Algérie

Vu à la télé



Vu à la télé
D'abord, une remarque fort pertinente : c'est la télé privée Ennahar TV qui a eu la primeur du contenu de la déclaration de Bouteflika. Connaissant les mécanismes des relais médiatiques actionnés par les gens du sérail quand ils veulent donner du poids à leurs infos, on pense que la «fuite» de ce scoop, qui a été simultanément repris par des journaux électroniques, a été volontairement provoquée pour une question de crédibilité. Ainsi donc, les services de la communication officielle qui dépendent directement de la présidence de la république ont préféré passer en priorité par un canal privé pour donner plus de crédit à leur message au lieu de privilégier la télé étatique qu'ils considèrent pourtant comme le média le plus sûr et le plus influent sur l'opinion publique.Alors que le sujet tournait en boucle ailleurs avec les commentaires et les analyses des spécialistes sollicités pour décortiquer les dits et non-dits de l'intervention publique présidentielle, la télé étatique dut attendre comme une assistée le JT du 20h pour reprendre intégralement le long communiqué par une lecture éprouvante pour la journaliste de service qui a duré plus d'une vingtaine de minutes. Une litanie qui a dû ennuyer beaucoup de monde alors que l'info était d'une importance capitale. De plus, l'Unique n'a pas eu droit de s'impliquer par un travail d'analyse pour rendre le message plus lisible. Elle a été proprement humiliée par ses sponsors sur un terrain où elle devait trôner.C'est l'un des grands paradoxes de nos dirigeants qui font tout pour s'approprier le levier central de la communication, à travers les organes qu'ils contrôlent directement ou indirectement, mais qui pour des intérêts obscurs qu'eux seuls savent évaluer, en arrivent à ne pas faire confiance à ces mêmes médias qui apparaissent à leurs yeux comme de vulgaires boîtes aux lettres, voire des instruments de propagande qui n'ont aucun retour d'écoute. La notion de crédibilité varie selon les circonstances et la valeur morale ou professionnelle de ceux qui l'assument.La presse écrite indépendante en sait quelque chose sur la question. Aujourd'hui, c'est la télévision privée qui est mise à l'épreuve des contingences politiques où les manipulations sont légion. Mais dans cette optique, personne ne peut reprocher à Ennahar TV d'avoir sa propre vision sur le produit informatif, même s'il y a à redire sur sa ligne éditoriale et ses accointances politiques. Le traitement en temps réel de la dernière sortie médiatique de Bouteflika précisément dans une conjoncture politique très délicate est en tout cas la preuve que la télé privée peut conserver une salutaire liberté d'expression sur des événements majeurs malgré toutes les pressions qui s'exercent sur elle, ou a contrario son degré d'allégeance au Pouvoir qui lui impose normalement l'autocensure.C'est ce qui contribue au demeurant à augmenter son audience et sa notoriété par rapport à sa cons?ur publique qui n'en peut plus de voir sa crédibilité se dégrader de jour en jour par la faute de gouvernants versatiles et calculateurs, qui pensent plus à leur carrière qu'au devenir du pays. Crédibilité ! C'est donc le maître-mot qui alimente aujourd'hui les réflexions sur une actualité brûlante que les Algériens arrivent pourtant difficilement à cerner. Un véritable embrouillamini à deux mois de l'élection présidentielle qui donne le change à toutes les spéculations possibles et imaginables, mais qui ne nous renseigne nullement sur l'essentiel. A savoir si l'élection se tiendra vraiment à la date fixée, avec quels projets de société et quels candidats potentiels qui ont leur chance au cas où Bouteflika ne se représentera pas. Car tout est encore dans cette opacité entretenue pour brouiller les pistes et qui ne nous dit pas si le Président sortant va rempiler ou pas.Tout est dans cet imbroglio magistral qui ne permet aucune visibilité réelle ou approximative, aucune lecture intelligente, ni projection sérieuse capable de nous rassurer sur l'avenir immédiat qui attend notre pays et dont on dit qu'il doit transiter impérativement par un changement radical du système en vigueur jusque-là. Au lieu donc d'avoir un horizon électoral qui s'éclaircit au fur et à mesure que l'on avance vers l'échéance, ce sont man?uvres dilatoires et diversions multiformes qui nous sont servies comme autant d'effets d'annonce pour nous préparer au pire. Il faut dire que les analyses des experts en politique qui se relayent pour essayer de démêler l'écheveau n'arrivent pas toujours à prendre le bon fil pour nous convaincre.Beaucoup d'idées pourtant respectables se perdent en conjectures devant l'incroyable improvisation ressentie au sommet de l'Etat. Ces spécialistes sont eux-mêmes pris dans le vertige des non-dits et des rebondissements qui rendent la perspective électorale encore plus incertaine que jamais. Et c'est dans ce décor surnaturel où les coups bas sont de mise que Bouteflika décide de sortir de sa réserve pour calmer le jeu et défendre surtout les institutions de l'Etat, dont le DRS qui fait face à des attaques répétées. Loin de calmer les ardeurs, le long communiqué langue de bois sorti de la présidence de la République a plutôt ajouté à la confusion générale, au même titre d'ailleurs que l'inattendu saut dans l'inconnu de Mouloud Hamrouche qui, après un silence quasi doctrinal de plus de quinze années sort de l'ombre pour y mettre lui aussi son grain de sel.Pour nous dire quoi ' Que des compromissions sont nécessaires à la transition dans laquelle le rôle de l'armée reste intouchable ' Pourquoi Hamrouche maintenant ' Que cherche le clan présidentiel ' Est-il vraiment sur la défensive ' Quel est le sort réservé à Saadani ' La grande muette qui parle désormais est-elle d'accord pour un 4e mandat ' Où en est le Président avec sa maladie ' Pourra-t-il encore gouverner ' Quel crédit accorder à une consultation où 85 candidats veulent devenir Président ' Dans quelle direction va-t-on ' L'aventure est jonchée de points d'interrogation, et les réponses personne n'y songe, c'est ce qui est inquiétant.




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