Algérie

Verdict parfumé



Verdict parfumé
Abdenour H. est un inculpé de vol de portable avec violence. Ses avocats, Maître Mohammed Djediat et Maître Nouas, tirent à bout portant.
Hadj Rabah Baric, le président de la section correctionnelle du tribunal de Koléa (cour de Blida), était plongé avec son légendaire sang-froid dans une affaire où trois jeunes étaient venus dans un véhicule transportant deux kilogrammes de came. L'un des prévenus avait pour avocat Maître Mohammed Djediat, en l'occurence Abdenour A. 21 ans détenu pour vol avec violence fait prévu et puni par l'article 350 bis alinéa 1 qui dispose dans la loi n°06-23 du 20 décembre 2006 que «si le vol a été commis avec violence ou menace de violence où s'il a été facilité par l'état de la victime dont la particulière vulnérabilité due à son âge, à une maladie, une infirmité, à une déficience physique ou psychique où à un état de grossesse, est apparent ou connue de son auteur, la peine est l'emprisonnement de deux (2) à dix (10) ans et l'amende de deux cent mille dinars (200.000 DA) à 1 million de dinars». Ces termes sont puisés dans les «vols et extorsions» des «crimes et délits contre les biens» du chapitre III du titre II relatifs aux «crimes et délits contre les particuliers». Seulement, l'avocat de Abdenour A. avait sa petite idée autour de ce délit redoutable et redouté par les auteurs, ceux confondus, coupables et responsables de leurs actes. Au grand dam du détenu poursuivi pour le vol d'un mobile en usant de violences, il y avait sur le siège du ministère public, un certain Tarek Moussaoui, un des adjoints de Abdenour Gaci, le procureur en titre. Or, ce Moussaoui n'est pas un robot, il sait faire la part des choses lors de ses réquisitions. Au moment voulu, il réclamera un sec trois ans d'emprisonnement ferme et une amende de 20.000 DA. Des demandes qui font courir un frisson sur la colonne vertébrale de l'inculpé dont la seule qualité apparente depuis le box, est son très jeune âge, car il fait beaucoup moins que son âge! (21 ans!).
Très attentif aux arguments des uns et des autres, surtout ceux de Maître Souhila S. la jeune avocate des Aurès, la victime a fait une déposition top, sauf que trente minutes plus tard, la défense allait passer à l'offensive en étalant des arguments aussi clairs que palpables. Le sourire craché par Maître Djediat juste après qu'il eut entendu les demandes du procureur, aura été un geste significatif quant à la cartouche qu'allait tirer l'avocat de la rue Patrice Lumumba. Le défenseur n'était pas du tout d'accord avec la grave inculpation ni avec les questions pernicieuses et tueuses du parquetier ni encore moins avec les trois ans d'emprisonnement ferme requis...
Revenant aux faits, le conseil au visage brun et à la moustache en bataille n'a surtout pas manqué de mettre en valeur, face à Hadj Baric très courtois et tolérant pour ce qui est de l'étirement des débats, le fait que Abdenour ait été interpellé le 20 avril 2013, alors que le méfait a eu lieu en novembre 2012, le 29.
«Comment peut-on reconnaître quelqu'un sur une photo placée au milieu d'une cinquantaine, quatre mois après, surtout que le vol avait été commis à l'entrée de la ville de Bou Ismaïl à vingt et une heures trente en automne'», s'était exclamé l'avocat avant que son jeune confrère le rouquin, Maître Mehdi Nouas, l'avocat de Koléa, ne prenne la relève en posant une autre question qui elle-même en soulève cent.
«Kaddour, 30 ans, a acheté le portable à neuf mille dinars. Il l'utilisait au grand jour sans chercher à le cacher où est donc le recel' Quels sont les éléments constitutifs qui vont dans le sens de l'inculpation'», s'était écrié l'aîné de Maître Redouane Nouas qui avait visiblement envie d'en découdre avec le ministère public dont le représentant du jour, Tarek Moussaoui, gardait un silence de... feu éteint!
Et si Maître Djediat a plaidé le doute dans le vol, son cadet a lui relève que Djezzy avait écrit, certifié que Kaddour a effectivement utilisé cette puce dans le mobile acquis auprès d'un certain Djamel d'une autre localité que Bou Ismaïl. L'avocat brun a réussi à capter l'attention du juge en certifiant que rares sont les individus qui se rappellent la bobine de quelqu'un aperçu la veille dans le noir. «Mon client travaille dans une pizzeria. Il n'a pas besoin de voler pour vivre. C'est une erreur en le poursuivant», a conclu Maître Djediat relayé rapidement par Maître Mehdi Nouas qui a vivement réclamé l'éloignement du recel et la relaxe de Kaddour. Fouad Guerfi, l'élégant greffier, prend acte du verdict après une courte mise en examen. Abdenour et Kaddour sont relaxés par le tribunal qui avait été bien fixé par les deux plaidoiries effectuées royalement par deux avocats de deux générations différentes.
Les familles de deux détenus étaient au comble du bonheur et la fatigue ressentie durant onze heures d'attente, de soucis, de questionnements, s'était volatilisée en cinq secondes! Chapeau, Maîtres, vous aviez visé juste et fort!


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