Algérie

Voile islamique : Le grand débat


L'avis du membre de la plus haute instance de la fatwa saoudienne et conseiller du roi Salman a été largement commenté par ses compatriotes, qui ont lancé un hashtag largement repris sur les réseaux sociaux : #Almotaq-El Aabaya-n'est pas obligatoire.Un mufti saoudien provoque à ses dépens une polémique dans son pays. Et même au-delà. Dans une réponse à une auditrice de son émission «Studio El Djoumoua», Abdallah Ben Mohamed Al Motlaq a considéré que l'obligation faite aux femmes musulmanes de porter la «abaya» (voile saoudien) «n'est fondée sur aucun texte religieux». Il enfonce le clou en déclarant que «90% des musulmanes dans le monde musulman ne s'astreignent pas à la abaya».
«Nous ne devons pas obliger les gens à porter le voile saoudien», poursuit-il. L'avis du membre de la plus haute instance de la fatwa saoudienne et conseiller du roi Salman a été largement commenté par ses compatriotes, qui ont lancé un hashtag largement repris sur les réseaux sociaux : #Almotaq-El Aabaya-n'est pas obligatoire.
Si les partisans du voile intégral ont dénoncé une fatwa «contraire» aux préceptes du Coran et de la sunna et un «appel au dévergondage», d'autres saluent «un avis religieux courageux» d'un savant qui ne contredit pas le texte coranique et les dits et faits du Prophète, qui «n'obligent aucunement les femmes à mettre un fichu pour être pudiques» (textes sur la twittosphère saoudienne très développé).
La polémique sur les propos du mufti est inédite en Arabie Saoudite, où le port du voile intégral est obligatoire.
En décembre 2016, une femme, qui a osé poster une photo d'elle sur Twitter sans voile, a provoqué la colère de ses coreligionnaires : certains internautes, très remontés, ont réclamé la condamnation à mort de l'effrontée. Pour apaiser l'opinion, la police saoudienne s'est empressée d'annoncer l'arrestation de la femme coupable, dont l'identité n'a pas été révélée. L'Arabie Saoudite est le seul Etat au monde où les femmes ne peuvent pas conduire, sortir ou voyager sans «mahram» (tuteur).
Un seul droit leur a été concédé sous le pouvoir du roi Abdallah Ben Abdelaziz Al Saoud, qui a nommé, début 2013, 30 femmes au Parlement. Le défunt roi a autorisé les femmes à voter et à se présenter aux élections municipales. Mais l'exercice de ce droit, promulgué par décret royal en 2011, n'a été effectif qu'en décembre 2015 : 14 femmes entrent dans les conseils municipaux.
Aggiornamento ajournée !
Mais les choses ont changé depuis quelques mois. Aux commandes de l'opération, Mohammed Ben Salmane (MBS), désigné prince héritier et le vice-Premier ministre de l'Arabie Saoudite depuis le 23 juin 2017 en remplacement de son cousin Mohammed Ben Nayef. Le 26 septembre 2017, le virevoltant fils du roi Salman a autorisé les femmes à conduire une voiture. Le décret devra entrer en vigueur en juin prochain.
Les femmes auront aussi le droit, toujours par décret, de conduire des motos et des camions (octobre 2017). Le même jeune prince, qui a lancé son programme Vision 2030, en janvier 2016, a ouvert le droit aux femmes d'assister à des matchs de football, d'accéder aux salles de cinéma, ou même de travailler dans le secteur de la restauration.
Ces droits octroyés par MBS n'émancipent pas totalement les Saoudiennes qui restent privées d'autres droits : mariage, divorce, travail, etc. Le royaume wahhabite, qui s'est appuyé, depuis sa création, sur une légitimité religieuse très forte, n'est pas prêt à aller vers des réformes plus importantes : l'aggiornamento n'est donc pas pour demain.
Mais les décisions du prince héritier, qualifiées d'autoritaires par certains spécialistes de ce pays, devraient réduire quelque peu l'intervention des religieux, qui sont dans les rouages de l'Etat profond, et ainsi permettre à une société jeune de s'exprimer. Les «avancées» chez les wahhabites saoudiens, devraient avoir un écho dans tout le monde arabe et musulman, où les courants salafistes de ces pays continuent de recevoir leurs ordres des instances religieuses de ce pays.
En Algérie, les débats chez les lointains «frères» du Golfe ne semblent pas susciter des réactions importantes. Exception : le tifo des Ultras de Aïn M'lila, jugé offensant par les Saoudiens, et les plates excuses du gouvernement algérien qui ont provoqué la colère de l'opinion nationale.
Les salafistes locaux, dont certains chefs ont été adoubés par les preux «chouyouk», continuent à faire du prosélytisme auprès de leurs obéissantes ouailles : leur discours rétrograde, s'appuyant souvent sur des recueils de hadiths, que les Saoudiens eux-mêmes veulent changer pour promouvoir un «islam modéré», particulièrement sur la femme, est inchangé.
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