Algérie

Viticulture à Boumerdès Et maintenant, le défi de l’export !



Viticulture à Boumerdès Et maintenant, le défi de l’export !
Publié le 10.07.2023 dans le Quotidien Le Soir d’Algérie
PA ABCHI L

Lors de son passage à cap Djinet dans l’est de la wilaya de Boumerdès pour poser la première pierre du projet du complexe de dessalement d’eau de mer (300 000M3/j), le chef de l’Etat, Abdelmadjid Tebboune n’a pas tari d’éloges sur le secteur de l’agriculture, notamment, de la wilaya de Boumerdès.
Tebboune avait, par la suite, insisté sur la production viticole de la région qui est, selon lui, «de haute qualité.» Par cette affirmation élogieuse, le Président ne répondait pas à une question ni à un impératif politique local. Visiblement, cela lui tenait à cœur de le dire publiquement et il l’a dit avec un ton révélateur sur sa satisfaction. Les louanges présidentielles sont le résultat de tant d’efforts des fellahs, particulièrement les vignerons de cette wilaya. Ces derniers ont innové, utilisé les nouvelles méthodes modernes de production. Ils n’ont pas attendu que l’Etat les assiste par le biais de subventions. Ils ont investi leurs propres deniers. Ils ont érigé une puissance économique régionale prospère. Dans les années 1980, la wilaya de Boumerdès ne mettait que de petites quantités de raisin de table sur le marché. Les vignobles de cuvée ont été totalement arrachés. Durant la saison 2021/2022, la wilaya de Boumerdès a vendangé, à elle seule, plus de 45% du raisin que les Algériens ont consommé principalement le fameux Sabéne, suivi du Red Glob et une dizaine d’autres variétés. Les vignerons de la wilaya de Boumerdès sont demandés partout en Algérie. Et pour cause, ils détiennent désormais un savoir-faire qui les met en situation d’être dans le gotha méditerranéen des producteurs de raisin de toutes les variétés. «D’ici 2 ou 3 ans, avec l’entrée en production de centaines d’hectares nouvellement plantés, nous espérons atteindre les 5 millions de quintaux par saison», affirme Youcef Oumellal, viticulteur et président du Conseil national interprofessionnel de la filière de la viticulture (CNIFV). Oumellal a été particulièrement sensible aux propos du Président. «C’est la première fois qu’une autorité supérieure de l’Etat s’est intéressée à nos efforts. Nous remercions vivement monsieur le président de la République pour ses paroles très encourageantes.»

LA RÉVOLUTION DU SABENE ET DU RED GLOB
Flash-back sur les activités viticoles dans la région de Boumerdès. Au printemps de l’année 2000, des fellahs nous avaient fait part du développement extrêmement intéressant de la filière viticole dans la plaine de l’oued Sebaou dans la daïra de Baghlia à l’est de la wilaya de Boumerdès. Nous nous sommes déplacés à Sidi-Daoud, localité située sur la rive ouest de l’oued Sebaou. En dépit de la situation sécuritaire de la région qu’écumait la sinistre katibate El Ansars, les fellahs continuaient à travailler. Ils étaient déterminés à sauvegarder leurs terres. Ils faisaient plus de la résistance que le travail des champs. Pour la première fois, on a parlé dans la presse du raisin le ‘Sabéne. L’histoire de ce magnifique raisin de table a commencé, précise Oumellal, dans la localité de Sahel Bouberak de la commune de Sidi-Daoud en 1968. «A cette époque, feu Laâdj Menouar avait acheté la récolte sur pied de 3 hectares de raisin Muscat appartenant au domaine de Madoui. Au cours des vendanges, les fellahs ont découvert 60 plans dont la récolte était largement supérieure en quantité et en qualité au reste des plans des 3 hectares. Dès lors, feu Laâdj a prélevé des greffons pour les planter sur ses terres. Notre ancêtre, cité plus haut, venait d’essaimer un raisin qui est devenu le meilleur en Algérie. Maintenant, la wilaya de Boumerdès, avec une production- toutes variétés confondues- qui dépasse les 3,5 millions de quintaux par saison, occupe la première place en production nationale de raisin de table.» On note que le Sabéne occupe largement la première place, suivie par le Reg Glob. A noter que la famille Oumellal a joué, aux côtés d’autres familles de Baghlia, Sidi-Daoud, Dellys, Cap-Djinet un rôle très important dans cette révolution. Elle a été la première à installer le système Pergola par lequel la culture se fait en horizontal. La lumière est donc totalement captée, de ce fait la production est multipliée par trois. Par ailleurs, l’entretien de la vigne est plus facile, ce qui diminue les frais d’entretien. «Nous avons introduit la culture du Red Glob en 2004/2005. Nous avions ramené des plans d’Italie. Une partie de ces plans a été partagée avec des fellahs.» Les raisins algériens répondent-ils aux exigences sanitaires imposées par l’Union européenne (UE) ? C’est la question que nous avions posée au président du Conseil national interprofessionnel de la filière de la viticulture, avant d’aborder le problème de l’exportation. Il dira en substance : «En février, nous avions participé à une foire agricole qui s’est déroulée à Paris. Nous avions exposé le raisin. Je peux vous dire que notre raisin a subi tous les contrôles à la sortie d’Algérie et à l’entrée en France sans aucun problème. Je profite de l’occasion pour lancer un appel aux autorités afin de nous faciliter les opérations, car nous allons exporter des produits rapidement périssables». A rappeler que Oumellal a fait, avec succès, un essai de stockage du raisin Red Glob. Ce stockage a duré plus de 3 mois.

L’IRRIGATION, LES REJETS DES POISSONS ET L’ÉNERGIE ÉLECTRIQUE
L’irrigation des plantations de vignobles par le goutte-à-goutte est l’un des moyens, très importants, avec lequel les fellahs de Boumerdès ont multiplié les récoltes de belles grappes. Dans certains cas, il a été enregistré une productivité de 400 quintaux à l’hectare. Malheureusement, la sècheresse pousse les fellahs à improviser des solutions urgentes comme des aménagements de retenues collinaires. Elles se comptent, semble-t-il, par centaines, notamment au niveau du piémont de la wilaya. On nous a dit que ces retenues collinaires ont été creusées illicitement, faute de la voie légale. Des fellahs ont dépensé des millions pour réaliser une retenue. La location d’un engin d’extraction est onéreuse. Dans cette conjoncture, c’est à l’institution de l’Etat de s’adapter à la situation exceptionnelle et non pas aux fellahs de se mettre au diapason avec la bureaucratie. L’administration peut élaborer un modèle de retenue sécurisée pour aider les fellahs. Certains fellahs ont mis des poissons dans ces petits lacs. Cette opération est doublement bénéfique. En effet, le poisson d’élevage peut être consommé, alors que les rejets de ces bêtes sont un puissant fertilisant. En dépit des efforts déployés, la Sonelgaz n’arrive pas à satisfaire toutes les demandes de branchements électriques. «J’ai personnellement déposé en 2021, comme beaucoup de fellahs, la demande de branchement électrique. J’attends toujours une bonne nouvelle de la Sonelgaz», nous a dit à ce propos Oumellal.
Abachi L.



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