Algérie

Une ville, une histoire Le père du raï



Messaoud Bellemou - Tous ceux qui le connaissent vous diront qu'il a le c'ur sur la main. C'est un virtuose de la trompette. Il est né il y a un peu plus de cinquante ans dans cette belle ville d'Aïn Témouchent.
Aux moments les plus forts et les plus opportuns du raï, de nombreux chanteurs et autres musiciens ont tenté de s'approprier la paternité de cette musique, née à Aïn Témouchent vers la fin des années 1970 et qui a fini par conquérir le monde entier. Pourtant Bellemou, le seul et le vrai initiateur du raï, va rester presque silencieux, par pudeur, laissant tous les autres réclamer un bébé qui n'était pas le leur.
Sait-on seulement que le mot raï est une invention de journaliste ' C'était en 1979 ou en 1980, en ces temps où le raï était interdit d'antenne, parce que considéré comme licencieux par les bien-pensants, un journaliste d'Algérie Actualité, Mohamed Belhi, a fait un reportage dont le titre comportait le mot raï.
C'est la première fois que ce genre musical porte ce nom. Le journaliste avait dû être frappé par la récurrence de ce mot dans les chanson (ha raï, ya rayyi, raykoum raykoum,etc). Au moment où ce reportage a paru, beaucoup de gens à l'Ouest s'étaient demandé d'où le journaliste avait bien pu tirer cette appellation qui allait finalement être consacrée. En fait, le raï est un héritage hybride de paso doble espagnols et de mélopées de cheikhate comme Rémitti.
Bellemou, un très bon trompettiste et qui accompagnait souvent les chouyoukh et les cheikhate dans les mariages ou d'autres occasions dans des milieux plutôt interlopes, tom-bait dans sa tendance naturelle qui était celle des paso-doble qu'il avait réussi à adapter au genre des qacidate mono-cordes, les agrémentant en leur donnant un rythme inédit, entraînant et chaleureux. Le raï venait de naître, sans que personne ne s'en rende compte. C'était entre 1977 et 1978. Il faudra néanmoins savoir qu'en plus de ses tendances espagnoles, Bellemou était également influencé par le fonds oranais moderne de Ahmed Wahbi, Blaoui Houari et Bouteldja Belkacem. Quelque temps plus tard, ce nouveau genre allait sortir du milieu des cheikhate et allait être pris à bras-le-corps par des jeunes aux voix magnifiques, qui se donnèrent le titre de cheb. Les plus en vue, l'un à Oran et l'autre à Sidi Bel Abbes, à égale distance de Témouchent, cheb Khaled et cheb Zergui vont révolutionner le nouveau genre en y introduisant, l'un l'accordéon et l'autre, la guitare électrique.
Ces deux chanteurs vont se livrer une joute féroce qui ne s'éteindra qu'à la mort, dans un accident de la circulation, de cheb Zergui. Le reste est connu de raï, interdit d'antenne parce qu'il avait violé tous les tabous d'une société particulièrement conservatrice, allait entrer par la grande porte après s'être exilé à l'étranger. Au point que l'Algérien le plus connu au monde était cheb Khaled. Bellemou continua sa carrière de musicien, faisant le bonheur des noctambules et de ceux qui aimaient chanter l'amour.
Il lança bien d'autres artistes comme Gana El-Maghnaoui et adorait improviser avec des artistes vrais comme Lamkalech, le guitariste marginal de Sidi Bel Abbes. Messaoud Bellemou est un artiste qui aime les gens. Le succès ne l'a pas grisé et il adore parler de sa ville natale. La belle Témouchent, la ville entourée de vallons et de collines où la nostalgie des jours heureux est tellement vivace.


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