Algérie

Vie quotidienne à Laghouat, Rahbat Ezzitoun se réveille...



Vie quotidienne à Laghouat, Rahbat Ezzitoun se réveille...

Au devant de l’atelier de feu Mohamed Seghir, des revendeurs négocient au cageot des citrons verts fraîchement cueillis et personne ne semble prêter attention aux lumières d’automne qui ont émerveillé tant de peintres.

Les ruelles adjacentes à la placette des Oliviers grouillent de monde, en majorité des commerçants occasionnels ; le reste de Laghouat sommeille encore. L’animation ne reprendra ses droits qu’en début d’après-midi. En attendant la ruée ; l’on se dispute la petite surface ; des produits frais sont disposés sur des étals au-dessus des restes de la veille ; un boucher lave le trottoir à l’aide d’un jet . Jeste vain, l’eau rejoint dans une rigole obstruée par les immondices le liquide noirâtre nauséabond qui y stagne. Equipé d’un éventail, un jeune, non encore réveillé, chasse les mouches au-dessus d’un tas d’abats. Qu’en sera-t-il à midi ? Pourtant, c’est au niveau de cette placette que préfèrent s’approvisionner les Laghouatis, attirés par l’exotisme du lieu, la quête des produits du terroir et bien sûr les prix. En plus des citrons qui disputent la vedette aux fines herbes, les courgettes, radis, blets ont une bonne cote. Au pied d’un palmier géant improductif, plusieurs variétés de dattes sont exposées à des prix prohibitifs, nulle trace des espèces locales. Laghouat en « trèze » selon les connaisseurs pour la plupart éteintes et il faut courir pour trouver la fabuleuse fine tada, la douce au palais. De cette dernière variété, ne subsistent que quelques spécimens jalousement gardés ; la plupart des palmiers dattiers qui peuplent Laghouat mal entretenus, ne produisent guère, mais continuent tout de même à sauvegarder le cachet oasien d’une ville désormais cosmopolite. Interdite ! Face aux prix affichés, une vieille dame, la seule qui ait accepté de nous répondre, nous dira : « Ramadhan n’a plus la saveur d’antan... » « Ce n’est pas au souk qu’on cherchait de quoi agrémenter la meïda, de mon temps, tout était préparé, conditionné, stocké dès Chaâbane. N’est pas un foyer laghouati, celui dont la maîtresse n’a pas empli la sedda (étagères) de céréales, de beurre, de graisse, des fruits et tomates sèches, des plantes et bien sûr des régimes de dattes cueillis dans son propre jardin. Aujourd’hui, le rituel des préparatifs de Chaâbane est passé de mode et tadala disparaîtra tout autant que le voile blue et le reste. » Il est tout autant difficile de parler de tradition culinaire maintenant que les ménagères s’essayent avec plus ou moins de succès aux recettes présentées par les chaînes satellitaires. Cependant des survivances subsistent. Du Sheteït passant par la rue Sardau jusqu’aux limites de l’oasis sud, une tradition séculaire se maintient, Zog Ettaïr. Selon cette tradition, dès le mois de Chaâbane, au niveau des placettes et artères de la vieille Casbah, les adultes rénovent les doukanas, sortes de tables de toub et d’argile ; celles-ci serviront de tables, (meïda) pour enfants tout au long du mois sacré. Qu’ils soient fils de pauvres ou de riches. Les enfants de La Casbah goûteront en commun à tous les mets. En effet, peu avant la rupture du jeûne, les enfants sortiront de chez eux avec plein de petites assiettes dont ils partageront le contenu avec le reste de la bande. Alors que certains n’y voient qu’une ruse des adultes pour se débarrasser des enfants lors du f’tour d’autres, au contraire, y voient le principe même d’une éducation communautaire de l’ensemble des enfants sans distinction aucune.




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