Algérie

Vive le foot !Vu à la télé


Vive le foot !Vu à la télé
C'est le foot (et oui, encore lui !) qui a fait l'actualité cette semaine et qui a donc tenu la vedette. Avant, pendant et après le dernier match qualificatif des Verts, ponctué par une victoire ô combien précieuse pour l'obtention du billet brésilien. Les médias lourds ont consacré à l'événement de larges émissions dites spéciales, dont la plupart en direct, pour mettre comme en dit dans notre jargon l'ambiance des opportunités exceptionnelles et maintenir dans le foulée les esprits en éveil. Ne parlez surtout pas aux politiques de conditionnement des esprits. C'est un terme qu'ils détestent. Non, en Algérie aimer le football c'est naturel, ça fait partie de notre culture. La relation foot-Pouvoir ne date pas d'hier? Elle a une longue expérience derrière elle. On s'y est habitué à force de répétition. Logique par conséquent que les ondes et les écrans soient grandement ouverts pour servir de réceptacle à l'expression footballistique qui venait de partout, des quatre coins du territoire.On avait besoin notamment de celle qui sortait des sentiers battus. La plus convoitée était celle qui représentait la rue dans toute sa diversité et la femme qui avait droit elle aussi de revendiquer sa part de supporter haut et fort l'équipe nationale. On était heureux aussi bien devant que derrière le micro. Les animateurs poussaient à l'euphorie, et leurs interlocuteurs leur rendaient bien avec un chauvinisme difficilement contenu. Pour une fois qu'on démocratise à ce point les ondes ! C'était pour la bonne cause, l'intérêt de la fête annoncée allant bien au-delà du succès sportif qui débordait de toutes parts. Les algériennes et les algériens étaient ainsi conviés à donner leurs avis et leurs pronostics. Il y avait de tout. Du plus sensé au plus farfelu. C'est dans ce genre de contact spontané qu'on réalise que nos citoyens férus de football ont une imagination très fertile mais souvent déroutante. Certains auditeurs par exemple, avant que le match ne se joue, connaissaient le score, le nom des buteurs, et les minutes pendant lesquelles les goals ont été enregistrés. Ils avaient de l'intuition.
Mais on les sentait surtout irrationnels, victimes sans aucun doute d'un battage médiatique qui perturbait visiblement leur raisonnement, voire leur discernement. Bien sûr que tout le monde était derrière son équipe, mais concernant le dénouement de la rencontre, personne ne pouvait imaginer un seul instant que le Burkina Faso pouvait créer la surprise alors qu'elle avait les moyens de le faire. Interdit d'évoquer une quelconque idée de défaite, ya latif ! La rengaine des radios et des télés portait plutôt sur l'indispensable fair-play qu'il fallait respecter, notamment envers les adversaires de la sélection nationale. On avait grand peur que l'hymne du Burkina soit sifflé. Alors les voix chargées de distiller la morale à suivre sortaient tout l'attirail des mots et des phrases chocs qui s'adressent à l'inconscient pour convaincre les jeunes des gestes qu'il ne fallait pas faire.
On défendait la bonne image de l'Algérie qu'il ne fallait pas ternir, on brandissait les menaces des sanctions de la FIFA qui risquaient de s'abattre sur la fédération algérienne si les fumigènes et autres projectiles étaient lancés sur le stade. On voulait donc montrer la voie à cette jeunesse qui a passé des nuits dans le froid aux abords du stade Chaker et qui a été soumise aux pires humiliations pour obtenir le fatidique billet. Ils sont venus de très loin les jeunes pour voir le match et supporter leur équipe nationale. Mais en retour, ils ont été très mal accueillis par des organisateurs et un service d'ordre débordé et qui avait du mal a canaliser tant d'énergie. Face à une demande impressionnante mais prévisible, on a fait les mêmes erreurs. Peu de guichets, peu de points de vente ouverts pour une participation populaire qui exigeait un minimum de respect et de confort. Comment peut-on éviter les débordements quand les jeunes sont exposés à toutes sortes de maltraitances. Il y a eu comme d'habitude du grabuge et des blessés, et c'est naturellement que les doigts se sont pointés en direction de la fédération qui n'a pas fait convenablement son travail.
De là à parler de morale, on ne sait qui en a vraiment besoin. Cela dit, le foot a gagné. La victoire a effacé toutes les misères. Les algériens ont grand c?ur d'oublier vite leur rancune quand il s'agit de l'équipe nationale. Ce n'est pas de la démago. C'est ainsi, la passion qui les lie à leur sélection est une vieille histoire d'amour. L'Algérie a gagné son ticket pour Rio, mais à quel prix ' C'est important de s'arrêter un instant sur ce point pour dire que les médias se sont eux aussi laissé griser par la fièvre de la victoire en présentant unanimement le résultat des Verts comme une très belle prestation, un succès acquis superbement au terme d'un match fabuleux et tutti quanti.
Que de superlatifs mal placés, alors que tout le monde a vu le même match et a constaté que la manière avec laquelle la qualification a été acquise devant un adversaire plus que jouable laissait grandement à désirer. Le jeu des algériens était trouble, mal structuré, sans intelligence. Il y avait de l'énergie, du courage et de la solidarité chez les joueurs, et c'est tout. Bien sûr, par les temps qui courent, il n'est pas recommandé de jouer une fausse note dans la partition générale, mais il faut bien penser à la suite et se dire comment avec de maigres atouts on fera à Rio. C'est dans huit mois? et le premier ministre a tout le loisir de savourer entre-temps le «cadeau salutaire» sous forme de sursis offert par le foot pour préparer l'élection présidentielle dans une relative quiétude.


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)