Le recours à une seconde lecture des textes de lois portant réformes
politiques paraît de plus en plus l'option la plus probable pour sauver le
processus initié par le président de la République septembre dernier.
Des six textes présentés par le gouvernement au parlement en septembre
dernier, trois seulement ont été adoptés, une moyenne d'un projet par mois. Ce
retard hypothèque l'adoption des autres projets quand on sait qu'il ne reste à
cette session qu'une trentaine de jours pour sa clôture officielle en janvier 2012.
Les projets de lois adoptés en août dernier par le conseil des ministres et
soumis aux débats et à l'adoption des parlementaires ont subi une trituration
systématique et de profondes modifications allant jusqu'à toucher parfois
l'ossature et les fondements du texte comme cela a été le cas pour celui
portant la représentation des femmes dans les institutions. Ces modifications
ont soulevé un tollé général au sein de la classe politique et des
personnalités nationales qui continuent à dénoncer ceux qui ont dénaturé les
réformes. Certains sont allés jusqu'à parler d'une prise en otage de ces
réformes par des partis politiques partisans de l'immobilisme et l'inertie et
farouches opposants à tout changement de l'ordre établi.
Chez l'opinion publique, de plus en plus de voix s'élèvent pour exprimer
des inquiétudes et des craintes sur le risque de voir ce processus dévoyé si
des mesures urgentes ne sont prises pour corriger et remettre sur les rails le
train des réformes. Certains responsables politiques ont commencé à suggérer
des solutions pour dépasser cette situation de lenteur et de blocage, comme
c'est le cas de la présidente du Parti des travailleurs, Louisa
Hanoune, qui parle de la possibilité d'une deuxième
lecture, alors que d'autres appellent carrément le président de la République à
soumettre ces réformes à un référendum populaire à l'image du président du MSP,
Aboudjerra Soltani. Des
deux options, la première, celle relative au renvoi des textes controversés à
l'Assemblée pour une deuxième lecture, reste la plus probable sans toutefois
exclure d'autres hypothèses de travail et d'autres mécanismes qui permettent au
chef de l'Etat de changer le cours des choses et de sauver les réformes. Le
recours à cette procédure, un des instruments constitutionnels aux mains du
président de la République, ne peut être opérationnel qu'une fois le texte de
loi qui doit faire l'objet de cette seconde lecture, soit adopté par le Conseil
de la Nation
comme le stipule l'article 127 de la Constitution du 28 novembre 1996 : « Le président
de la République peut demander une seconde lecture de la loi votée, dans les
trente (30) jours qui suivent son adoption. Dans ce cas, la majorité des deux
tiers (2/3) des députés à l'Assemblée populaire nationale est requise pour
l'adoption de la loi».
L'application de cette option va certainement chambouler les calculs
politiques au sein de la majorité parlementaire à l'Assemblée nationale. Le
texte renvoyé par le président doit être voté par 259 députés, ce qui signifie
que les parlementaires des trois partis de l'alliance doivent voter en bloc le
texte pour qu'il soit adopté. Le passage du texte nécessite l'apport d'autres
députés comme les indépendants et probablement ceux du Parti des travailleurs. Dans
le cas où le texte soumis n'obtient pas les deux tiers, il deviendrait caduc
comme le prévoit l'article 45 de la loi portant l'organisation et le
fonctionnement des deux chambres du parlement ainsi que les relations
fonctionnelles entre le parlement et le gouvernement : « Dans le cadre de l'article
127 de la Constitution,
le président de la République peut demander une seconde lecture de la loi votée
dans les trente (30) jours qui suivent son adoption par le Conseil de la Nation. Au cas de sa
non adoption à la majorité des 2/3 des députés, le texte de loi devient caduc ».
Le recours à cette procédure sera décrypté comme un rappel à l'ordre et un message clair que le chef de l'Etat
adressera à l'alliance présidentielle, constituée en 2004 pour porter et mettre
en Å“uvre son projet et programme. Au regard du rythme actuel lent et de la
surenchère politicienne qui caractérisent les débats
sur les textes portant réformes politiques, le processus va connaître un retard
important et les lois ne seront pas prêtes pour leur mise en Å“uvre. Cette
situation de lenteur risque de conduire à la promulgation de ces textes par
ordonnances entre les deux sessions du parlement. L'actuelle session est la
dernière pour les députés puisque les élections législatives doivent avoir lieu
dans les trois mois précédant la fin du mandat de l'Assemblée. Ouverte le 04
septembre 2011, la session de l'automne sera clôturée réglementairement le 02
janvier 2012 si toutefois elle n'est pas prolongée d'un mois comme l'autorise
la loi. Il faut signaler au passage que les décrets d'application prévus dans
les lois organiques vont permettre de clarifier et expliciter toutes les
dispositions jugées incomprises ainsi que les points omis dans les textes
adoptés. C'est donc une course contre la montre qui sera engagée dans les
prochains jours pour rattraper le retard et pallier les défaillances constatées
dans le processus annoncé en avril 2011 et enclenché en septembre dernier. Une
forme de plan de sauvetage pour faire de 2012, l'année de l'application des
réformes.
Car, il faut le dire, ce retard crée une impatience chez la classe
politique et le citoyen et accélère les dissensions au sein de l'alliance
présidentielle censée, voire chargée, de conduire à bon port ces réformes. A
mesure que le temps avance, les tiraillements entre les formations politiques
s'accentuent et se multiplient pour installer le pays dans une ambiance de précampagne électorale, sacrifiant ainsi les réformes sur
l'autel des intérêts partisans étroits. Les regards restent braqués sur le
palais d'El Mouradia et les prochains jours nous
renseigneront sur l'orientation, les formes et le cap que prendra le processus
de ce dossier.
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Posté Le : 27/11/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : M A O
Source : www.lequotidien-oran.com