Le fourgon qui nous mène d'Adekar centre vers Kiria (Assif El Hammam) suffoque dans une atmosphère étouffante. Les feux qui parcourent de nombreux endroits de la daïra chargent le ciel de lourdeur et de couleur grisâtre.
Tout le long du trajet qui nous mène vers notre destination on voit s'élever, au loin, les fumées épaisses dans l'atmosphère. Le village Ighil Kron, qui se trouve sur notre passage, offre un paysage complètement dévasté. Les abords immédiats du village ont été totalement dévorés par les flammes. Ici, les villageois ont connu certainement des moments d'enfer. Les incendies sont d'ailleurs au centre des discussions des voyageurs. On débat fort sur les origines de ces feux, leurs conséquences sur l'économie et le climat.
«Si on parle de printemps arabe, nous on peut se targuer d'avoir l'hiver et l'été algériens, l'hiver pour ses fortes neiges, et l'été pour ses incendies récurrents et on peut même s'offrir l'automne qui s'annonce chaud à cause de l'inflation», plaisante l'un des voyageurs. A quelques encablures de Timri Mahmoud, le fourgon quitte la RN 12 et vire à gauche, sur un chemin communal. En pente, étroit, virages serrés, ce chemin a tous les défauts pour vous faire sortir de vos gonds. La sensation désagréable que procure ce chemin est quelque peu atténuée par un joli tableau artistique surmonté par un Z de l'alphabet tifinagh dressé à l'entrée du village Aït Malek.
Arrivée à Kiria'
Ce tableau, représentant des portraits de Slimane Azem, Mohamed Haroun, Matoub Lounès et Tahar Djaout encadrés par des citations tirées principalement de leurs 'uvres, renseigne sur l'attachement indéfectible de la région à son identité ancestrale. La première impression qu'a le visiteur en entrant à Kiria, c'est ce foisonnement de couleurs. Des deux côtés de la rue principale, qui sépare Kiria en deux principaux îlots de maisons, robes kabyles, poteries et autres articles dégagent une symphonie de couleurs chatoyantes. Localité essentiellement commerçante, Kiria ne vit et ne respire que par sa station thermale.
Nichée au pied d'une imposante montagne rocheuse appelée «Azrou Outata», où s'agrippe superbement le village Hengued, cette station, en dépit de la vétusté de ses installations, attire de nombreux curistes qui viennent de plusieurs wilayas du pays à la recherche de détente et de guérison. «Nous accueillons des gens qui viennent de toutes les régions du pays. Récemment, c'est une association venue de Béchar qui a été notre hôte», nous dit l'agent de réception. L'effet Ramadhan et la canicule ont évidemment généré une certaine baisse d'affluence de clients, au grand dam des commerçants, notamment des hôteliers, qui voient ainsi leur chiffre d'affaires diminuer. Un hôtelier que nous avons interrogé tient à relativiser la question.
«En termes de fréquentation, il y a des jours où on affiche complet, et d'autres on a quelques clients, c'est relatif. La région est en tout cas fréquentée tout au long de l'année», signale-t-il. Une vingtaine d'hôtels, non classés, offrent leurs services aux visiteurs. La station thermale tourne de jour comme de nuit et n'a jamais désempli, quelles que soient les conditions climatiques. «Les jours d'affluence, on dépasse largement les 500 curistes par jour», nous dit un homme âgé, rencontré sur la placette jouxtant la station thermale. Le tarif symbolique d'accès aux thermes est fixé à 15 dinars. En temps de grand rush, certains se rabattent sur Thahamamt, une autre source thermale de moindre importance, occupée alternativement le matin par les femmes et l'après-midi par les hommes.
Le Saint Patron des lieux est Sidi Baâziz, dont le mausolée jouxte la structure de la station thermale. Son «dharih» recouvert de plusieurs tissus est visité notamment par les femmes en quête d'une quelconque baraka. Juste en face de la tombe du saint homme se dresse un portail rudimentaire où l'on voit accrochés des centaines de fils et ficelles de diverses couleurs. On y remarque même, laissés là, des bracelets et autres ornements. Notre accompagnateur nous révèle que ses fils sont posés là depuis des lustres par des femmes et des jeunes filles en signe de v'ux formulés, notamment pour trouver l'âme s'ur. De même qu'à Thahamamt, une vieille maison kabyle, en tuiles rondes, érigée pour le repos des thermalistes, laisse voir des murs badigeonnés de henné par des mains de femmes désirant voir leurs v'ux exaucés. Dans ces lieux, ces rituels, qui accompagnent souvent les cures thermales, ont plus un caractère culturel.
L'espoir de la population'
«Notre région est touristique à plus d'un titre et peut jouer un très grand rôle dans le développement local, mais elle est laissée à l'abandon». Farid, un habitant de la bourgade, que nous avons interrogé, nous cite tout un chapelet de maux dont souffre la région. Si nous avons constaté de visu l'exiguïté des lieux, l'étranglement de la bourgade par son pont, le problème de stationnement, la précarité de la station thermale, la pollution par toutes sortes de déchets, notamment des bouteilles vides, des eaux de la rivière, notre interlocuteur nous cite d'autres problèmes dont souffre la localité. «Notre région porte un nom qui signifie en deux fois ''eau'' (Assif El Hammam,) mais nous en manquons cruellement. Des quartiers ne sont même pas dotés de réseau d'assainissement, nos chemins sont impraticables, les camions sont interdits de passage à cause de l'étroitesse du pont'. Nous avons manifesté et alerté qui de droit, mais rien à l'horizon», énonce-t-il. Le v'u de la population est de voir leur station bénéficier d'un véritable projet de complexe thermal avec tous les projets d'accompagnement possibles. Centre commercial et touristique de grande importance, Hammam Kiria peut jouer un grand rôle dans la promotion du tourisme hors balnéaire, pour peu que les pouvoirs publics y fassent sérieusement attention.
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Posté Le : 01/09/2012
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Boualem B
Source : www.elwatan.com