Vers les vers

Depuis que l'hôtel où il travaille comme garçon d'ascenseur a fermé ses portes pour réfection, il a des hauts et des bas. Il jongle pour équilibrer son budget. Sachant compter jusqu'à dix, il a été recruté pour vérifier les doigts dans une fabrique de gants. Encore une fois, il se retrouve dehors au chômage. Il commence à compter sur sa main et son doigté.
Il décide de pêcher. Il croit dur comme fer que cela pourrait être un créneau porteur. Il tenait donc sa canne, près de cette écluse. Ça ne mordait pas, bien sûr, notre bonhomme ne pêchait pas des chiens. Il se rappelle qu'il y a quelques années, au même endroit, le poisson pullulait, alors qu'aujourd'hui, on a plus vite fait d'attraper une hépatite qu'une daurade…
Avec la pollution aujourd'hui, on fait dans la récupération. C'est la mer de chez nous !
Le soir, il ramassait son butin qu'il prenait soin d'abord de trier, le plastique de côté, la ferraille de l'autre. Ceci fait, il vendait le tout à un dépositaire récupérateur. Avec cet argent, il devait jongler pour équilibrer son budget, en attendant d'intégrer l'association des «verts ». Il paraît que la politique rapporte. Surtout quand poussent les verts.
Voyants au rouge, il s'est mis donc au vert, priant le Bon Dieu qu'aucun navire ne vienne se briser en deux pour déverser son pétrole dans nos eaux. Qu'aucune nappe ne pollue nos côtes. Cot… Cot… Cot… Il picore depuis, tranquillement, dans toutes les assiettes… en faisant de la politique « bartout »… Quand il n'est pas d'accord, il gueule. Quand il l'est… il fait le contraire. Il dégueule… le ver. Et s'en va rampant vers l'ordre serré de ses maîtres.