Algérie

?uvre au microscope. La foule de Souleiman Mansour



Art visionnaire Ou comment une toile de 1985 s?est trouvée « confirmée » par les images des Palestiniens de Ghaza se ruant sur la frontière égyptienne. Le blocus de Ghaza et ses conséquences dramatiques ont projeté sur les écrans du monde ces images insupportables. Hommes, femmes, enfants, vieillards, des familles entières amassées contre des grillages et des barbelés, visions que l?imaginaire du siècle passé ne pensait pas retrouver en ce IIIe millénaire. Ces actualités sont venues se superposer de manière extraordinaire sur la toile du peintre palestinien Souleiman Mansour intitulée « La Foule ». Exposée récemment à Alger pour l?exposition Art contemporain arabe (sept. 2007), cette huile sur toile appartient à la collection de l?Institut du monde arabe (1 m x 1,15 m). Les visages des personnages expriment une variété de sentiments : désarroi, colère, stupéfaction, tristesse, abattement avec toutes leurs combinaisons intermédiaires. De prime abord, la foule compacte semble complètement déstructurée, livrée à la débandade. En regardant mieux, on se rend compte qu?elle dessine un parfait tourbillon dont le c?ur est le personnage en tricot rouge et col de chemise blanche regardant vers la gauche du tableau et tendant à l?horizontal son poing fermé. Situé quasiment au c?ur du tableau, il en est le centre de gravité (dans les deux sens du terme). A partir de lui, le tourbillon s?organise, parfaitement dessiné en suivant dans le sens des aiguilles d?une montre les têtes des autres personnages. En choisissant ce sens de mouvement, le peintre a référé à la marche du temps, en l?occurrence à l?histoire, mais il a surtout donné au tourbillon une dynamique centripète (vers l?extérieur) et non centrifuge (vers l?intérieur). Cette orientation du mouvement peut revêtir plusieurs significations. La foule est perdue mais ne se noie pas, elle se déploie. C?est comme si Mansour voulait nous dire que même dans le désarroi, il y a présence d?une force potentielle et que l?espoir demeure permis. En choisissant de donner au centre du mouvement une expression combattive (le poing fermé), il renforce cette impression et ce n?est pas non plus un hasard qu?il ait entouré d?un halo de lumière le groupe central pour accroître cette suggestion. Les barbelés découpés semblent avoir éclaté sous la pression de la foule et la disposition des morceaux restants montre bien que c?est le tourbillon humain qui en est la cause. Mansour qui est né en 1947 à Birzeït a étudié l?art à la Bezabel Art School de Jerusalem. Il a été président de l?association des artistes palestiniens (1986-1990). Peinte en 1985, le tableau symbolisait en général le destin du peuple palestinien. Elle a pris avec les événements récents une signification troublante de coïncidence. Si l?art ne relève pas de la voyance, il est par sa pénétration et ses anticipations, un acte visionnaire.
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