Algérie

Une ville, une histoire



Une ville, une histoire
Souhait - Il n'a qu'une seule envie : voir sa fille parler sa langue, et surtout serrer sa s'ur dans ses bras.
Nous sommes en 1940, et la France est engagée dans une guerre qui l'oppose au Reich allemand et qui durera cinq ans.
Tout est rationné en Algérie, que ce soit le beurre, le lait, le sucre ou le café, autant dire que les premières victimes du conflit sont d'abord les musulmans, particulière-
ment ceux dont la terre est ingrate et pauvre. Même les villes et les villages souffrent de ce conflit dont ils ne sont pas responsables.
C'est dans l'un de ces hameaux de l'Ouarsenis, encaissés entre les monts de Tiaret et la plaine du Cheliff, Ami Moussa, que le drame va éclater.
Djillali, comme tous les hommes des Ouled Ourigh est jeune, fort et basané. Il est fiancé à une jeune fille d'une tribu très puissante qui ne connaît d'autre justice que la vendetta, surtout lorsque l'honneur de leurs femmes est en jeu.
Pour des raisons qu'on ne nous a jamais précisées et dont tout le monde garde le secret dans ce milieu, Djillali, un soir, tuera sa promise, dans un accès de colère.
Sachant qu'il devra le payer tôt ou tard, il quittera son village le soir même, laissant derrière lui Kheltoum, sa s'ur, qui est en même temps sa mère adoptive.
Il ne lui donnera de ses nouvelles que dix ans plus tard à partir de Murcie, en Espagne.
L'échange au téléphone est bref, saccadé par des sanglots de l'un et de l'autre.
Kheltoum qui, pendant tout ce temps, avait fait le deuil de son frère, peut se rassurer maintenant. Djillali est vivant et bien vivant.
8 ans plus tard, en 1958, le fugitif appellera sa s'ur pour lui demander d'aller avec son fils au port accueillir sa fille Rosita.Celle-ci sera reçue comme une reine, mais le problème est qu'elle ne parlait que l'espagnol.
Avec beaucoup de patience et d'amour, Kheltoum lui apprendra sa véritable langue et lui donnera le nom de Saâdia, en hommage à sa maman défunte.
En 1962, profitant de la confusion de l'indépendance, Djillali quittera l'Espagne, traversera le Maroc et entrera en Algérie clandestinement par «Trig el wahda».
Il n'ira pas plus loin qu'Oran. Il y passera deux jours dans l'anonymat le plus total dans un hôtel pitoyable pour ne pas attirer l'attention.
Il n'a qu'une seule envie voir sa fille parler sa langue et surtout serrer sa s'ur dans ses bras.
En 1968, Saâdia est une jeune musulmane accomplie qui n'ignore rien des traditions.
Pressée par son père, elle rentrera à Murcie où un fiancé l'attend.
C'est le moment choisira Djillali pour s'installer avec sa nouvelle famille à Tetouan, au Maroc, dans l'espoir d'élever des petits enfants comme des musulmans sur une terre musulmane.
Toutes les tribus de Ami Moussa pourraient venir le chercher, il ne craint désormais personne, sa mission est accomplie.
Djillali repose aujourd'hui au cimetière de Tetouan et sa fille dirige ne importante chaîne d'hôtels à Agadir.
Mieux, pour se sentir comme en Algérie, il a fait venir la petite fille de sa s'ur qu'il a mariée à Agadir même.
Le destin a voulu qu'elle repose, elle aussi, sur cette terre, pas loin de sa tombe.




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