel, coproduit par ENTV-Algérie et France 3 Méditerranée.
Posté Le : 18/06/2007
Posté par : hichem
Ecrit par : Adapté de l'article de M'hamed Houaoura (Journaliste au quotidien d'Alger El-Watan.)
Source : damous.ifrance.com