Une ville, une histoire

Anarchie - Tout crie et hurle à la fois, mais on ne sait pas pourquoi, et en quelques heures l'école est sens dessus dessous.
Koléa, près du littoral algérois, est une ville connue pour sa menuiserie, et surtout l'adresse de ses artisans, et depuis quelques années, pour la qualité de ses pièces en rotin.
C'est dans cette ville ancienne, à mi-chemin entre Alger et Blida, que l'armée française transférera son école militaire de cadets, installée au départ à Miliana.
Tous les pensionnaires de cette école étaient des adolescents dont l'âge variait entre 10 et 15 ans et dont les parents, ou les grands parents, avaient été engagés pendant la Première Guerre mondiale.
Bref, l'établissement avait pour mission de venir en aide à ces anciens soldats, en assurant un minimum de scolarité à leurs enfants.
Mais en 1956, en pleine guerre de libération nationale, les choses allaient changer.
Un soir, dans la grande cour commune, des élèves, pas plus hauts que trois pommes, vont provoquer un chahut terrible, sûrement poussés par les plus grands.
Malgré l'intervention énergique des surveillants, la contestation gagna toutes les classes.
Tout le monde crie et hurle à la fois, mais on ne sait pas pourquoi, et en quelques heures l'école est sens dessus dessous.
Jusqu'à 19 heures, personne ne pouvait dire ce qui se passait, ni surtout pourquoi.
A 21 heures, fatigués et le gosier en feu, tous les penssionnaires sont enfin allés dormir.
Mais le lendemain, la contestation reprendra et les enfants refuseront d'aller en classe.
Le même scénario se répétera au troisième jour et les élèves refuseront net d'aller au lit à 21 heures.
Ils ne rejoindront leur dortoir qu'à minuit.
Le lendemain matin, stupeur à l'école : une trentaine d'élèves avaient fait le mur et se sont échappés.
Ils vadrouillèrent dans la nature pendant trois jours et seront récupérés sur une plage de Castiglione, aujourd'hui Bou Ismaïl.
Hagards et affamés, ils avoueront naïvement qu'ils voulaient retourner chez eux.