Algérie

Yasmina Khadra : Ce que le jour doit à la nuit


C'est peut-être le livre qu'on attendait de Yasmina Khadra. Une 'uvre d'une rare puissance, un flot ininterrompu d'humanisme, de réconciliation et de fraternité et aussi un très beau roman d'amour. Dans une Algérie pauvre, famélique des années 30, où seuls les gros colons avaient belle vie, la population algérienne se terrait dans des gourbis et ghettos. Entre les deux, des petits blancs et une bourgeoisie locale. Yasmina Khadra convoque l'histoire. Dans cette Algérie coloniale, un groupe d'amis, au-delà des classes sociales, se lie d'amitié à Rio Salado (El Maleh). Et Emilie, la Nedjma. La princesse dont sont amoureux tous les garçons. Quand les petites histoires rejoignent l'histoire, forcément, les parcours sont douloureux, déchirants. On n'écrit pas nécessairement son destin, Jonas (Younès) pas plus que les autres. Comme la plupart des personnages de Yasmina Khadra, Jonas est un antihéros, un peu lâche, un peu courageux. Humain, avec ses paradoxes, ses complexes, désespérément humain. Et quand l'amour frappe à sa porte, il se calfeutre chez lui. Parce qu'il aime les femmes, parce qu'il respecte la femme, parce qu'il est aussi prisonnier de sa personne, de son passé.Quand la guerre de libération ébranle les certitudes, Jonas ne prend pas les armes, ne libère pas Rio Salado à lui tout seul. Plus Woody Allen que Rambo, un être humain, pas un super héros. Parce que l'Algérie était un pays pour deux peuples, deux communautés. Parce qu'il avait un pied dans chacune d'elles. Aucun manichéisme. Y avait-il une place pour les deux communautés ' Sûrement, mais pas avec l'ordre ancien, colonial. La pyramide sociale était trop injuste pour que le système colonial perdure. Les routes et les hôpitaux ne remplacent pas la dignité, le respect de soi, la liberté. Les colons plantaient les graines de l'insurrection dans leurs vergers. A cause de l'amour d'une femme, à cause de l'amour d'un pays (perçu différemment), le groupe d'amis se disloque. Les garçons sont devenus adultes. La guerre les a vieillis prématurément. A l'heure de la séparation, des départs définitifs, les adieux ne sont que plus difficiles. Y a-t-il un coupable, des coupables ' Ceux qui restent pleurent des amis perdus, ceux qui partent ne se consolent pas d'un pays abandonné. Et Emilie ' Comment l'aimer ' Peut-on arriver à l'oublier ' A aimer au-delà de l'amour ' De la mort ' Yasmina Khadra nous offre une très belle histoire d'amour. Il se joue de nous, se moque des idées figées. Et si la rédemption n'est que le privilège des amoureux ' Yasmina Khadra arrive brillamment à réconcilier les impossibles avec une langue brillante, fluide, personnelle. Une 'uvre majeure.
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