L'attribution - la distribution - des compétences aux postes clés de l'UE
est toujours sujette à des luttes, influences et compromis. C'est le moment pour
les puissants lobbies de se manifester. Alors lorsqu'il s'agit du premier
poste, celui de président de l'Union, la bataille est sans concession, cruelle.
Comment une information peut-elle en cacher une autre ? Plutôt comment
une information confirme-t-elle une non-information ? C'est ce qui se déroule,
depuis quelques jours, dans les coulisses des institutions de l'UE où l'on
assiste à un vrai théâtre d'ombres chinoises. C'est que la bataille pour le
poste de président de l'UE est déjà engagée publiquement avant même l'adoption
du Traité de Lisbonne (Constitution européenne). Cela veut dire qu'il n'y a
plus de doute sur l'adoption et la mise en application du Traité européen avant
la fin 2010. L'opposition du sénat et président tchèques au Traité est chose
réglée. Cessons donc de nous perdre en conjectures et inquiétudes sur
l'architecture institutionnelle future de l'UE. Vive le Traité de Lisbonne.
Maintenant à l'arène pour assister durant les mois à venir au combat entre les
prétendants au plus haut poste de responsabilité de la future UE. Deux
candidats (en attendant d'autres) ont déjà annoncé leurs prétentions à diriger
la première puissance économique mondiale. A présider au sort de près de 500
millions d'habitants. L'Anglais Tony Blair et le Luxembourgeois Jean-Claude
Juncker ont échangé leurs premiers «coups d'épée». L'Anglais laisse, comme à
son habitude, le soin à ses partisans
de lui fabriquer une stature incontournable, alors que le
Luxembourgeois, comme à son habitude, répète «qu'il n'est pas un nain»,
politiquement s'entend. Blair a été Premier ministre durant 10 ans (1997 -
2007) d'un pays de 50 millions d'habitants et 2e économie (après
l'Allemagne) de l'UE. Juncker est
toujours (depuis 1995) 1er ministre du grand-duché du Luxembourg d'une
population de 500.000 habitants. Seulement il faudrait bien plus que des
candidatures annoncées pour gagner les règnes de l'UE. Si Tony Blair a marqué
de son empreinte la politique britannique et l'Europe, ce n'est pas qu'en bien.
Son alignement sans conditions sur les thèses de l'Américain George W Bush,
notamment son engagement pour la guerre contre l'Irak de Saddam Hussein en
2003, ne faciliteront pas la tâche à ses soutiens et lobbyistes. Tony Blair est
un «va-t-en guerre». Il n'a pas attendu George Bush pour le proclamer. C'est
lui qui en 1999 a mis la pression sur les... USA (de Bill Clinton) pour hâter
le bombardement de la Serbie par les forces de l'Otan. C'est lui le promoteur
de l'idée d'un Kosovo indépendant. Avec une telle vision de la diplomatie
internationale, Blair ne pouvait, après son départ du gouvernement britannique
en 2007, être ailleurs que porte-parole du quartet (ONU, UE, USA, Russie) pour
le Proche-Orient. George Bush y a veillé. Cerise sur le gâteau, il devient, au
même moment, conseiller de la banque JP Morgan, 3e banque américaine, dont le
siège est à New York. Avec de telles «fréquentations», Blair a-t-il des chances
de diriger l'UE ? Surtout lorsqu'il a comme principal adversaire en Europe un
certain Nicolas Sarkozy. Sans doute que Jean-Claude Juncker a-t-il estimé que
ce sont là autant de handicaps pour Blair qu'il a déclaré, mercredi, sa
candidature au poste de président de l'UE.
Juncker, qui gouverne un duché
de 500.000 habitants, ayant statut de pays, n'est nullement effrayé par les
candidats des grands pays. Il est Premier ministre de son pays depuis 1995.
Comme quoi il n'y a pas qu'en Afrique où les dynasties régnantes se perpétuent.
En 2004, frustré de ne pas avoir décroché le poste de président de la
Commission européenne (c'est Manuel Barroso qui lui chope la place), il est
récompensé, en 2005, du poste de président de l'Euro groupe (16 pays). Il est
aussi désigné par la suite gouverneur au sein de la BIRD (Banque internationale
de développement) et au sein du FMI. Connu pour ses coups de gueule et sa
franchise, il bénéficie d'une sympathie chez le public européen. En revanche,
il traîne lui aussi l'image d'un pays qui ne fait pas dans la transparence
financière en ces temps de crise internationale. Le Luxembourg passe pour être
un «asile» pour l'évasion fiscale, un paradis fiscal. Il a été classé dans le
top de la liste dite «grise» en fin 2008, au moment du pic de la crise
financière en Europe. Au même titre que Monaco ou le Liechtenstein. Ce n'est
pas avantageux sur un CV. Juncker a aussi eu des accrochages politiques avec...
Nicolas Sarkozy lorsque, ce dernier présidait le Conseil européen (juillet -
décembre 2008). Par contre, le
Luxembourgeois peut compter sur les «petits» Etats de l'UE. Les pays baltes, la
Grèce, l'Irlande et certainement la Belgique y verront d'un bon oeil sa
nomination. A bien y regarder, l'Union européenne n'a-t-elle pas d'autres
candidats pour la représenter au plus haut niveau ? A moins que les
candidatures cachées attendent que le bruit de casseroles que traînent Blair et
Juncker ne cesse, avant d'entrer dans la danse. Palpitant.
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Posté Le : 31/10/2009
Posté par : sofiane
Ecrit par : Notre Bureau De Bruxelles : M'hammedi Bouzina Med
Source : www.lequotidien-oran.com