Algérie

Ya Beyrouth



Il n?y a pas pire moment pour une nation que celui où le dialogue devient impossible. En l?espace de quarante-huit heures le Hezbollah a pris le contrôle du Liban et les affrontements entre membres d?une même communauté ne sont que le signe d?une coexistence difficile dont l?Histoire du pays n?a fait que retarder l?échéance. Même communauté mais pas le même destin, pas les mêmes croyances, pas le même projet de société. Peut-être même pas les mêmes amis et les mêmes ennemis. Une fois de plus, le langage des armes l?emporte sur le débat. Les Occidentaux soufflent comme d?habitude le chaud et le froid en rappelant leurs lois de fonctionnement à une machine qui fonctionne différemment. Israël n?est pas loin, l?Iran et la Syrie attendent et les autres arabes se réunissent pour proposer des communiqués aux balles assassines. La mort est revenue certaine qu?elle vaincra, et les infrastructures se font malmener comme si aucun sacrifice n?a été consenti pour la reconstruction de ce pays. Le Liban semble avoir renoué avec son passé de terre sans cesse convoitée, de terrain de guerre de conquérants entre eux, sur un sol neutre en apparence et miné par les traces des affrontements des grands de ce monde qui n?ont laissé à la paix qu?une maigre chance. Et lorsque Amin Maalouf se lance à l?assaut de l?Histoire des arabes, faut-il y lire une simple fresque d?une période ou alors méditer sur les causes d?emprisonnement d?une nation aux valeurs perdues en cours de route vers sa conquête dont on continue à vanter les mérites. Hassan al-Wazan offert en cadeau au pape Léon X par des pirates siciliens qui le surnomma Léon l?Africain par besoin d?intégration en pleine renaissance de l?Occident, nous a-t-il jamais quittés ? Non, si l?on considère tous les Hassan al-Wazan dont l?Occident se sert aujourd?hui pour maintenir les flammes de sa renaissance. Parce que leurs terres brûlent d?un retour qu?ils ne savent plus faire et que leurs gouvernants ne servent plus qu?à s?asseoir sur leur honneur.Liban pays, Liban nation, drame continuel de la cécité des temps. Beyrouth pleure à chaque coin de rue, victime de son visage poupon qui offre aux visiteurs de passage ce qu?elle a de plus beau. Elle et ses yeux de biche. Beyrouth vieillie par 5000 ans d?histoire puisée dans les senteurs marines de la Méditerranée à l?Ouest et dans celles des épices de l?Asie à l?Est. Beyrouth épuisée par ses voisins bruyants aux frontières incertaines soumises à un ordre inhabituel. Terre «du lait et du miel» selon la Bible, pays de l?Alphabet et du cèdre, elle ne sait plus s?écrire sans le sang, sans se plaindre. Quartier contre quartier, ville contre ville, ordre religieux contre ordre religieux, pouvoir amalgamé contre opposition tout aussi amalgamée, argent contre argent, la guerre s?est installée et ses prétextes sont aussi nombreux que les dollars qui y circulent. Que les armes qui s?y cachent. Que la présence occidentale à peine voilée dans les accents des uns et des autres. Dans les langages à décoder en un difficile exercice de choisir une seule langue, celle de la paix. Celle qui libère les petites parcelles même insignifiantes pour la géographie juste pour affirmer que les historiens n?ont pas perdu leur temps à errer de livre en livre. Qui est arrivé le premier sur cette terre ? Peu importe. Qui restera en dernier ? Là est la question qui ne peut avoir qu?une seule réponse: tous ou personne. D?ailleurs qui est arrivé en premier sur n?importe quelle terre ? Qui a commencé le premier dans cette guerre on ne peut plus civile pour que les plus forts du soutien de l?Occident réclament aujourd?hui le dialogue ? Ou s?en réclament ? Le silence des arabes laissant aux puissances du monde le droit de réglementer la circulation de leurs propres capitaux, pris en flagrant délit de vantardise d?un passé qui ne reviendra pas, en tous cas pas avec la forme sous laquelle il est venu. L?avenir quant à lui demeurera presque certain en l?état actuel des choses.Si le Liban tombe, la Palestine tombera et toute idée d?un Etat palestinien ne sera qu?une succession de bombes. Que restera-t-il alors pour fédérer les arabes ? La colère de leurs peuples qui gronde déjà depuis la chute de Grenade et l?image de la capture de Hassan al-Wazan par des pirates siciliens. Tout comme a été capturée l?Andalousie un certain 1492 en plein sommeil d?une civilisation qui ne sert plus de ressort aux générations actuelles. Une civilisation riche et pauvre. Riche par les valeurs qu?elle a offertes aux livres du monde. Pauvre pour s?être trop attardée sur l?odeur du jasmin et les sons de la guitare. Beyrouth s?accroche à ses rochers et laisse les plaines aux oiseaux qui ne peuvent voler et qui se suffisent à picorer quelques graines tombées des épis de blé sur un sol assoiffé d?amour pendant que chacun dit en avoir plus que l?autre.
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