Algérie

Une visite, une prière et de bons augures



Une visite, une prière et de bons augures
Le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, s'est rendu hier à Ghardaïa. Mais pas dans le cadre de ses déplacements «officiels» dans les wilayas du pays. Ghardaïa a déjà eu droit à sa visite de travail et d'inspection. Et c'est la deuxième fois que cette ville reçoit le chef de l'exécutif. Qu'est-ce qui lui vaut tant d'attention ' La réponse coule de source : la situation conflictuelle tendue qui plus d'une fois, et depuis des années, a engendré troubles, manifestations, affrontements, et même des victimes et des dégâts matériels. D'ailleurs, la vallée du M'zab a bouclé son année 2013 avec un déchaînement de violence qui a obligé les pouvoirs publics à déployer un dispositif anti-émeute conséquent. Ghardaïa s'est même invitée au dernier Conseil des ministres de fin d'année, évoquée par le président de la République qui a demandé à son gouvernement de poursuivre le travail pour «apporter les solutions appropriées» et ramener la quiétude et la sécurité dans cette région.Sitôt dit, sitôt fait. Le Premier ministre entamera sa nouvelle année avec le dossier «Ghardaïa» en recevant à Alger, le 2 janvier, des représentants des deux communautés ibadite et malékite pour examiner avec eux les voies et les mesures à prendre pour en finir avec ces conflits récurrents. Au final, on sortira avec une attribution de lots de terrains (30 000) à des citoyens des deux communautés, des indemnisations pour ceux dont les biens ont été vandalisés et l'espoir que ça ne se reproduira plus. Mais dès l'annonce de la rencontre et des mesures arrêtées, des voix s'élèvent de Ghardaïa pour remettre en question la représentativité de la délégation reçue par le Premier ministre et son influence sur les bandes de casseurs et les émeutiers qui sont actionnés par des personnes tapies dans l'ombre utilisant le conflit intercommunautaire comme catalyseur pour des objectifs et des intérêts personnels. Ces différends sont évidemment du pain béni pour tous les apprentis sorciers qui essayent d'exploiter la moindre fissure pour y planter leur coin et tout faire éclater, éclatement qu'on fera vite de mettre sur le compte de ceux qui dérangent les calculs et les desseins, pour exploiter les ruines sur lesquels ils érigeront leurs projets. Des élus, des militants et des simples citoyens n'ont cessé de répéter que les derniers affrontements intercommunautaires ont été fomentés par la maffia du foncier, des barons de la contrebande, des affairistes qui mettront à profit les divisions pour asseoir leur mainmise sur la région. Le conflit ne peut avoir pour seule cause le différend intercommunautaire, le problème est beaucoup plus profond et ne peut être résolu ou dépasser par des actions ponctuelles, soutiennent de nombreux habitants de Ghardaïa.Ne voulant écarter aucune voie de sortie de crise ni exclure aucun acteur susceptible d'apporter une solution, ou même un éclairage, M. Sellal décide alors de descendre dans l'arène pour voir de quoi il retourne. Il repart à Ghardaïa, mais sans tambour ni trompettes. Il ne va pas pour une visite de travail et d'inspection, avec un cortège de journalistes dans son sillage et un dispositif de sécurité renforcé alentour. Il va pour fêter le Mawlid Ennabaoui avec les gens de Ghardaïa. Le Premier ministre ne pouvait choisir meilleure date symbolique, qui sera propice pour un franc débat. Car, à n'en pas douter, M. Sellal ne se déplace pas uniquement pour faire une prière, serrer des mains ou prononcer un discours rassembleur. Son retour à Ghardaïa s'inscrit dans sa volonté et celle de l'Etat d'aplanir ces éternels différends qui minent la région et hypothèquent son développement, alors qu'elle a tout pour devenir une plaque tournante et un pôle économique régional. L'Etat essaye d'anticiper et de remédier. Mais, jusque-là, il a manqué de vision en considérant que tous les problèmes peuvent se résoudre avec des enveloppes budgétaires. Or, ces cadeaux conjoncturels ne peuvent rétablir les équilibres socioéconomiques ni colmater les lacunes de l'administration que seules une justice sociale, une gestion participative et une croissance inclusive arriveraient à combler. La visite du Premier ministre est porteuse de bons augures. Elle doit cependant connaître des prolongements en matières d'actions concrètes et impactantes. De plus, elle ne peut, et ne doit surtout, être considérée comme une fin en soi. Bien au contraire, c'est un début, et il appartient à tous les acteurs et responsables concernés de travailler de concert pour atteindre l'objectif visé, qui est de redonner à Ghardaïa l'image d'une ville propre, accueillante, tranquille et prospère. L'inclusion des partis, associations, élus, militants, et même les candidats à la présidentielle qui devraient inclure dans leurs programmes le développement participatif et la croissance inclusive, ne serait pas de trop dans l'effort de sortir cette région du creux de la vague dans lequel on l'a laissé s'enfoncer, certains l'y ont même poussé...H. G.




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