Algérie

Vu à la télé


Vu à la télé
Le devenir législatif des nouvelles télés privées constitue un véritable casse-tête pour le ministère de la Communication. De droit étranger, ces dernières restent pratiquement incontrôlables sur le plan juridique et ne peuvent donc se conformer à la législation algérienne que si elles changent carrément de statut. Née avec la création de ces médias il y a trois ans, l'aberration juridique est toujours en vigueur et ne semble pas trouver de solution. Pourquoi les chaînes privées ne s'alignent-elles pas sur les textes de loi algérienne 'En fait, posé en ces termes le problème de leur reconversion paraît simple, mais en réalité il est beaucoup plus complexe qu'on l'imagine. Pour la plupart des responsables de ces télés qui ne sont pas foncièrement hostiles au changement de statut, la difficulté provient du fait que les dispositions contenues dans la loi adoptée dans le cadre de l'ouverture de l'audiovisuel ne favorisent pas un vrai «transfert» de compétences telles qu'elles sont mises en fonction actuellement.Et pour cause ! Les télévisions privées veulent garder leur label dans un contexte d'indépendance et leur mode de production sans perdre au change. Ce qui équivaut à dire qu'une télé, par exemple, qui a investi de l'argent et son savoir-faire professionnel et technique pour intégrer la catégorie de chaîne généraliste a du mal à accepter d'être «déclassée» et de se transformer du jour au lendemain en chaîne thématique pour les besoins d'un cahier de charges conçu non sans arrière-pensées politiques.Si on suit le raisonnement de nos législateurs qui ont mis toute leur intelligence et leur génie dans le jeu de l'obstruction pour éviter que l'ouverture de l'audiovisuel ne déborde sur une activité dite subversive, il n'y aurait dans le nouveau paysage télévisuel que des chaînes qui traiteraient de la nature, de cuisine, de sport, pour laisser les thèmes sérieux ? notamment de société et politiques ? aux médias publics dont on connaît à l'avance l'usage qu'ils en feraient.Pour être plus terre à terre, c'est faute de vouloir démocratiser réellement l'activité télévisuelle que les instances dirigeantes se sont retrouvées dans cette impasse. A force d'actionner les verrous à travers les méandres de la législation bien pensée pour protéger le discours officiel des tonalités discordantes qui risquaient de le parasiter, voire de le submerger, le Pouvoir politique a donc pris sur lui la responsabilité de désagréger dès sa naissance un champ médiatique promu pourtant pour être l'un des vecteurs les plus fantastiques du développement de la liberté d'expression dans notre pays.A défaut d'aller dans le sens de l'histoire avec la détermination politique de donner à la société des moyens de communication en rapport avec son temps et ses aspirations, on a choisi le mode du louvoiement et des pratiques velléitaires pour tenter de domestiquer un potentiel médiatique faiseur d'opinions en intervenant sur ses points les plus vulnérables. Pour survivre, il faut de l'argent, et pour avoir des ressources suffisantes et régulières qui proviennent à 90% de la publicité il faut faire des «concessions» sur la ligne éditoriale, seule voie rentable pour exister et prétendre à des promotions. On ne vous laisse pas d'autre choix !Il faut rappeler que sur la quarantaine de chaînes privées qui se sont lancées presque à la même période dans l'aventure télévisuelle, seules cinq boîtes ont eu le privilège d'obtenir un agrément semi-officiel sous forme d'autorisation ministérielle annuelle qui leur permet de contourner leur statut de droit étranger pour être représentées légalement en Algérie sans pour autant toutefois être en conformité avec la législation algérienne. Pourquoi cinq télés seulement, et quels sont les critères d'éligibilité pour accéder à ce privilège alors que l'ensemble des chaînes privées sont toutes, sans exception, dans une même situation de clandestinité tolérée 'A ces questions pour le moins légitimes, le ministère de la Communication ne donne aucune réponse. Il préfère gérer par le biais de la morale bien pensante et agir, le cas échéant, par la répression lorsque le tumulte devient trop embarrassant. Mais la répression est toujours calculée et ne s'applique jamais aux écrans qui ont fait allégeance et que la secrétaire du PT qualifie de «télés- baltaguia» en dépit des éclaboussures qu'ils produisent à répétition.La menace est destinée aux plus faibles qui ne comptent que sur leurs propres forces pour résister. On demande désormais à ces derniers de «régulariser» leur situation vis-à-vis de la réglementation algérienne au risque de disparaître définitivement comme l'a été un de ces écrans qui se croyait libre mais qui a vite fait de déchanter en subissant les représailles.Comment se fera cette régularisation au-delà de la demande d'une simple autorisation pour l'ouverture d'un bureau ' Incapable de fournir les conditions techniques et technologiques pour les besoins de l'émission par satellite à ces chaînes qui ne demandent qu'à rentrer au pays, l'Etat ne trouve comme solution adaptée à ses carences pour maîtriser ce nouveau champ d'expérimentation que le moyen de coercition pour pacifier le secteur.A ce titre, le ministre de la Communication qui adopte l'attitude du parfait équilibriste pour absoudre les graves dérives des ténors en connivence flagrante avec le Pouvoir et enfoncer ceux qui n'ont aucune protection avait promis il y a peu des «nouveautés» pour la mise à niveau des télés privées réfractaires. Des mesures, pense-t-on, pour mettre fin à un certain désordre qui semble dépasser même le cadre juridique. Mais à ce jour, il n'y a que des mises en garde et de fortes menaces de la part de la tutelle et de ses représentations pour se donner bonne conscience face à une anarchie qui paraît de plus en plus insoluble devant le manque de courage des instances étatiques pour affronter les problèmes de fond avec les vrais arguments.


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